Madagascar: Une statue au Prof. Henri Humbert

Madagascar brûle de mille feux de brousse. Incompréhensible suicide collectif que soixante-cinq ans de mise en garde n'auront pas suffi à dissuader. En attendant le tour des humains, des champs comme des villes, ils sont déjà des centaines et des milliers, flore et faune, ultimes représentants de cette «Nature Cinq Étoiles» que le monde entier nous enviait, à disparaître chaque jour.

Ne pouvant établir la liste exhaustive de ces «chers disparus», je mets en exergue des noms rencontrés au hasard de lectures dont je me demande si elles ne m'auraient pas été plus utiles que les ouvrages de science-politique, histoire, relations internationales, géopolitique, qu'accueillit majoritairement ma bibliothèque à une époque où j'avais encore la niaque des études.

Les noms de Humbert, Heim de Balsac, Capuron, ne diraient rien à la majorité d'entre nous. Avec ceux-là et d'autres, Henri Humbert aura pourtant beaucoup fait pour l'oeuvre écologique à Madagascar. Pour ne citer que «Contributions à l'étude de la flore de Madagascar et des Comores»: Fasc.1 (Paris, Notulae systematicae, 1939, tome VII, pp.1-24) ; Fasc.II (Paris, Notulae systematicae, 1941, tome IX, pp.95-111) ; Fasc.III (Paris, Notulae systematicae, mars 1942, tome X, pp.95-112) ; Fasc.IV (Paris, Notulae systematicae, 1948, tome XIII (4), pp.304-332.

En ce qui concerne le professeur Henri Jean Humbert (1887-1967), les titres de ses multiples publications, simplement mis bout à bout, dénonçaient déjà une triste réalité qui nous rattrape, un siècle plus tard : «La disparition des forêts à Madagascar. Ses causes, ses conséquences» (Paris, Rev. gen. Sc. pures et appliq., 15 juin 1927, pp.325-336) ; «La destruction d'une flore insulaire par le feu» (Mémoires de l'Académie Malgache, fasc.V, 1927) ; «L'extinction des derniers vestiges de certains types de végétation autochtone à Madagascar» (Paris, Archives du Museum, 1935, volume du Tricentenaire, 6ème série, pp.569-587, 4 planches) ; «La dégradation des sols à Madagascar» (Tananarive, Mém. Instit. Scienc. de Madagascar, 1949, série D, tome I, fasc.1, pp.32-52) ; «Un exemple suggestif de désertification provoquée : les territoires semi-arides du Sud de Madagascar» (in : Rapport présenté à l'Ass. de l'Union intern. pour la protection de la Nature tenue à Caracas du 2 au 9 septembre 1952).

Depuis sa thèse de doctorat («Les composées de Madagascar», Caen, 1923), Henri Humbert aura été envouté par la Nature malgache. Le professeur Roger Heim, prononçant son éloge funèbre, dira : «les énigmes qu'il désirait résoudre n'étaient que celles que lui posait la Nature, Madagascar aura été la grande adoption de sa vie et les voyages qu'il y fit, l'endémisme exceptionnel qu'il y découvrait, l'originalité des forêts, l'immensité des plateaux, la diversité des races qui l'occupent, faisaient vibrer son coeur conquis» (Note biographique par Roger Heim, in : Journal d'agriculture traditionnelle et de botanique appliquée, vol.14, n°12, décembre 1967, pp.609-611).

«Cinquante ans de recherches botaniques à Madagascar» (Bull. Acad. Malg., 1954, numéro spécial du Cinquantenaire, pp.33-42) qui lui auront, au moins, dressé le «tsangambato» d'un arbre baptisé de son nom, Humbertia Madagascariensis : le bois de fer, espèce de plantes dicotylédones de la famille des Convolvulaceae, endémique de Madagascar (Wikipédia) : «cet Humbertia est un grand arbre, atteignant couramment 25 mètres de hauteur et 80 cm de diamètre, abondant dans les restes de forêt intacte de la zone côtière entre Farafangana et Fort-Dauphin, à très basse altitude. Il est connu localement sous les noms de Fantsinakoho ou d'Endranendrana, ce dernier mot signifiant «perpétuel» par allusion à l'incorruptibilité du bois» (A. Mariaux, «Contribution à l'étude de Humbertia madagascariensis Lamk. II.», Note sur le bois, in : Journal d'agriculture traditionnelle et de botanique appliquée, vol.6, n°12, décembre 1959, pp.616-619).

En même temps que les «regrets éternels», et comme ce fut prononcé au seuil de sa tombe : «à Henri Humbert, Madagascar pourrait élever sa statue».

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