La révocation de Vikram Hurdoyal en tant que ministre de l'Agro-industrie, le blocage des réseaux sociaux : des décisions de Lakwizinn mal inspirées en cette année cruciale. Tout comme le débauchage de Xavier-Luc Duval et la nomination de son fils Adrien. Cependant, l'affaire qui a largement retenu l'attention durant cette courte campagne électorale de 2024 aurait été, sans nul doute, le désormais célèbre «Missie Moustass»...
Si on savait tous au début de l'année 2024 que le Parlement serait dissous automatiquement le 21 novembre, plusieurs pensaient que les législatives auraient lieu entre décembre 2024 et avril 2025. D'autres prédisaient que Pravind Jugnauth pourrait dissoudre l'Assemblée nationale (AN) avant le 21 novembre et organiser une snap election. En tout cas, la date exacte des élections était plus qu'incertaine et le Premier ministre (PM) d'alors en conservait le secret absolu.
Or, la révocation de Vikram Hurdoyal en tant que ministre par l'ex-PM le 11 février, aura bousculé l'agenda de ce dernier, qui ne se doutait pas que le révoqué allait, deux jours après, démissionner en tant que député. Cela mettait alors le gouvernement devant l'obligation d'organiser une élection partielle au plus tard le 10 octobre 2024. Le président de la République d'alors, Pradeep Roopun, avait alors émis, le 12 mai, le writ de l'élection partielle dans la circonscription no 10. Le Nomination Day fut fixé au 11 juillet et la partielle au 9 octobre.
Le coup de bluff
Bien que tout le monde, y compris l'opposition d'alors, ne croyait pas à cette partielle, Pravind Jugnauth a maintenu à plusieurs reprises qu'elle aurait bien lieu. Le 11 juillet, la candidature d'Avineshwur Dayal pour le Mouvement socialiste militant (MSM) a été annoncée, mais l'opposition n'a proposé aucun candidat.
ravind Jugnauth a connu une large défaite lors des dernières élections générales après avoir occupé le poste de PM pendant près de sept ans...
Navin Ramgoolam, qui avait connu deux défaites consécutives, est revenu en force avec une victoire historique : un 60-0.
Le PTr et le MMM ont formé une équipe avec des anciens du PMSD, les Nouveaux Démocrates et Rezistans ek Alternativ.
Le PMSD a quitté l'alliance avec le PTr et le MMM en avril pour se rallier, finalement, peu avant les élections, «officiellement» au MSM.
La révocation et la démission de Vikram Hurdoyal ont provoqué une élection partielle au no 10, qui ne s'est finalement pas tenue, comme l'avait maintenu Pravind Jugnauth.
Pravind Jugnauth a continué à maintenir le suspense jusqu'au 4 octobre, lorsqu'il a annoncé enfin la dissolution du Parlement, à quelques jours de la date de la partielle, prévue le 9 octobre. Les élections générales ont alors été annoncées pour le 10 novembre. Ainsi, comme le prédisait notamment l'opposition d'alors, Pravind Jugnauth aura bel et bien bluffé, comme il l'avait fait en 2019 après la démission de Vishnu Lutchmeenaraidoo le 21 mars 2019.
Une campagne courte mais intense a donc commencé le 4 octobre. Avant cela, Adrien Duval avait été nommé speaker le 18 juillet en remplacement de Sooroojdev Phokeer sous les cris de «honte» de l'opposition. Cette nomination a eu lieu en prévision d'une alliance entre le Parti mauricien social-démocrate (PMSD) et le MSM, alliance qui a été officialisée le 7 octobre, bien qu'elle n'ait été un secret pour personne. Cela, malgré les nombreuses tentatives de Xavier-Luc Duval, leader du PMSD, de démentir cette alliance. Quant à Sooroojdev Phokeer, qui avait dû céder sa place, il avait prétendu être malade. Cependant, quelques mois plus tard, on l'a vu en pleine forme sur les estrades du MSM, vociférant contre l'opposition.
Cassure...
