Madagascar: Conjoncture - Relation tendue entre l'État et l'Église

Les chefs religieux des confessions au sein du FFKM multiplient les critiques face à la situation socio-économique. Des tirs à boulets rouges en direction de l'État.

À couteaux tirés. Depuis mi-décembre, l'État se retrouve sous les feux croisés des chefs religieux des confessions au sein du Conseil oecuménique des Églises chrétiennes de Madagascar (FFKM). Ces derniers ont décoché des salves de critiques acerbes face à la conjoncture socio-économique.

La Conférence des évêques de Madagascar (CEM) est la première à avoir dégainé. Dans une déclaration publiée le 15 novembre, les prélats catholiques ont «réprimandé» l'État sur les problèmes d'eau et d'électricité, sur la hausse du coût de la vie, la paupérisation de la population, ou encore sur les problèmes de corruption. S'agissant de la pénurie d'eau, les évêques ont utilisé une expression forte en déclarant : «Il s'agit d'un homicide indirect puisque l'eau, c'est la vie.»

Dans son message de Noël, le cardinal Désiré Tsarahazana a également pointé du doigt l'enlisement de la situation nationale. Dimanche, à Farafangana, Monseigneur Fabien Raharilamboniaina, président de la CEM, est revenu à la charge. Déplorant l'ampleur des feux de forêt sur la route de Farafangana, il fait le lien avec «la pauvreté des habitants.»

Dans son discours avant la fin de la messe d'installation du nouvel évêque de Farafangana, le président de la CEM, s'adressant directement aux responsables étatiques et élus présents, exhorte les responsables à «trouver des solutions pour redresser la situation». Le 5 décembre, c'est le Conseil oecuménique des Églises chrétiennes de Madagascar (FFKM) qui, dans une déclaration également, a fustigé «l'appauvrissement de la population.»

Démenti

Dans son message de Noël, le pasteur Irako Ammi Andriamahazosoa, président de l'Église réformée FJKM, a fait une déclaration faisant référence aux exactions d'Hérode. Des mots entendus comme une prise de position politique contre le pouvoir et notamment contre le président de la République, de la part du chef religieux.

Les tenants du pouvoir et les leaders religieux de la FJKM sont déjà en froid depuis une déclaration faite par le vice-président de cette confession, au Coliseum, en 2023. Des mots déjà mal pris par certains hauts responsables étatiques. Le fait que le pasteur Andriamahazosoa ait été parmi les chefs de file du mouvement initié par Christine Razanamahasoa, ancienne présidente de l'Assemblée nationale, n'a pas arrangé les choses.

Quelques figures de l'Église luthérienne (FLM) faisaient aussi partie de cette initiative qui avait affirmé l'inopportunité de l'élection présidentielle en 2023. Bien qu'il n'y ait aucune réaction au sommet de l'État, les réactions passionnées des partisans du pouvoir sur les réseaux sociaux laissent entrevoir que les remontrances des responsables religieux au sein du FFKM ne ravissent pas les décideurs étatiques. Ces derniers commencent, par ailleurs, à se rapprocher des nouvelles confessions chrétiennes, dont certaines rassemblent un nombre croissant de fidèles.

Dans un entretien téléphonique accordé au journal Ao Raha, le révérend Vonjisoa Tahiana Ranaivoarivelo, secrétaire général du FFKM, affirme «qu'il n'y a aucun différend entre le FFKM et l'État». Il dément également les bruits qui parlent «d'une guerre froide» entre les responsables religieux et les dirigeants étatiques, dénonçant une politisation des déclarations de l'Église.

Dimanche, à Farafangana, Benjamin Alexis Rakotomandimby, ministre de la Justice, parlant au nom de l'Exécutif, a plaidé pour «la complémentarité entre le rôle de l'État et de l'Église dans la quête du développement de Madagascar». Dans un entretien avec la presse, en marge d'une présentation des voeux au sein de son département, hier, à Faravohitra, le garde des sceaux a indiqué que «le président de la République est à l'écoute de l'Église et est toujours prêt à ouvrir ses portes à ceux qui ont des idées pour développer le pays».

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