Cote d'Ivoire: Siandou Fofana (ministre du Tourisme et des Loisirs) - « La vitalité de l'écosystème touristique et ludique est le reflet de la stabilité du pays »

30 Décembre 2024

Monsieur le ministre, nous avons célébré la 3e édition de la cérémonie annuelle de distinction des acteurs de l'écosystème touristique et ludique, le 20 décembre dernier : « les Sublimes du tourisme ». Pourquoi l'avoir placée sous le sceau du thème, « Côte d'Ivoire, Terre de découverte et de gastronomie » ?

Au sortir d'une année 2024 marquée par l'empreinte indélébile d'une Coupe d'Afrique des nations de football (Can) de tous les superlatifs, il était bon de distinguer les meilleurs acteurs de notre écosystème touristique et ludique dont ce succès porte aussi la signature.

Le thème "Côte d'Ivoire, terre de découverte et de gastronomie", plus qu'une réclame mercatique, est une véritable invitation à explorer l'essence de notre nation à travers ses saveurs authentiques et ses traditions riches et variées. Plus qu'un simple art culinaire, la gastronomie ivoirienne se révèle être un puissant vecteur de rapprochement entre les peuples, une passerelle unique vers la compréhension interculturelle et un miroir de l'identité nationale.

Pourquoi spécifiquement faire de la gastronomie ivoirienne une niche à promouvoir activement ?

Elle incarne une fierté inestimable, célébrant le patrimoine vivant de nos terroirs et mettant en lumière la créativité et le savoir-faire de nos artisans. Ce patrimoine gastronomique est également un levier stratégique de développement, capable de dynamiser l'économie locale et d'attirer l'intérêt mondial.

C'est pourquoi nous avons choisi d'en faire une niche à promouvoir activement, afin de renforcer son rayonnement, à la fois en tant qu'élément culturel emblématique et moteur de croissance touristique. À travers cette démarche, nous souhaitons positionner la Côte d'Ivoire comme une destination incontournable où les plaisirs de la table se mêlent harmonieusement à la découverte de ses richesses emblématiques et naturelles.

Il était question en 2024 de passer de l'art culinaire à la gastronomie. Où en sommes-nous quant à la codification des fiches techniques et la labellisation de mets typiques ?

Nous avançons avec méthode dans un processus structuré d'identification et de classification des mets emblématiques de notre patrimoine culinaire, un préalable essentiel pour parvenir à une codification gastronomique complète.

Cette démarche rigoureuse vise à poser les bases d'une valorisation durable de nos traditions culinaires, tout en assurant leur transmission et leur reconnaissance à l'échelle nationale et internationale. Convaincus que les ressources humaines sont capitales dans l'atteinte de nos objectifs, nous avons procédé à la formation des serveurs, des cuisiniers, des valets de chambre, des sommeliers, des barmans, des guides de tourisme, à travers plusieurs sessions de renforcement de capacités.

Actuellement, ce sont 200 acteurs qui planchent sur l'élaboration de la fiche technique de cuisine sans compter qu'en termes des ormation initiale, ce sont plus de 350 bacheliers dans les métiers de tourisme et de l'hôtellerie qui bénéficient d'une bourse d'études octroyée par nos soins au Maroc.

À ce jour, deux éditions de notre concours culinaire national ont été organisées (Le Festival national de la cuisine ivoirienne), permettant de mettre en lumière et de répertorier six mets emblématiques. Ces résultats marquent une étape importante dans notre volonté de documenter et de préserver les trésors de notre gastronomie, tout en ouvrant la voie à leur promotion en tant qu'éléments distinctifs de l'identité ivoirienne.

Toutes ces actions s'inscrivent-elles également dans le développement d'un tourisme gastronomique ?

En effet, nous déployons le tourisme gastronomique à travers un cadre stratégique articulé autour de quatre axes majeurs.

La valorisation de la culture locale : la gastronomie ivoirienne, à la fois riche et variée, incarne les traditions et l'histoire de notre nation. Des plats emblématiques, tels que l'attiéké, le foutou ou le kédjénou reflètent l'identité culturelle du pays et séduisent les visiteurs en quête d'authenticité et de nouvelles saveurs.

L'attraction de nouveaux visiteurs : le tourisme gastronomique répond à une demande croissante pour des expériences culinaires uniques. En mettant en lumière la richesse de la cuisine locale, la Côte d'Ivoire peut se positionner comme une destination prisée des gourmets et des aventuriers culinaires du monde entier, augmentant ainsi son affluence touristique.