L'année 2024 a aussi été marquée par un événement majeur en politique : le 14 avril, le PMSD quitte l'alliance avec le Parti travailliste (PTr) et le Mouvement militant mauricien (MMM). Les explications de Xavier-Luc Duval, selon lesquelles il était devenu impossible pour lui de travailler avec Paul Bérenger, n'avaient pas convaincu. Lors de l'intronisation d'Adrien Duval comme speaker, il était devenu évident, du moins pour certains, que les Duval négociaient en secret avec le MSM depuis un certain temps. L'homme pont n'était autre que Rakesh Gooljaury, à qui Xavier-Luc Duval aurait transmis en avance le contenu de ses Private Notice Questions. C'est dans ce même contexte que les tirages au sort pour les questions parlementaires se sont fait en l'absence de Patrice Armance, l'ex-député du PMSD resté fidèle à Xavier-Luc Duval.
L'alliance du PMSD avec le MSM a provoqué une crise au sein du gouvernement, car il fallait faire de la place pour les candidats bleus, au détriment des petits partenaires du MSM. Ainsi, le ticket au no 18 a été attribué à Xavier-Luc Duval, et Tania Diolle a dû migrer vers la circonscription no 14 (Savanne-Rivière-Noire), non sans montrer son mécontentement. Elle a été la première députée sortante de la majorité à s'exprimer après la défaite du MSM. Dans une interview accordée à l'express le 24 novembre, elle a déclaré que l'alliance du MSM avec le PMSD avait été contreproductive et qu'en restant au no 18, elle aurait peut-être mieux fait que Xavier-Luc Duval. «Qui sait, même à la 3e place, j'aurais pu être repêchée comme Best Loser.»
Bienvenue ReA et «Missie Moustass»
De l'autre côté, l'événement a été le ralliement de Rezistans ek Alternativ (ReA) au PTr, MMM et Nouveaux Démocrates. Même si ReA n'a obtenu que trois tickets, sa contribution à la défaite du MSM est incontestable. La participation de ce parti à l'Alliance du changement a contribué à instaurer un véritable air de changement, comme l'avait promis Navin Ramgoolam, et que les Mauriciens attendent désormais...
Bien évidemment, les révélations choquantes des bandes sonores de Missie Moustass ont planté le dernier clou dans la défaite cuisante du MSM. On a appris, entre autres, que Kobita Jugnauth commandait son époux, que le PM dirigeait la police, que la police faisait des cover-ups, etc. Grâce à ces audios, on a su que Sherry Singh n'avait pas tort d'accuser le gouvernement Jugnauth d'espionner les Mauriciens.
Pour tenter d'empêcher l'accès à ces nouvelles bandes, le gouvernement MSM a pris une décision très mal avisée : bloquer les réseaux sociaux à partir du 31 octobre. Mais les Mauriciens, plus malins, ont su contourner ce blocage en utilisant des VPN. Le gouvernement, constatant que cela ne servait à rien, a levé le blocage le 2 novembre. Cela ne l'a pas empêché de perdre par 60-0 aux élections du 10 novembre.
À noter que les Mauriciens étaient également sceptiques à propos de l'enregistrement obligatoire des cartes SIM et des nouvelles cartes d'identité. À noter que l'enregistrement obligatoire des cartes SIM est désormais révolu. Le gouvernement a avalisé cette décision lors de la réunion du Conseil des ministres, le vendredi 27 décembre. La promulgation des Information and Communication Technologies (Registration of SIM) (Revocation) Regulations 2024 a été approuvée, mettant fin à l'obligation pour les utilisateurs de cartes SIM de les réenregistrer.
Victoire historique
Le pays a connu le troisième 60-0 de son histoire avec la victoire sans équivoque de l'Alliance du changement. Le jour du dépouillement, les membres du MSM, y compris son leader, avaient très tôt concédé la défaite et quitté les centres de vote. Depuis, ce n'est que le 25 décembre que Pravind Jugnauth s'est adressé aux Mauriciens pour la première fois depuis les législatives, par le biais d'un post sur les réseaux sociaux notamment. Qu'en est-il de son avenir politique et de celui du MSM ? Atann nou gete...