Le mouvement locavore, né en 2005 aux États-Unis, a pris de l'ampleur avec la pandémie de Covid-19, qui a modifié les habitudes de consommation. La tendance à privilégier la consommation locale a gagné en importance, notamment en raison des perturbations dans l'approvisionnement des produits importés. Cette situation a mis en lumière l'importance d'une production locale résiliente, tout en soulignant la nécessité de favoriser les circuits courts pour réduire l'empreinte carbone.
Face à une prise de conscience croissante de l'importance de soutenir l'économie locale, il devient essentiel de comprendre comment les Mauriciens abordent réellement la question de la consommation locale. Jayen Chellum, secrétaire général de l'ACIM, partage ses observations : «Ceux qui achètent local le font souvent par souci environnemental, mais cette prise de conscience reste limitée. Les consommateurs ne considèrent pas toujours les impacts écologiques liés à l'énergie nécessaire pour produire et transporter les biens importés. Pourtant, consommer local permet de soutenir l'industrie et la maind'oeuvre mauriciennes.»
Pour lui, promouvoir les produits locaux nécessite de repenser la société de consommation. «Ceux qui sont sensibilisés et en ont les moyens sont prêts à payer plus cher, mais la majorité des gens priorisent encore les prix, surtout en ces temps difficiles. Ils se tournent souvent vers des produits moins coûteux, ce qui complique la transition vers une consommation locale à grande échelle. Prenons l'exemple du poisson frais, qui reste très cher à Maurice, malgré nos ressources marines abondantes. Cela illustre bien les contradictions du marché local.»
Il souligne également que favoriser la production locale est crucial pour protéger la main-d'oeuvre et encourager l'investissement local. Mais cela ne doit cependant pas se faire au détriment des consommateurs, qui se retrouvent parfois à payer des prix exagérément élevés. «Nous avons déjà vu des exemples où les prix des produits locaux ont grimpé sans raison majeure.» Jayen Chellum insiste sur la nécessité pour le gouvernement d'agir en régulant ces pratiques.
Pour sa part, Rudy Paul explique qu'il prend en compte le prix, la qualité et l'origine des produits lorsqu'il fait ses achats. Cependant, il souligne que le produit doit rester abordable. «Je trouve qu'il faudrait davantage encourager la production locale. Il y a du potentiel. Ce serait une bonne chose de réduire les importations. Mais c'est vrai que les produits locaux sont souvent plus chers.»
En ce qui concerne la nourriture en tant que base fondamentale, Chef Bruno, qui travaille dans le service traiteur, souligne que «certains produits ne sont pas disponibles en production locale. Il est possible d'utiliser uniquement des produits locaux pour les plats typiques mauriciens, mais pas pour d'autres.» Néanmoins, pour lui, la qualité des produits prime comme critère de sélection tout en considérant le coût.
Jayen Chellum propose une politique équilibrée, capable de protéger et de dynamiser le marché local tout en garantissant un accès équitable aux produits pour les consommateurs. «Encourager la production locale est une priorité, mais cela doit s'accompagner d'une stratégie qui ne pénalise pas les ménages déjà confrontés à des défis économiques majeurs.»