Ile Maurice: La grande rentrée dans le consensus

La semaine précédant la rentrée des écoliers et collégiens à Maurice n'a pas été de tout repos tant pour le nouveau ministre de l'Éducation que pour les professionnels du milieu, mais aussi pour les parents. Nous passons en revue cette semaine intense, mais consensuelle avec quelques commentaires d'observateurs sur cette rentrée «new-look».

Aujourd'hui, c'est le jour J pour plus de 200 000 jeunes mauriciens qui reprennent le chemin de l'école après deux mois et demi de vacances. Beaucoup attendent de cette reprise qu'elle soit celle du renouveau et de l'espoir pour notre système éducatif, car elle se fait sous le signe du changement promis par le nouveau gouvernement après la pagaille laissée dans ce secteur par la ministre sortante.

Vendredi, la petite rentrée s'est faite pour les nouveaux du pré-primaire, du primaire (Grade 1) et du secondaire (Grades 7 et 9). Le ministre de l'Éducation, Mahend Gungapersad, était le matin dans une école de sa circonscription à Goodlands pour accueillir les tout-petits. Il a exprimé son intention de visiter d'autres écoles - «pas par surprise, mais de manière cordiale pour ne pas perturber la bonne marche des établissements». Il avait rencontré la veille une centaine de responsables de collèges privés pour discuter des mesures mises en place pour la rentrée. Il a aussi révélé qu'une somme de Rs 150 millions, qui leur était due, a été déboursée en décembre pour leur permettre de préparer la rentrée en toute sérénité.

Par ailleurs, dans une lettre aux enseignants, le ministre, lui-même un pédagogue de carrière, les encourage à relever les défis de cette nouvelle année, en leur rappelant leur responsabilité de façonner l'avenir des jeunes générations. Il les invite ainsi à poursuivre avec passion et détermination leur rôle essentiel dans la société. En effet depuis sa prise de fonctions, il aura été au four et au moulin pour écouter tous les partenaires de l'éducation et susciter leur collaboration afin que cette rentrée 2025 soit plus apaisée que les précédentes.

Les parents se sont rués pour leur part dans les magasins et librairies pour compléter les derniers achats de la rentrée. Malgré le 14e mois, la note est restée salée pour ceux qui ont dû acheter manuels, sacs, uniformes et chaussures, entre autres. Par ailleurs, le gouvernement a augmenté l'aide financière à environ 13 000 enfants inscrits sur le Social Register of Mauritius pour soutenir leur éducation.

Deux changements drastiques

Le premier changement se situe au niveau du PSAC. L'Extended Program, tant décrié pour le taux d'échecs élevé est remplacé par le Foundation Programme in Literacy, Numeracy and Skills, conçu et avalisé avec le concours des partenaires de l'éducation et accompagné d'une formation de trois ans aux enseignants concernés.

Ce programme, destiné aux élèves recalés du PSAC - ils sont environ 3 000 - et en lien avec le milieu du travail, ne sera sanctionné par aucun examen formel, mais par un certificat démontrant les compétences acquises. À partir d'aujourd'hui, une délégation du ministère se rend à Rodrigues pour rencontrer les enseignants et les informer du nouveau programme et leur fournir une formation.

Autre élément important, tout élève de Grade 6, ayant échoué, pourra redoubler cette classe alors que cela n'était pas possible auparavant et qu'il était automatiquement promu en Grade 7 Extended. Entretemps, les enseignants du primaire ont participé à une journée préparatoire, qui est aussi une nouveauté.

Par ailleurs, avec les dégâts causés par le passage du cyclone Chido à Agaléga, les classes au primaire reprennent demain alors que ceux du secondaire ne reprendront que la semaine prochaine.

Dans un autre ordre d'idées, les élèves ayant réussi au School Certificate (Grade 11) - les résultats sont attendus jeudi - et qui ont obtenu au moins trois crédits pourront désormais être admis en Grade 12 pour préparer le Higher School Certificate, alors qu'on leur exigeait d'avoir cinq crédits jusqu'à présent. Les critères ont déjà été élaborés et devraient être communiqués incessamment.

Le ministre souligne, pour ceux qui aurait des réserves sur cette décision, que cela ne veut pas dire que le niveau baissera, mais il veut offrir une seconde chance aux jeunes en difficulté scolaire tout en maintenant les exigences académiques pour les élèves plus performants. Cela s'inscrit dans sa vision globale, qui vise à renforcer l'inclusivité du système éducatif et à assurer que chaque enfant mauricien ait toutes les chances de réussir sa vie.

Manuels scolaires : pas de gros chamboulement !

L'apprentissage dans les écoles secondaires a été grandement perturbé l'année dernière par le gros retard noté dans la distribution des manuels scolaires aux élèves. Certains au deuxième trimestre n'avaient toujours pas de manuels et la ministre sortante n'avait donné aucune raison pour ce retard accumulé. Il semble que ce ne sera pas le cas cette année. Selon le président de l'United Deputy Rectors and Rectors Union, Harrish Reedoy (photo), la situation se dessine beaucoup mieux à ce sujet. «Pour les élèves de Grade 7, la plupart des manuels scolaires ont déjà été distribués, le jour de l'admission. Il y a eu un retard pour les manuels de sciences mais il semblerait que ceux-ci seront disponibles d'ici la première semaine de la rentrée.»

∎ Harrish Reedoy

Pour les Grades 8 et 9, indique Harrish Reedoy, la grande majorité des manuels scolaires est déjà prête et sera distribuée aux élèves concernés. De son côté, le ministre de l'Education déclare qu'il y aura probablement une pénurie de manuels dans certaines matières, mais que ce ne sera plus comme c'était le cas les années précédentes. «Je ne comprends pas la raison de cette pénurie mais je vais aussi rencontrer dans quelque temps tous ceux qui m'ont sollicité, tel que l'association des librairies...»

