Guinée: Une transition piégée ?

13 Janvier 2025
analyse

L’horizon de la fin de la transition en Guinée, initialement fixé par le Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD) s’assombrit pour les acteurs politiques. Tel est le constat fait par tous les observateurs y compris la CEDEAO, devant laquelle le régime du Général Mamady Doumbia s’était engagé pour la fin décembre 2024.

L’opposition Guinéenne s’impatiente, manifeste, et la société civile se demande encore ce que valent bien les engagements du régime en place, qui naguère avait engagé le processus d’élaboration de la nouvelle constitution, avec l’appui de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) pour aller vers des élections libres à la date échue.

Pourtant des gages avaient été donnés, et d’ailleurs c’est l’une des raisons de la levée par l’OIF de la suspension infligée à la Guinée le 24 Septembre 2024, mais également celle des sanctions imposées par la CEDEAO un peu avant.

D’ailleurs, lors de son allocution de fin d’année le 31 Décembre 2024, le Président de la République et Président du CNRD de Guinée avait sans équivoque reconnu qu’il était hors délai.

C’est pourquoi, il a réitéré sa volonté d’aller vers une réouverture du champ politique dans le courant de 2025, période initialement prévue pour la fin de la transition avec l’organisation des élections et un retour à un régime civil.

« Après une période d’observation et après concertation de nos concitoyens, la reprise totale des activités politiques sera effective dès l’année 2025 » avait-il dit, non sans un bémol qu’il fit bien de préciser en ces termes : « Cette reprise devra se faire désormais dans le respect de l’État, des pouvoirs publics, des dispositions sécuritaires et de l’ordre public et suivant les règles qui régissent l’exercice des activités politiques. »

Le champ de cette ouverture est à n’en pas douter une sorte « d’attrape tout », dès lors qu’il n’est nullement question des libertés politiques fondamentales, dont l’exercice est prévu par la Constitution, notamment la liberté de manifester et la liberté d’expression.

Mamadi Doumbia, ne dit rien des cinquante-trois (53) partis qui ont été dissous, les 54 autres suspendus, et les 67 mis sous observation comprenant les principaux partis politiques, dont celui de Cellou Dalein Diallo, d’Alpha Condé… En revanche il a décidé de lever la mesure prise le 02 Septembre 2024, de suspendre la délivrance des agréments aux ONG soupçonnées de menée subversives sur le terrain, avec effet immédiat.

Au demeurant, il laisse planer le doute encore sur son engagement à ne pas faire partie de l’équipe post transition, qui va diriger la Guinée et donc à ne pas être candidat, comme le stipule d’ailleurs la charte de la transition pour toutes l’équipe de la transition.

Là où beaucoup d’observateurs demeurent sceptiques sur les réelles intentions du régime de Conakry d’aller vers un Référendum « probablement » en mai, lequel devant ouvrir la voie aux élections, c’est lorsqu’après avoir suspendus des partis, le pouvoir guinéen exige d’eux des autorisations avant toute reprise d’activité. A y regarder de plus près, cela remet en cause le discours de fin d’année du chef de l’état guinéen dans lequel il proclamait la reprise totale des activités des partis.

En décidant qu’il y avait un trop plein de partis politiques en Guinée, et qu’il fallait en évaluer la qualité de certains, pour les déclarer aptes, le gouvernement de Doumbia outrepasse manifestement ses prérogatives qui sont du domaine de la loi. En décidant en amont de cette mesure restrictive Doumbia tendait un piège aux partis d’opposition, qui acceptaient ainsi de se soumettre à une loi d’exception, qui contredisait les règles qui avaient prévalu au moment de leur reconnaissance en tant que parti, pour restreindre le champ et les acteurs de la prochaine présidentielle.

Le référendum pour l’adoption de la nouvelle Constitution risque de réserver des surprises, en ce sens que pour les partisans du Général Doumbia, il est hors de question qu’il ne soit pas candidat, comme c’est dans l’air du temps dans la sous-région. Les prochaines semaines vont nous édifier.

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