Maroc: Synthèse de la plateforme de la candidature de Driss Lachguar au Premier Secrétariat IXème Congrès de l'USFP - Approche globale

19 Décembre 2024

La résurgence du projet social-démocrate Un chemin vers un avenir inclusif et durable

Depuis les années 1990, le projet socialiste a subi de multiples attaques, particulièrement face à la montée en puissance du paradigme capitaliste dominant. L'idée prédominante était claire : « Peu de pouvoir à l'État, tout le pouvoir aux forces du marché. » Dans ce contexte, les partis socialistes à travers le monde se sont retrouvés contraints de repenser leurs stratégies. Ce processus a donné naissance à la fameuse « troisième voie », incarnée notamment par l'expérience du Parti travailliste britannique sous la direction de Tony Blair.

Ce courant créateur, qui a marqué une rupture dans l'histoire des mouvements socialistes, visait à réconcilier pragmatiquement le socialisme avec les réalités économiques mondiales, mettant en avant une alliance stratégique avec les forces du marché.

Cependant, l'expérience de plusieurs pays, notamment en Amérique latine (Brésil, Chili, Argentine) et en Asie (Vietnam), montre que d'autres modèles socialistes ont produit des résultats significatifs. Ces expériences ont démontré qu'il était possible de concilier justice sociale et développement économique tout en conservant une autonomie par rapport aux diktats des marchés financiers internationaux.

Aujourd'hui, au Maroc, cette réflexion s'impose également. Nous nous trouvons à un moment charnière, où les choix politiques doivent répondre à des défis multiples : manque de vision gouvernementale claire, fragilité des équilibres sociaux, et difficultés économiques croissantes. Ces circonstances interrogent notre capacité à formuler un projet socio-économique capable de répondre aux aspirations populaires tout en s'inscrivant dans une dynamique durable.

Les grandes questions du projet social-démocrate au Maroc

Le Maroc, en tant que pays en développement, fait face à des défis structurels qui rendent la tâche complexe. Comment mobiliser des ressources financières nouvelles pour impulser une dynamique de croissance ? Quels secteurs prioritaires doivent être soutenus pour garantir une valeur ajoutée locale ? Comment repenser la répartition des rôles entre l'État, le secteur privé et les autres acteurs économiques ?

De plus, les goulets d'étranglement actuels, comme la détérioration des budgets publics, l'aggravation de la balance des paiements et les tensions sur la balance commerciale, exigent des solutions structurelles. Ces problèmes ne peuvent être résolus qu'à travers une approche combinant innovation, pragmatisme et solidarité.

L'une des principales contraintes pour mettre en oeuvre un projet socialiste au Maroc est l'absence d'une vision claire et cohérente concernant les services publics. Depuis la fin de l'expérience du gouvernement d'alternance, les politiques publiques n'ont pas su faire la distinction entre assistance sociale et développement social. En conséquence, le pays a continué à enregistrer une dégradation de son classement dans l'Indice de Développement Humain (IDH).

Bien que l'Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH) représente une avancée notable, elle reste insuffisante pour réaliser la transformation sociale souhaitée. Une politique sociale ambitieuse nécessite une stratégie globale, structurée autour de trois piliers principaux :

1. Renforcer le rôle des institutions de protection sociale en élargissant leur couverture et en assurant leur viabilité financière.

2. Mettre en oeuvre une nouvelle politique de redistribution des richesses pour soutenir les populations les plus vulnérables et anticiper les impacts des transformations démographiques.

3. Promouvoir l'économie sociale en soutenant les activités productives locales et les initiatives de microfinance, qui permettent aux populations modestes de devenir actrices de leur propre développement.

Les limites des stratégies économiques actuelles

Bien que des programmes ambitieux comme le Plan Emergence, le Maroc Vert ou encore Halieutis aient été lancés, leurs résultats restent en deçà des attentes. Ces plans, bien conçus sur le plan théorique, se sont heurtés à des obstacles tels que la faiblesse du capital national et la lenteur des réformes structurelles nécessaires.

Cependant, certains acquis sont notables, notamment dans le développement des infrastructures. Ces investissements publics massifs, s'ils sont poursuivis, pourraient devenir un levier essentiel pour renforcer la compétitivité du Maroc au niveau régional. L'État doit assumer un rôle central dans les secteurs stratégiques tout en développant des partenariats public-privé pour maximiser l'impact des investissements.

Le socialisme du XXIe siècle : pragmatisme et inclusion

Le projet social-démocrate au Maroc doit être fondé sur une approche équilibrée, qui allie intervention publique et dynamisation des initiatives privées. Cette démarche implique :

- Un leadership actif de l'État dans les secteurs clés, en garantissant une répartition équitable des richesses produites.

- Un soutien renforcé aux petites et moyennes entreprises, qui constituent un moteur important de l'économie nationale.

- Une attention particulière à la justice intergénérationnelle, en veillant à ce que les choix politiques d'aujourd'hui ne compromettent pas les opportunités des générations futures.

