La justice française a désigné, ce jeudi 9 janvier, un magistrat du pôle crimes contre l'humanité pour enquêter sur les actes de torture qu'auraient subis Sylvia et Noureddin Bongo lors de leur détention.
Leurs avocats avaient déposé plainte en France, dénonçant des « traitements dégradants » et qualifiant de « mensongères » les déclarations du procureur de la République gabonais, qui avait nié ces faits. Lors d'une conférence de presse ce jour, la défense a dévoilé les détails de cette procédure engagée en France et a dénoncé les conditions de détention jugées inhumaines de leurs clients.
Les avocats de Sylvia et Noureddin Bongo, incarcérés au Gabon depuis le coup d'État d'août 2023, ont affirmé jeudi avoir « reconnu » des marques de torture sur le corps du fils de l'ex-président Ali Bongo, dont l'épouse a selon eux subi des « tortures psychologiques ». « J'étais ancien ambassadeur (français) pour les droits de l'Homme et j'ai parfois dans ma vie vu des torturés et j'ai reconnu les marques de chocs électriques sur son torse, dans son dos », a déclaré Maître François Zimeray.
Sylvia Bongo a de son côté décrit à ses avocats des « traitements dégradants comme par exemple des jets d'eau froide et surtout la torture psychologique que constitue le fait de voir son propre fils torturé sous ses yeux », selon Me Zimeray. Des propos corroborés par sa consoeur Maître Catalina de la Sota.
Près d'un an et demi après l'incarcération de leurs clients, les deux avocats français ont pu fin décembre leur rendre visite en prison, où « leurs conditions (de détention, NDLR) sont en elles-mêmes constitutives de torture », ont-ils affirmé jeudi. Peu après cette visite, le procureur de la République Bruno Obiang Mve avait déclaré que les avocats des Bongo avaient pu constater « que leurs clients n'ont jamais été torturés au sein de la prison de Libreville », ce que les deux avocats Me Catalina de Sota et Me François Zimeray avaient déjà qualifié d'« allégations mensongères ».
Ce que nous avons vu nous a soulevé le coeur. Nous avons vu des gens profondément traumatisés par le désespoir. Quant à Noureddin Bongo, j'ai pu voir sur ton torse les marques des chocs électriques que j'avais vues en d'autres temps et en d'autres lieux. Nous connaissons les noms des tortionnaires et maintenant qu'un magistrat instructeur a été désigné du pôle crimes contre l'humanité, nous allons lui demander des investigations et d'entendre un certain nombre de personnes que nous soupçonnons d'avoir commis ou commandité ces tortures. C'est une avancée procédurale majeure qui va conduire à des convocations, éventuellement des mandats d'arrêt. C'est le sens de la plainte que nous avons déposée à Paris et que nous entendons poursuivre jusqu'à son terme. C'est-à-dire la condamnation, l'arrestation et là condamnation des responsables.
Les avocats de Sylvia et Noureddin Bongo appellent la France et la communauté internationale à adopter une position plus ferme sur leur cas. L'ancienne Première dame, 61 ans, et son fils de 32 ans sont détenus à la prison centrale de Libreville.