Le développement économique local : ce segment touristique constitue un levier puissant pour dynamiser l'économie locale. Il favorise la création d'emplois pour les producteurs, restaurateurs et artisans, tout en encourageant l'utilisation des produits locaux. Par cette approche, il renforce les chaînes d'approvisionnement et soutient les acteurs du terroir.

La promotion de l'image de marque-pays : une cuisine distinctive est un formidable ambassadeur pour une destination. La gastronomie ivoirienne peut devenir un symbole puissant de notre identité nationale, projetant une image de modernité et de dynamisme qui rehausse notre attractivité sur la scène internationale.

Ainsi, à travers ces quatre axes, nous positionnons la Côte d'Ivoire comme une référence incontournable du tourisme gastronomique, alliant authenticité, développement et rayonnement international.

La Can 2023, organisée en janvier-février 2024, au-delà de l'évènement sportif, a conféré une visibilité remarquable à la destination ivoirienne par son hospitalité, sa culture et son art culinaire. Qu'est-ce que cela vous inspire ?

Dans un monde en perpétuelle mutation, la Côte d'Ivoire s'impose en valorisant les leviers contemporains de puissance : l'innovation, l'information et le développement. Sous le leadership visionnaire de SEM. Alassane Ouattara, Président de la République, le pays occupe aujourd'hui une place de choix sur la scène internationale. Cette dynamique s'appuie sur des investissements étrangers stratégiques dans des secteurs clés, tels que les infrastructures et l'énergie, ainsi que sur le renforcement significatif de ses partenariats internationaux.

Grâce à sa stabilité politique et économique, la Côte d'Ivoire est devenue une destination de référence, renforçant sa crédibilité et son attractivité à l'échelle mondiale. Pour 2025, le ministère du Tourisme et des Loisirs intensifie ses efforts de lobbying auprès des grandes nations et entreprises internationales, avec pour ambition de consolider l'image du pays et de positionner le secteur touristique comme un pilier incontournable de son développement.

Peut-on dire que, pour 2025, vous misez sur le soft power pour promouvoir la destination « Ivoire », à l'instar du récent séjour de mise au vert des candidates au concours Miss France en terre ivoirienne ou encore du partenariat avec l'Olympique de Marseille à travers Sublime Côte d'Ivoire ?

Vous avez raison de souligner le rôle central du soft power comme levier de promotion. À peine les 30 candidates au concours Miss France 2025 et la société Miss France achevaient-elles un séjour mémorable de mise au vert en Côte d'Ivoire, le staff de l'Olympique de Marseille foulait à son tour les rives de la lagune Ébrié. Ces événements, combinés au retentissant succès de la Can 2023 en janvier-février 2024, ont propulsé la destination ivoirienne sur la carte mondiale du tourisme. Ce qui pourrait sembler fortuit est, en réalité, l'expression d'une stratégie nationale de country branding méticuleusement élaborée, dont le soft power constitue un pilier fondamental.

Les reportages, articles et les publications d'images des candidates au concours Miss France dégustant des mets ivoiriens ou s'essayant à la préparation de plats locaux illustrent parfaitement une approche stratégique. Elle s'inscrit dans une démarche de séduction internationale qui vise à obtenir des résultats durables. Le soft power permet d'atteindre les objectifs sur la scène internationale, lorsque d'autres nations, admirant vos valeurs et imitant vos pratiques ou aspirant à votre prospérité, choisissent de suivre votre exemple. C'est cette ambition qui anime aujourd'hui la Côte d'Ivoire dans son rayonnement mondial.

Le boom hôtelier et celui des espaces de restauration aux normes internationales sont visibles. Qu'en est-il pour le secteur des aires et parcs de loisir ?

Les espaces de loisir en Côte d'Ivoire connaissent une montée en puissance, devenant des piliers de cohésion sociale, d'épanouissement individuel et de dynamisme communautaire. La lutte contre les modes de vie sédentaires a incité le gouvernement ivoirien à autoriser l'implantation d'entreprises spécialisées dans le secteur des loisirs.

Parmi les réussites notables, nous pouvons citer : le Groupe Hyde Parc qui a installé une dizaine de parcs aquatiques dénommés Splash parc à Abidjan et à l'intérieur du pays. Il y a aussi Paridisia à Abidjan qui fait le bonheur de nos enfants.

