Des préposés de la Customs Anti-Narcotics Section de la Mauritius Revenue Authority et de l'Anti-Drug and Smuggling Unit ont ouvert, jeudi dernier, un colis postal arrivé à Maurice par un vol d'Air France le 18 juin dernier. Ce paquet, en provenance des Pays Bas, était destiné à un résident de Flic-en-Flac mais sous un nom et une adresse fictifs. Ils ont attendu qu'un éventuel destinataire au nom fictif de J. B. Mootoo se présente pour le récupérer mais, à ce jour, personne n'est venu réclamer le colis postal pesant 0,08 kg et refermant trois sachets de nitazène d'une valeur estimée de Rs 500 000. Comme ce stupéfiant est peu connu des Mauriciens, nous avons demandé au psychologue et addictologue, Kunal Naik, de nous éclairer sur cette drogue dangereuse.
Qu'est-ce que le nitazène et comment agit-il sur le système nerveux ?
Le nitazène est un opioïde de synthèse très puissant, développé dans les années 50 pour des recherches médicales et qui n'a jamais reçu de validation. Il agit principalement sur les récepteurs opioïdes dans le cerveau, provoquant des effets analgésiques (soulagement de la douleur) et euphoriques, mais aussi des effets respiratoires dépressifs.
Pouvez-vous expliquer ses mécanismes d'action et en quoi il diffère des autres opioïdes comme l'héroïne ou le fentanyl ?
Le nitazène est beaucoup plus puissant que l'héroïne et même que le fentanyl. Cette puissance accrue peut rendre les overdoses plus fréquentes et plus graves. Il est aussi plus difficile à détecter dans certains tests de dépistage comparé à d'autres opioïdes classiques.
Quels sont les risques spécifiques associés à la consommation de Nitazène ?
Le principal risque du nitazène est qu'il peut entraîner des problèmes respiratoires graves, une dépression du système nerveux central et des troubles cardiaques. Sa puissance fait que les personnes peuvent développer une dépendance très rapidement.
En termes de dépendance, de surdose et d'effets secondaires à long terme, comment se positionne le nitazène ?
En raison de sa puissance, le nitazène peut provoquer une dépendance rapide. Les overdoses sont particulièrement fréquentes, même à des doses relativement faibles. À long terme, il peut entraîner des troubles respiratoires chroniques, des problèmes de battements irréguliers cardiaques et des sédations extrêmes.
Quelles sont les méthodes d'évaluation les plus courantes pour diagnostiquer une dépendance à ce produit spécifique ?
Les méthodes incluent des entretiens cliniques, la vérification des antécédents et l'évaluation du comportement lié à la consommation. L'évaluation des symptômes de sevrage est cruciale, en utilisant des échelles pour comparer les symptômes. Il est aussi important d'examiner l'impact de la dépendance sur le fonctionnement émotionnel, social et professionnel de la personne.
Quels sont les signes physiques et comportementaux d'une overdose à cette substance ?
Les signes incluent une respiration ralentie ou difficile, des pupilles extrêmement contractées, des lèvres et des doigts qui prennent une couleur bleuâtre (cyanose). Il peut y avoir perte de conscience et la personne peut sombrer dans un état comateux ou une somnolence extrême, le rendant incapable de rester éveillé.
Est-il facilement détectable dans des tests de dépistage de drogues ?
Non, le nitazène n'est pas facilement détectable dans les tests de dépistage standard (comme ceux utilisés pour l'héroïne ou le fentanyl), car il n'est pas couramment inclus dans les panels de test habituels. Des tests spécifiques sont nécessaires, comme la spectrométrie de masse ou la chromatographie.
Quelles sont les options de traitement disponibles pour les personnes dépendantes à ce stupéfiant ?
Les options de traitement incluent la désintoxication sous supervision médicale, le recours à des substituts d'opioïdes comme la méthadone ou la buprénorphine, ainsi que des thérapies comportementales (psychothérapie, thérapie cognitivo-comportementale) pour traiter les aspects psychologiques de la dépendance.
Existe-t-il des traitements efficaces pour les personnes dépendantes au nitazène ?
Oui, des traitements à l'overdose avec la Naloxone peuvent être efficaces pour réduire les symptômes. Parfois, plusieurs doses de Naloxone sont nécessaires pour inverser une overdose au nitazène. D'autres traitements comme la buprénorphine (Subutex) sont adaptés pour traiter la dépendance au nitazène, bien que ce médicament soit interdit à Maurice. La méthadone reste une des meilleures prises en charge pour les opioïdes et opiacés. Des thérapies comportementales et d'autres approches sont également utilisées.
Présente-t-il des dangers particuliers lorsqu'il est associé à d'autres substances ?
Oui, le nitazène présente des dangers accrus lorsqu'il est associé à des substances comme l'alcool, d'autres opioïdes ou des benzodiazépines, car cela peut augmenter le risque de dépression respiratoire, entraînant un manque d'oxygène dans le sang et pouvant mener au coma.
Quelle est la tendance actuelle concernant sa consommation ?
La consommation de nitazène semble augmenter à l'échelle internationale, bien qu'elle soit moins répandue que celle du fentanyl. Cette hausse est en partie due à la fabrication clandestine et au mélange du nitazène avec d'autres drogues.
Comment les proches peuvent-ils soutenir quelqu'un qui souffre de dépendance au nitazène ?
Les proches peuvent s'éduquer sur les signes de surdosage pour pouvoir intervenir en cas d'urgence. Ils doivent offrir un soutien émotionnel constant, encourager la personne sans jugement et faire preuve de patience et de compréhension. Il est essentiel de consulter un professionnel de santé et d'utiliser des ressources comme l'Organisation mondiale de la Santé et l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime. De plus, il est crucial que les proches aient accès à la Naloxone, un médicament non psychoactif qui inverse les effets d'une overdose. Des programmes d'accès à la Naloxone sont essentiels.