Afrique Centrale: Où vont les pièces de monnaie pour les besoins quotidiens ?

Pièces de monnaie
2 Janvier 2025
analyse

Dans un contexte mondial de plus en plus globalisé, les échanges commerciaux entre l'Afrique et la Chine sont devenus un moteur essentiel de croissance pour de nombreux pays africains, dont ceux de la région centrale du continent.

Toutefois, un phénomène inquiétant semble se développer sous les radars des autorités : « un trafic organisé de monnaies locales vers la Chine pour aboutir à la transformation des bijoux en argent ». Ce phénomène est d’autant plus préoccupant qu’il remet en question la stabilité financière des pays de la zone et exacerbe les défis économiques qui touchent déjà ces Nations.

Le cœur du phénomène : une dynamique de circulation parallèle des devises

Les pays d’Afrique centrale, notamment le Cameroun, le Gabon, la République du Congo et la République centrafricaine, utilisent le Franc CFA. Ces monnaies, malgré une certaine stabilité en comparaison avec celles de certaines autres régions africaines, sont régulièrement victimes de dévaluation.

Les commerçants, les entreprises locales, mais aussi les acteurs du secteur informel, semblent avoir trouvé une voie parallèle pour contourner les régulations économiques, en transférant des sommes importantes de ces monnaies locales vers la Chine, un pays avec lequel les relations économiques se sont intensifiées ces dernières années. Ce phénomène n'est pas seulement une question de transactions financières, mais aussi un moteur pour l'écoulement de biens manufacturés chinois dans la région.

Les moteurs de ce trafic financier : la Chine, un acteur central

Depuis plusieurs décennies, la Chine a consolidé sa position en tant que principal partenaire commercial de l’Afrique. Les pays d’Afrique centrale ne font pas exception. Les investissements chinois dans des secteurs clés comme les infrastructures, l’exploitation minière et la construction sont considérables. De nombreux contrats, souvent financés par des prêts chinois ou des investissements directs, sont réglés en devises locales.

L’impact sur les économies locales et régionales

Les conséquences de ce trafic sont multiples et particulièrement néfastes pour les économies des pays d’Afrique centrale. Tout d’abord, il entraîne un manque accru de pièces de monnaie dans le secteur bancaire, un lieu d’approvisionnement pour les commerces et les ménages. Dans le cas du Gabon comme au Cameroun, on constate cette faille dans les transports en commun où les chauffeurs peinent à rembourser à leur clientèle leur reliquat après le trajet.

Nonobstant cela, il fragilise les efforts de développement des pays concernés. En raison de la fuite des capitaux, il devient plus difficile pour les gouvernements de financer des projets publics ou d'assurer une croissance stable et durable. L’inflation devient plus difficile à maîtriser, et les conditions de vie des citoyens s’en trouvent directement impactées, aggravant ainsi les tensions sociales.

Les causes profondes : une gouvernance fragile et des réseaux parallèles

Ce phénomène de trafic organisé ne serait pas possible sans la faiblesse des institutions et des régulations économiques. L'Afrique centrale souffre d'une gouvernance fragile et d'un manque de transparence dans les secteurs financiers. Le secteur bancaire, souvent archaïque et mal régulé, est incapable de gérer ou de tracer efficacement ces flux monétaires.

Les institutions régionales comme la Cemac (Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale) ont du mal à imposer des règles strictes pour réguler ce déficit. Les différents gouvernements de la région, souvent plus préoccupés par les questions politiques internes que par la gestion économique à long terme, mettent de côté les moyens ou la volonté de lutter contre ce trafic de manière cohérente.

Le trafic organisé des monnaies locales vers la Chine représente un cercle vicieux qui, si rien n'est fait pour le stopper, pourrait nuire durablement à la stabilité économique de l'Afrique centrale. En créant un vide économique, il précarise les populations et alimente des réseaux de corruption qui freinent le développement.

Le défi est donc de taille : il nécessite une coopération régionale renforcée, une gestion plus transparente des flux financiers et une volonté politique de combattre les réseaux informels qui prospèrent dans l’ombre de la mondialisation.

L'Afrique centrale se trouve à un carrefour stratégique. Pour rompre ce cycle, il est impératif de renforcer les mécanismes de régulation et de mettre en place une gouvernance économique solide. La route vers la stabilité passera nécessairement par une plus grande transparence et une meilleure gestion des ressources monétaires.

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