Faciliter le recrutement d'éducateurs qualifiés...

Outre les manuels scolaires, l'année dernière avait été marquée par un manque criant d'enseignants dans plusieurs établissements et cela, même au troisième trimestre. Ainsi, vendredi, le conseil des ministres a promulgué les Education (Amendment) Regulations 2025 pour revoir les exigences en matière de qualifications pour faciliter le recrutement d'éducateurs qualifiés, notamment dans le privé. Selon Harrish Reedoy, il ne devrait pas y avoir de gros souci cette année, car l'année dernière, 569 enseignants ont été recrutés. «Le problème devrait être réglé à ce jour. S'il y a un manque d'enseignants, l'on peut aussi avoir recours à des supply teachers en attendant de poursuivre les recrutements...»

Points de vue

Affirmative Action à cœur ouvert

Affirmative Action se réjouit des décisions du ministre Mahend Gungapersad sur divers aspects de l'éducation. Nous saluons la convocation des assises de l'éducation pour avril afin d'entendre les divers partenaires de l'éducation. Les orientations ne seront donc pas prises par deux ou trois conseillers du ministère, mais par des enseignants, des recteurs, des ONG ainsi que par le public et le privé, en espérant qu'on n'accouchera pas d'une souris, mais d'une réforme réelle souhaitée depuis des années.

Déjà se défaire de l'Extended Programme pour un lieu d'apprentissage basé sur la literacy et la numeracy ainsi que des life and vocational skills est une avancée astronomique pour les élèves n'ayant pas réussi l'examen du cycle primaire. C'est un fait que l'inégalité des chances est visible dès le plus jeune âge avec l'entrée à l'école maternelle et le primaire. Ce serait une avancée que l'enfant dès la maternelle soit préparé pour entrer dans l'univers du literacy et du numeracy, soutenu par une visite systématique des parents. Des expériences ont été tentées et portent beaucoup de fruit. Il en est de même au primaire où un accompagnement de l'enfant, dès les premières années, pendant les heures de classe par des adultes compétentes, qui n'ont pas forcément la Form V, ont fait grimper le pourcentage de réussite de 35 % à 72 % dans une école étiquetée ZEP sur la paroisse de St-Patrick. De ce fait, les classes d'Extended disparaîtront graduellement.

∎ Père Patrick Fabien

Autre point à souligner, l'entrée du KM en grade 12. Affirmative Action s'est engagée en 2021 pour que le KM soit introduit en Grade 10 alors que toutes les instances concernées, qui jouaient aux abonnés absents, se sont brusquement réveillées quand la ministre en a donné l'aval. Aujourd'hui, rien n'empêche que le passage en grade 12 se fasse. Il suffit d'interroger les autorités compétentes - MIE, UOM et Kreol Academy. Pourquoi cette réticence ? Par ailleurs, l'introduction du KM comme médium d'enseignement dans des milieux défavorisés est une des clés de la réussite. L'expérience menée par Dev Virahsawmy en lien avec le SeDEC l'a amplement démontré.

Beaucoup d'autres points nous tiennent à coeur. Il est choquant comment des diplômes reçus dans des universités privées à Maurice ne soient pas reconnus par la PSEA pour l'enseignement au secondaire. Comment l'ingénieur formé toujours dans une université privée à Maurice ne reçoive pas la reconnaissance de l'État. Deux poids, deux mesures pour un diplôme équivalent. Une éducation pour tous sans discrimination doit être à la base de la réforme de l'éducation.

La question du portable à l'école

Le secteur éducatif a constamment besoin de réforme dans un monde en perpétuel changement. Ce secteur doit répondre aux changements agressifs du monde du travail et de l'emploi. Je trouve personnellement qu'interdire l'usage du portable pendant les heures de classes est une décision courageuse. Certes, ce changement va susciter son lot de résistance, mais gouverner, c'est aussi savoir prendre des décisions courageuses et aller à contre-courant quand il le faut. La plus grande source de distraction pour tout étudiant, ce sont les sollicitations permanentes de son portable. Le portable est un dissipateur de concentration. Chaque minute passer sur son portable équivaut à environ cinq minutes de perdues quand on étudie. Cependant, il faut bien expliquer les vraies raisons aux étudiants, aux parents et même aux profs pour qu'il y ait une bonne gestion de ce changement. Il faut cependant mesurer l'impact de ce changement et voir dans quelle mesure l'étudiant améliore ses performances scolaires.

Une maman concernée

Je trouve l'approche du nouveau ministre beaucoup plus inclusive. Mon fils attend ses résultats du School Certificate et le retour aux trois crédits offrira, selon moi, à plus d'enfants la chance de faire des études tertiaires, par exemple. Toutefois, il faudrait veiller à la qualité des cours dispensés dans les établissements scolaires du pays. J'espère aussi que les enseignants ont pris connaissance de la lettre qui leur a été adressée par le ministre de l'Éducation car nous, parents, avons de plus en plus, l'impression que certains font ce métier par obligation. Ayant, cette année, une fille qui prendra part aux examens du National Certificate of Education, je souhaiterai que les autorités songent à bannir cet examen, car il représente un stress inutile pour les élèves.

Calendrier scolaire 2025

Primaire

· Premier trimestre : 13 janvier au 11 avril

· Deuxième trimestre : 28 avril au 18 juillet

· Troisième trimestre : 18 août au 7 novembre

Secondaire

· Premier trimestre 13 janvier au 11 avril

· Deuxième trimestre : 28 avril au 18 juillet

· Troisième trimestre : 11 août au 31 octobre

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