Ile Maurice: «Le secteur de la pêche mérite une véritable attention»

interview

Comment évaluez-vous l'année écoulée pour les pêcheurs à Maurice ?

Tous les gouvernements précédents ont mis l'accent sur le développement de l'économie bleue et sur la nécessité de développer le secteur de la pêche. Cependant, le secteur est resté stagnant. Sous le dernier gouvernement, nous avons rencontré de nombreuses difficultés. Ils n'ont pas été à l'écoute de la communauté des pêcheurs pour savoir comment développer ce secteur. Le système reste encore archaïque et nous n'avons pas vraiment avancé. C'est décevant.

Quelles sont vos attentes par rapport au nouveau gouvernement ?

Nous félicitons le nouveau gouvernement pour sa victoire et espérons que le nouveau ministre et le junior minister travailleront efficacement. Nous parlons d'autosuffisance alimentaire, mais les pêcheurs, les éleveurs et les planteurs se trouvent dans une situation précaire et se sentent délaissés. L'autosuffisance alimentaire inclut des sujets comme la réduction des importations. Dans le passé, nous avons vainement exprimé nos préoccupations concernant l'importation de poissons.

Recevoir des miettes à travers les allocations n'est pas notre objectif principal. Nous prônons le développement de l'économie bleue, un développement qui permettra aux gens, notamment les jeunes, de trouver du travail et de professionnaliser un secteur à fort potentiel. Actuellement, il n'y a pas de relève dans le secteur. On délivre beaucoup de cartes de pêche, mais nous manquons toujours de pêcheurs pour exploiter notre zone économique exclusive. Notre objectif est plus large, englobant le secteur de la pêche, des coopératives et de l'environnement. Nous avons envoyé des lettres aux ministères concernés pour demander une rencontre. Nous espérons que la situation du secteur sera enfin prise au sérieux et qu'il y aura un vrai dialogue pour le relancer.

Quid de l'impact climatique ?

Nous sommes avant tout des gens de la mer et, chaque jour, nous nous y rendons pour subvenir aux besoins de nos familles et des consommateurs. Cependant, nous faisons face à un véritable défi : le réchauffement climatique, un phénomène mondial qui cause des dommages considérables à notre environnement marin, tels que la température des océans qui perturbe les habitats marins, obligeant certaines espèces à migrer vers des eaux plus froides. Bien qu'il soit indéniable que le changement climatique affecte nos mers, nous ne pouvons pas tout lui attribuer. Depuis les années 1980, la pêche dans le lagon fait partie de notre quotidien, mais au fil des années, les activités humaines ont modifié cet écosystème fragile. Aujourd'hui, les pêcheurs ne peuvent plus exercer dans le lagon.

N'oublions pas les déversements d'hydrocarbures qui polluent nos eaux et nuisent à la biodiversité marine. Il est impératif de rendre publics, chaque année, les changements observés dans les différents secteurs, y compris celui de la pêche, afin de prendre conscience de l'ampleur de la dégradation. La diminution progressive des stocks de poissons et la disparition de certaines espèces sont des signaux inquiétants qui témoignent de la détérioration de nos ressources marines. Par ailleurs, l'expansion de l'aquaculture représente également un défi pour la durabilité de nos pratiques de pêche traditionnelles.

Quelles ont été les principales difficultés auxquelles les pêcheurs ont dû faire face ?

Les difficultés sont multiples. Nous avons dû lutter contre le précédent gouvernement pendant dix ans et nos dossiers sont restés sans réponse. La situation s'est aggravée et la communauté des pêcheurs a été négligée. Nous n'avons pas obtenu de satisfaction concernant la dégradation de l'environnement, la pollution et les barrières récifales endommagées. De plus, les pêcheurs ne disposent pas de moyens suffisants pour répondre à la demande. Il n'y a qu'une poignée de coopératives avec des bateaux semi-industriels mis en place pour aller pêcher en haute mer. La majorité des coopératives sont inactives. Cela reste un défi majeur.

Comment les pêcheurs gèrent-ils la demande de poisson durant la période de fin d'année ?

Durant la période de fin d'année, la demande de poisson augmente considérablement, ce qui rend la situation particulière. Nous faisons de notre mieux pour y répondre, mais nous rencontrons des difficultés en raison du manque de soutien, à l'instar des infrastructures pour vendre nos poissons à des prix abordables.

Quelles sont les solutions phares selon vous ?

La mesure phare consiste à remettre en place le Fishermen Investment Trust, qui serait l'institution clé du secteur. Il s'agirait, entre autres, de délivrer la carte de pêcheur aux personnes authentiques, de dispenser des formations, de gérer les bateaux pour créer des emplois, de mettre en place des dispositifs de concentration de poissons et de gérer le marketing des poissonneries dans divers endroits, en particulier avec la contribution des pêcheurs. Des bateaux pourraient ainsi partir en haute mer avec des pêcheurs, leur permettant d'obtenir des bonus de fin d'année et d'autres bénéfices en cas de décès ou d'autres événements. Il serait également important de collecter des données essentielles pour le secteur, en particulier sur la surpêche, afin de protéger notre environnement marin et garantir une gestion durable de la vente de poisson.

En ce début d'année, quel message souhaitez-vous adresser ?

Je souhaite à tous une Bonne année. Nous espérons qu'en 2025, un véritable dialogue va s'instaurer pour amener le secteur de la pêche à un niveau plus sérieux. Ce secteur mérite une véritable attention pour qu'il puisse contribuer de manière durable à l'économie du pays et à la sécurité alimentaire.

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