Pour ceux qui en doutaient encore, Mahamat Idriss Déby vient de prouver qu’il est résolument sur les traces de son père en parachevant un agenda dont certains soupçonnait le contenu sans trop y croire.
En effet, une fois élevé à la dignité de Maréchal, ce 09 Décembre 2024 à la faveur d’un vote écrasant du Conseil National de Transition par 160 voix pour 2 contre et 6 abstentions, Mahamat Idriss Déby, comme l’avait fait son père avant lui par un décret, signé de sa propre main, daté du 15 Juillet 2020, se donne les pleins pouvoirs sur l’armée. La dignité de maréchal n’est pas, il faut le dire un grade, mais plutôt une distinction, même si elle ne peut être conférée qu’à un officier général, qui a conduit victorieusement une guerre et bien sur Déby Fils en est un, là n’est pas la question, même si certains pensent qu’il n’a pas véritablement conduit une guerre.
L’organisation d’élection des députés, maires et représentants locaux les 28 et 29 Décembre 2024 en même temps sonne ici comme une volonté du président Mahamat Déby Itno de boucler son processus de prise en main véritable du pouvoir, d’aucuns diront de la transition, et peut être de s’émanciper de « l’establishment » qui avait entouré son père, en se dotant d’une légitimité démocratique jusqu’à la base, après son élection contestée à la présidence de la République d’avril 2024.
Le boycott de ces élections par l’opposition « significative », n’a fait que lui ouvrir un boulevard pour dérouler allégrement son projet sur la vie politique au Tchad, et réaffirmer avec plus d’emphase son ancrage souverainiste. Auréolé de tout cela, Mahamat Idriss Déby veut ainsi effacer l’image de « Déby Fils » qui lui colle la peau, au détriment de son image propre, quoique les similitudes pour ne pas dire les « pâles copies » du père sont nombreuses.
A preuve, sa décision prises contre toute attente, de mettre un terme à la présence française au Tchad, ressemble à tous points de vue à celle de son père qui à l’occasion de la célébration du 50ème anniversaire de l’indépendance du Tchad avait jeté un gros pavé dans la marre en déclarant que « la présence du dispositif « épervier » n’a rien à voir avec notre indépendance et notre souveraineté » et de poursuivre en disant que « Epervier n’est pas ici pour aider ou soutenir un régime ou un gouvernement ».
Plus de 10 ans après, Mahamat Idriss Déby vient d’acter ce qui semblait être évident pour le défunt maréchal et que le fils vient de réaliser ce 28 Novembre. L’acte final de la rupture des accords de coopération militaire entre le Tchad et la France, qui se solde par le départ des troupes basées sur son territoire, est ainsi posé.
Mahamat Idriss Déby qui désormais a la haute main sur l’armée comme chef de guerre, titulaire du bâton de Maréchal, va endosser la légitimité de la présidentielle et certainement, avec son parti, celle de la majorité du parlement et des exécutifs locaux pourra engager les réformes qu’il entend mener pour recouvrer la souveraineté du Tchad.
Ce revirement laisse planer beaucoup de questions, notamment sur la perspective sécuritaire au Sahel, avec la nouvelle configuration imposée par la création de l’AES avec des chefs d’état tous militaires, comprenant parfaitement le langage des armes.
Idriss Déby ITNO a été le porteur d’eau au Sahel avec une armée aguerrie aux combats du désert, sera –t-il la clé de la solution contre la poussée Djihadiste dans cette partie de l’Afrique ?
L’avenir des relations avec les pays de la bande sahélo saharienne nous édifiera certainement sur le futur rôle que le Tchad entend jouer, seul ou avec ses partenaires et voisins.