Ile Maurice: Le non-respect des lois existantes pointées du doigt

Le domaine du bien-être animal est en pleine ébullition en attendant la nomination du nouveau board de la Mauritius Society for Animal Welfare (MSAW). Alors que le ministère de l'Agro-industrie est en présence d'un rapport recommandant les grandes lignes d'un plan d'action pour gérer la population des chiens errants, les organisations non gouvernementales (ONG) et les volontaires sur le terrain montent au créneau pour dénoncer le non-respect des lois existantes et les changements urgents à apporter.

Mansa Daby, de la plateforme Monkey Massacre, avance d'emblée que le rapport ne contient rien de nouveau. «Sauf peut-être l'utilisation de fléchettes anesthésiantes qui, une fois popularisée, sera très utile dans la capture des singes», fustige-t-elle. Elle rappelle qu'il y a plus d'une dizaine d'années, alors que le Parti travailliste était au pouvoir, elle avait rédigé un rapport en collaboration avec d'autres activistes, dont Wayne Gurunaden, et l'avait soumis au ministère de l'Agro-industrie. Ce rapport préconisait déjà le Catch-Neuter-Release pour remplacer le Catch and Kill, qui était pratiqué depuis la création de la Mauritius Society for the Prevention of Cruelty to Animals en 1952. Ce rapport, rappelle l'activiste de la cause animale, avait abouti à l'arrêt du Catch and Kill sur les plages, suite aux négociations avec le Beach Authority et l'installation des feeding stations par certains hôtels.

De son côté, Linley Mootien, de l'ONG 4 Tilapat, voit le rapport sous un autre angle. «Le point positif est qu'il y a déjà un rapport. Sa deza enn sanzman. Il y a finalement un débat sur la question. Durant les dix dernières années, nous avons envoyé plusieurs rapports qui n'ont jamais été pris en considération par les autorités», dit-il. Selon lui, le rapport comporte quelques points positifs, comme la création de centres d'accueil pour les animaux errants à travers l'île. «L'idée d'un sanctuaire est mentionné furtivement, alors que c'est la base même pour régler le problème de chiens errants», dit-il, car relâcher les chiens dans la nature après la stérilisation n'est pas une solution.

«Sime pa lakaz lisien sa. Il faut un lieu pour les recueillir.» Linley Mootien rappelle qu'il avait déjà formulé la demande pour obtenir 60 arpents de terre sous le précédent gouvernement, pour la création d'un tel sanctuaire, mais cela n'avait pas abouti. «Si Franklin avait eu 400 arpents, nous aurions pu en avoir 60 pour ce projet», allègue-t-il, dépité. Linley Mootien a déjà la structure du projet en tête. Pour lui, il faut un lieu qui accueille non seulement les chiens, mais tous les animaux errants et maltraités. Des volontaires, qui possèdent les connaissances requises, feront tourner le lieu. «Le rapport parle de tourisme. Là, on parle d'un lieu que les touristes pourront visiter. Ils n'iront pas voir les chiens errants dans les rues.»

Un autre point soulevé par Mansa Daby est l'élevage des chiens de race. «Avec 300 000 chiens errants dans nos rues, l'élevage et l'exportation de chiens de race n'ont pas besoin d'être réglementés mais d'être tout simplement interdits», affirme-t-elle. L'identification, poursuit-elle, doit aussi être centrale. «Si nous voulons vraiment faire de la MSAW une organisation structurée à l'internationale, tous les chiens et chats sans maître devraient être répertoriés dans une base de données en ligne afin de leur donner la chance d'être adoptés, comme c'est le cas en Angleterre, par exemple.»

Quant à la structure même de l'organisme, elle avance qu'avoir des éleveurs de chiens de race et des représentants des fermes de singes sur le board n'a pas de sens, surtout que ce sont les volontaires, activistes et membres des ONG de la cause animale qui sont sur le terrain. Elle rappelle que la MSAW bénéficie d'un budget annuel de Rs 30 millions, mais que chaque année, le rapport de l'audit rappelle que les comptes ne sont pas soumis.

«La stérilisation en masse n'est nullement entravée par un manque de fonds mais de volonté. Rappelons que la MSAW a refusé l'aide internationale pour la stérilisation en masse de chiens errants et ne propose que des campagnes de stérilisation régionales des animaux appartenant aux individus», dit-elle. Un vrai changement, avance l'activiste, serait d'introduire les droits du citoyen animal dans la Constitution, incluant la faune sauvage, endémique ou pas, ce qui protégerait aussi les singes.

Lois bafouées

Les deux activistes se rejoignent sur un point. Il faut que les lois existantes soient appliquées. «La MSAW est déjà mandatée par la loi pour intervenir dans des cas de maltraitance et d'élevage illégal, mais il y a un énorme écart entre les lois existantes et leur application. La solution serait de créer une unité de police nationale pour les animaux, similaire à l'unité de la police de l'environnement», dit Mansa Daby. Linley Mootien explique que l'Animal Welfare Act est claire. «Il est interdit de causer suffering, distress and pain aux animaux selon la loi. C'est mentionné à plusieurs reprises. Concernant les animaux en cage, encore une fois, tout est clair. Il faut que la cage soit grande et laisse de la place pour que l'animal bouge.»

Sauf que dans le cas de l'exportation des singes, tous ces articles de la loi sont bafoués et ce, depuis des décennies. Raison pour laquelle Linley Mootien estime que le rapport soumis au ministère relève de l'utopie car, selon lui, ce commerce est géré par les conglomérats et les politiciens seraient réticents à y mettre de l'ordre. «Personne ne parle des singes, mais à Petit-Gamin, les choses ont bougé très vite. N'oublions pas qu'il y a eu aussi l'empoisonnement de 60 chiens à Moka et rien n'a été fait», rappelle-t-il. Comme Mansa Daby, il estime qu'il faut une vraie unité régulatrice pour appliquer la loi.

Sur ce sujet, Linley Mootien déplore que le rapport soit très succinct. «Le peuple a voté massivement pour le changement, pour avoir de la transparence et de la justice en retour. Il est grand temps de mettre les promesses en oeuvre», dit il. Il rajoute qu'il a des preuves concernant les conditions dans lesquelles les singes sont transportés depuis Maurice et que rien dans la loi existante n'est respecté. Raison pour laquelle il a prévu de porter l'affaire à l'international lors du Salon du tourisme en mars en France. Il parle aussi d'une marche de sensibilisation pour dénoncer les conditions de transport des singes.

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