La famine gagne du terrain au Soudan. C'est le constat que dresse le système de classification intégrée de la sécurité alimentaire, plus connu sous son acronyme IPC, un baromètre souvent utilisé par les Nations unies ou encore les ONG humanitaires pour déterminer le niveau de malnutrition d'un pays. Ces chiffres pourraient bientôt être tronqués, faute de données après le retrait du Soudan de ce système.
Il suffit de jeter un coup d'oeil à la carte du Soudan sur le site du cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC) pour se rendre compte de la gravité de la situation. Toutes les régions, sauf une, sont colorées en orange, rouge, ou encore rouge écarlate, indiquant des taux extrêmes de malnutrition.
Alors que les combats entre l'armée et les Forces de soutien rapides (FSR) continuent, l'IPC a déclaré que 24,6 millions de Soudanais, soit près de la moitié de la population, devraient être confrontés à « des niveaux élevés d'insécurité alimentaire aiguë » entre décembre et mai prochain.
Selon un récent rapport de l'IPC diffusé ce mardi 24 décembre, la famine a gagné deux sites de déplacés à l'ouest du pays et certaines nouvelles zones au sud, portant ainsi le nombre de personnes confrontées à un niveau de faim catastrophique à 638 000, auxquelles s'ajoutent 8,1 millions de personnes au bord de la famine.
Des données bientôt indisponibles ?
Une propagation qui risque de ne pas s'arrêter là, prévient le Comité d'examen de la famine, dont les projections pourraient être biaisées dans les mois à venir. En effet, selon l'agence de presse Reuters, le Soudan s'est retiré du système de classification quelques heures seulement avant la publication du rapport.
Dans une lettre consultée par nos confrères, le ministère soudanais de l'Agriculture accuse l'IPC de « publier des rapports non fiables qui portent atteinte à la souveraineté et à la dignité du Soudan ».
Un retrait qui inquiète certains humanitaires contactés par l'agence de presse. « Le retrait du système IPC ne changera pas la réalité de la faim sur le terrain », déclare une source humanitaire, « mais il prive la communauté internationale de sa boussole pour naviguer dans la crise de la faim au Soudan. Sans analyse indépendante, nous naviguons à l'aveuglette dans cette tempête d'insécurité alimentaire. »