En termes de centres de loisir, on pourrait citer les Domaines Bini qui s'installent dans nos parcs nationaux et dans les grandes villes de la Côte d'Ivoire. Il faut noter la vulgarisation et la promotion de nos jeux traditionnels qui constituent les loisirs endogènes. L'ambition est de créer à long terme des ludothèques et passer à une phase de digitalisation.

Les loisirs, c'est tout aussi les établissements de nuit que sont nos bars, lounges et boîtes de nuit qui font dire à nos visiteurs qu'Abidjan est le plus doux au monde. Les différents projets portés par mon département ministériel démontrent l'engagement du pays à devenir un pôle de divertissement régional. Et l'ambition va encore plus loin avec le projet «Akwaba Parc», destiné à devenir le plus grand parc d'attraction de l'Afrique de l'Ouest. Ce parc futuriste, prévu sur 100 hectares, promet des attractions de dernière génération et un design architectural exceptionnel. Ce développement ambitieux pourrait transformer la Côte d'Ivoire en une destination incontournable de loisirs, attirant non seulement les habitants locaux, mais aussi les visiteurs des pays voisins.

Nous constatons que la quête de la qualité semble être votre priorité, avec à la clé, les campagnes de mise en conformité, d'inspection, de contrôle et de classement des établissements qui se tiennent. Quelles sont les mesures arrêtées pour un service de qualité ?

La Côte d'Ivoire a mis en place plusieurs initiatives pour renforcer les normes et la qualité dans le secteur touristique et ludique dans le cadre de la stratégie «Sublime Côte d'Ivoire». Voici quelques points clés : Réglementation et Conformité : La Loi n° 2014-139 du 24 mars 2014 dispose que toute activité touristique doit être autorisée par le ministre chargé du Tourisme. En 2023, environ 2000 établissements touristiques ont été régularisés.

Programme national d'amélioration de la qualité : Ce programme vise à améliorer la qualité des établissements touristiques à travers des audiences publiques et des campagnes de sensibilisation.

Objectifs de développement : La Côte d'Ivoire vise à porter la contribution du secteur du tourisme au Pib à 10% d'ici 2025. Les réformes incluent le développement des infrastructures et l'amélioration de la compétitivité du secteur.

Ces efforts montrent l'engagement du pays à devenir une destination touristique de premier plan, tant pour les visiteurs nationaux qu'internationaux.

Aujourd'hui, quel regard jetez-vous sur la place du tourisme dans nos économies africaines ?

Les Africains doivent pleinement reconnaître l'importance stratégique et le potentiel économique et social du tourisme. Bien que l'Afrique, souvent considérée comme le berceau de l'humanité, regorge de paysages spectaculaires et de sites parmi les plus accueillants au monde, ce secteur reste largement sous-exploité. Hormis quelques exceptions notables en Afrique du Nord, de l'Est et dans certaines îles, le tourisme demeure une activité marginale sur le continent.

Dans cet élan, la Commission régionale pour l'Afrique de Onu Tourisme a organisé à Livingstone (Zambie), en cette année 2024, le 2e Forum sur la formalisation de la « Marque-Afrique ». Aussi importe-il de rappeler, avec emphase, que l'incidence recherchée était d'exploiter le potentiel touristique de la région Afrique. Le forum auquel nous avons pris une part active ambitionnait de promouvoir l'Afrique comme une destination touristique de premier plan, en mettant en lumière son patrimoine culturel et naturel.

À l'occasion de ce 2e forum, votre plaidoyer avec vos pairs pour l'émergence d'une Marque-Afrique, a-t-il été attendu ?

L'objectif était, au sortir de ce conclave, de développer des stratégies efficaces en matière de communication, de marketing et d'image de marque pour relancer le tourisme post-pandémie et attirer des investissements durables. Avec pour enjeu de booster la communication et la valorisation des actions dans les domaines de l'investissement, de l'éducation, des racines culturelles, des industries créatives et de l'innovation.

En tout état de cause, le gotha mondial est unanime à croire que le continent doit faire du tourisme culturel, une niche porteuse. Avec une utilisation judicieuse des outils numériques aux fins d'une valorisation et d'une promotion efficientes. D'autant plus que, selon les experts, plus de 40% des touristes internationaux sont en quête de culture et d'évasion authentiques. Le tourisme culturel pouvant être défini comme un type d'activité touristique dans lequel la motivation essentielle du visiteur est d'apprendre à connaître, de découvrir et de consommer les curiosités et produits culturels d'une destination et d'en faire une expérience unique. Au regard de cette analyse, on peut dire que la formalisation de la « Marque-Afrique » est bien une réalité avec laquelle les pays africains doivent compter.

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