Madagascar: Élections législatives et communales - L'Irmar consolide son socle politique

Dans la foulée de 2023, qui a vu la présidentielle, l'année 2024 a été bercée par les législatives et les communales. Deux élections qui ont vu l'Irmar rafler la mise, mais aussi l'émergence de nouvelles entités et figures politiques.

Un tournant significatif. L'issue des élections législatives et communales qui se sont tenues cette année. Malgré les controverses, ces deux scrutins ont redessiné le paysage politique du pays.

Dans la continuité de la présidentielle de 2023, les législatives du 29 mai et les communales du 11 décembre ont été les deux principaux rendez-vous politiques de cette année 2024. Le constat est sans appel. Les chiffres indiquent que ces scrutins ont consolidé l'assise politique de la coalition "Isika rehetra miaraka amin'i Andry Rajoelina" (Irmar).

Avec quatre-vingt-un députés élus sous ses couleurs, plus quelques députés indépendants qui ont rejoint ses rangs, menant à plus de cent députés membres de son groupe parlementaire, l'Irmar a reconquis la majorité absolue à l'Assemblée nationale. La Chambre basse compte cent soixante-trois députés. Les Orange peuvent aussi compter sur un groupe parlementaire composé de députés élus sous des couleurs indépendantes et qui est la 2e force politique à l'institution de Tsimbazaza.

Cette assise politique des Orange est également confortée au niveau local. Selon les résultats provisoires des élections communales et municipales, l'Irmar a conquis neuf-cents soixante-sept communes sur les mille six-cents quatre-vingt-quinze réparties sur l'ensemble du territoire, dont les cinq chefs-lieux de province. Il faut y ajouter une armée de conseillers municipaux ou communaux. Cette hégémonie de la coalition au pouvoir est au détriment des entités d'opposition.

Voulant surfer sur la dynamique du collectif des onze candidats à la présidentielle, en 2023, l'opposition a essayé de s'ériger en une seule grande plateforme. Au final, le collectif s'est scindé en deux pour former deux coalitions d'opposition, distinctes. La coalition "Firaisankina", d'une part, et le "Kolektifan'ny Malagasy", d'autre part.

Toutefois, les législatives et les municipales ont été une déroute électorale pour les deux coalitions d'opposition. Loin des ambitions affirmées, "Firaisankina" n'a pu faire élire que vingt-deux députés. Le "Kolektifan'ny Malagasy", lui, n'en a qu'un seul. Une débâcle renchérie par l'issue des communales, d'autant que les deux coalitions d'opposition s'y sont engagées en ordre dispersé.

Renouveau

Bien qu'elles dénoncent des entraves à la candidature de leur porte-étendard, le fait que les entités affirmant officiellement être d'opposition n'aient pas pu avoir un maillage national en nombre de candidats aux communales jette aussi un doute sur leur crédibilité politique. Les élections du 11 décembre tendent, par exemple, à réduire l'envergure du parti "Tiako i Madagascar" (TIM) à une dimension régionale.

Autant en nombre de candidats qu'en termes d'élus provisoires, le TIM n'est essentiellement présent que dans la province d'Antananarivo. Du reste, ses performances sont poussives, avec seulement trente-huit maires provisoirement élus. Au détriment des formations politiques, surtout des opposants, les législatives et les communales de cette année ont conforté la place des indépendants dans l'échiquier politique.

Aux législatives, les candidats indépendants ont gagné cinquante sièges de députés. Aux dernières communales, ils sont quatre-cents soixante-quatorze indépendants à être provisoirement élus maires. Les indépendants incarnent aussi un renouveau des figures de l'arène politique. Les deux processus électoraux qui se sont tenus en 2024 ont aussi permis l'émergence de nouvelles figures politiques et la percée de jeunes formations politiques.

Du côté des formations politiques, la performance du parti FIVOI qui a conquis quatre sièges de députés et provisoirement cinquante-deux communes est remarquable. Pour sa première participation aux élections communales, le parti "Antoka sy dinan'ny Nosy" (ADN) a également réussi une percée encourageante, avec trente-six maires élus provisoirement.

Les deux scrutins de cette année ont, par ailleurs, vu de nouvelles personnalités politiques au-devant de la scène. Il y a les nouvelles figures à l'Assemblée nationale, comme Justin Tokely, président de l'institution, et les députés O'Gasikara Fenosoa Mandrindrarivony et Rina Randriamasinoro. Des candidats maires comme ceux d'Antananarivo, en l'occurrence Harilala Ramanantsoa, Tojo Ravalomanana et Tahina Razafinjoelina, ont été sous les projecteurs.

Taux de participation en demi-teinte

Le taux de participation durant les élections législatives et communales de cette année 2024 est de 48,03 % pour le premier scrutin et 48,79 % pour le second selon les résultats provisoires publiés par la Commission électorale nationale indépendante (Ceni). Ce chiffre est dans la veine des taux de participation enregistrés durant les élections qui ont suivi le premier tour de la présidentielle de 2018.

Cette désaffection citoyenne vis-à-vis des urnes peut être interprétée sous différents angles. Cependant, elle impose une remise en question chez les acteurs politiques. Visiblement, la classe politique est incapable de mobiliser les citoyens à aller voter. Une incapacité qui prévaut aussi pour les organisations de la société civile, dont l'éducation citoyenne et électorale est la raison d'être affirmée.

Les controverses systématiques autour des élections de ces dernières années et qui ont entouré les scrutins de cette année 2024 pourraient avoir créé une crise de confiance des citoyens vis-à-vis des institutions électorales. Il est probable que cela traduise un manque de confiance vis-à-vis du processus électoral et des institutions électorales. Le taux de participation constamment en berne devrait être un déclic pour engager des réformes.

Des figures politiques poussées sur la touche

Les deux scrutins de cette année 2024 ont également poussé sur le banc de touche, voire à la retraite probablement pour certaines, des personnalités considérées comme des ténors de l'arène politique. Depuis sa défaite aux législatives dans le district d'Ambatofinandrahana, Christine Razanamahasoa, ancienne présidente de l'Assemblée nationale, peine à retrouver une place dans l'échiquier politique. Le refus de sa candidature aux municipales à Fianarantsoa a été probablement le coup de grâce.

L'ancien candidat à la présidentielle Hajo Andrianainarivelo a, lui aussi, perdu des plumes aux législatives. Sa crédibilité politique en a pris un coup depuis sa défaite dans le district d'Avaradrano. Depuis, il mise sur des coups d'éclat médiatiques pour rester un acteur actif dans l'arène.

Parmi les hauts-parleurs de la scène politique depuis près de dix ans, l'ancien vice-président de l'Assemblée nationale et ancien candidat à la présidentielle Jean Brunelle Razafitsiandraofa a disparu des radars depuis sa défaite aux législatives à Ikongo. Autre ancien député vociférant, Paul Bert Rahasimanana, dit Rossy, est sur la touche du playground politique depuis qu'il a perdu son siège d'élu du IVe arrondissement d'Antananarivo. Se consacrant à nouveau à la musique, il reste particulièrement actif sur les réseaux sociaux.

AllAfrica publie environ 500 articles par jour provenant de plus de 110 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.