Pour réussir, cette vision nécessite une mobilisation collective, dépassant les clivages partisans. Le projet social-démocrate ne pourra être mis en oeuvre qu'avec une unité de position au sein des forces progressistes, basée sur une réflexion participative et ascendante.

La renaissance marocaine : un humanisme enraciné et ouvert

Le renouveau du projet social-démocrate s'inscrit également dans un cadre plus large, celui de la renaissance marocaine. Les transformations socio-économiques rapides ont mis en lumière l'émergence de nouvelles élites issues des dynamiques urbaines et rurales. Cependant, ces mutations s'accompagnent de tensions sociales exacerbées par des influences médiatiques et religieuses qui exploitent les vulnérabilités économiques et sociales des populations.

Face à cela, la réponse ne peut être uniquement morale ou répressive. Elle doit être fondée sur des politiques inclusives, qui renforcent le tissu associatif, soutiennent les initiatives locales et redonnent aux citoyens une place centrale dans les processus de décision.

Enfin, le Maroc doit inscrire son projet social-démocrate dans une perspective internationale. En tant que pont entre l'Afrique, l'Europe et le monde arabe, il a l'opportunité de promouvoir un modèle de développement basé sur la solidarité, le respect mutuel et l'innovation.

La nécessité d'un nouveau contrat social

Pour ancrer durablement un projet social-démocrate au Maroc, il est impératif de redéfinir le contrat social qui lie l'État, les citoyens, et les acteurs économiques. Ce nouveau pacte devrait reposer sur un équilibre entre droits et devoirs, avec une transparence accrue dans la gestion publique et une implication réelle des citoyens dans la gouvernance.

L'amélioration des services publics constitue une priorité. Éducation, santé, et justice sociale doivent redevenir les piliers d'un État actif, capable de garantir à chacun des opportunités équitables de réussite. Pour cela, des réformes audacieuses doivent être engagées :

Refonte du système éducatif : investir dans l'éducation de base et la formation professionnelle pour répondre aux besoins du marché tout en favorisant une citoyenneté active et critique.

Amélioration de l'accès à la santé : élargir la couverture médicale de base et moderniser les infrastructures sanitaires, en particulier dans les zones rurales et périurbaines.

Justice sociale et équité territoriale : réduire les disparités entre les régions par des investissements ciblés et la mise en place de mécanismes de solidarité interrégionale.

Le rôle de l'économie verte dans la social-démocratie

Le projet social-démocrate marocain doit également intégrer les impératifs environnementaux pour s'inscrire dans les dynamiques mondiales de lutte contre le changement climatique. Le Maroc a déjà démontré son leadership dans ce domaine, notamment grâce à des projets ambitieux tels que le complexe solaire Noor à Ouarzazate. Cependant, pour que ces initiatives profitent à tous, il faut les articuler avec une stratégie plus inclusive :

Développement des énergies renouvelables : encourager les partenariats avec le secteur privé tout en garantissant que les bénéfices soient redistribués au sein des communautés locales.

Création d'emplois verts : promouvoir des métiers liés à l'économie circulaire, au recyclage, et à l'agriculture durable.

Protection des écosystèmes naturels : renforcer les politiques de conservation tout en impliquant les populations locales dans la gestion des ressources.

L'économie verte peut ainsi devenir un levier de croissance tout en répondant aux aspirations sociales et environnementales du pays.

Renforcer la participation citoyenne

Un projet social-démocrate ne peut réussir sans une participation active des citoyens. Il est crucial de redonner confiance au peuple marocain en ses institutions. Cela passe par :

La décentralisation effective : transférer des compétences et des ressources aux collectivités locales pour rapprocher les décisions des citoyens.

La digitalisation de l'administration publique : améliorer l'accès aux services publics et lutter contre la corruption grâce à des outils technologiques transparents.

Le renforcement du rôle des associations : soutenir les initiatives citoyennes qui oeuvrent pour le développement local et la cohésion sociale.

La participation citoyenne doit également s'étendre aux sphères politiques et économiques, avec une représentation accrue des femmes et des jeunes dans les instances de décision.

Un projet porteur d'espoir pour les générations futures

Enfin, l'ambition d'un projet social-démocrate marocain ne se limite pas à résoudre les crises actuelles. Il doit s'inscrire dans une vision à long terme, portée par un espoir collectif. Cela implique ce qui suit :

- Investir dans la jeunesse, en leur offrant des perspectives d'avenir à travers des politiques éducatives et culturelles ambitieuses.

- Créer des ponts avec la diaspora marocaine : mobiliser leurs compétences et leur capital pour contribuer au développement du pays.

- Promouvoir un dialogue interculturel : s'appuyer sur l'identité plurielle du Maroc pour construire des alliances internationales solides.

En somme, le projet social-démocrate marocain, loin d'être une utopie, représente une opportunité concrète de transformer les défis en atouts, pour un avenir inclusif, durable et porteur de prospérité.

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