Sham Mathura, de BSP School of Accountancy and Management, a été arrêté hier par la Financial Crimes Commission (FCC) pour des accusations de blanchiment d'argent en vertu de l'article 3(1b) de la Financial Intelligence and AntiMoney Laundering Act. Cette arrestation fait suite à une enquête lancée par la FCC en 2017, ciblant des abus de fonds publics. Il est soupçonné d'avoir induit en erreur le Human Resources Development Council (HRDC) en réclamant des remboursements pour des formations fictives.
L'enquête a révélé que BSP School of Accountancy and Management aurait demandé un remboursement d'une somme totale de Rs 144 000, en invoquant des frais pour douzaine d'étudiants inscrits à des formations inexistantes. Ces faux frais ont été réclamés au HRDC, organisation chargée du financement de formations professionnelles.
Sham Mathura a été présenté devant le tribunal de Port-Louis sous une accusation de blanchiment d'argent, hier. La FCC n'a pas formulé d'opposition à sa remise en liberté et il a été libéré sous une caution de Rs 25 000 et une reconnaissance de dette de Rs 200 000. De plus, Sham Mathura a payé une somme additionnelle de Rs 20 000 pour pouvoir obtenir l'autorisation de voyager.
Cette arrestation intervient dans le cadre d'une enquête plus vaste menée par la FCC, qui examine des cas similaires d'abus de fonds publics dans le cadre du Youth Employment Programme (YEP) géré par le ministère du Travail. Sham Mathura, ancien campaign manager de l'Alliance Lepep dans la circonscription n°8 (Quartier-Militaire-Moka) est accusé d'avoir recruté des jeunes via ce programme avec la promesse de leur verser une allocation mensuelle de Rs 8 000. Ce qu'il n'a pas fait. Les enquêteurs ont révélé que la moitié de cette somme, soit Rs 4 000 par jeune, a été payée par le HRDC à l'établissement, mais n'a jamais été reversée aux étudiants. Ces jeunes-là ont porté plainte mais comme l'école proposait des formations tous les trois mois par batch de 12, les enquêteurs pensent que le montant de l'escroquerie pourrait augmenter.
Des éléments montrent que Sham Mathura aurait été impliqué dans cette affaire dans la gestion des affaires de BSP School of Accountancy and Management, et non pas son épouse comme initialement évoqué. L'enquête a mis en lumière une série de cas similaires, impliquant d'autres compagnies privées ayant fraudé le HRDC en soumettant des demandes pour des formations fictives. Certaines de ces affaires ont déjà été portées devant la cour et certaines compagnies ont déjà été inculpées, tandis que d'autres sont encore en cours d'investigation.
Rs 300 millions allouées à la formation des entreprises privées chaque année
Le YEP, qui bénéficie d'un financement annuel du HRDC pour la formation des jeunes, a pour objectif de soutenir les employeurs dans le recrutement de jeunes qualifiés, tout en leur offrant la possibilité de suivre une formation adaptée aux besoins du marché du travail. Ce programme permet aux employeurs de bénéficier d'une subvention sur les salaires des jeunes recrutés en formation ou en stage, en échange de leur engagement à fournir une formation de qualité.
Les fonds alloués par le HRDC pour ces formations sont conséquents : chaque année, l'État investit des Rs 300 millions pour soutenir les entreprises qui forment leur personnel, selon notre source. Les allocations mensuelles versées aux stagiaires en placement dans le cadre du YEP ont été révisées et sont en vigueur depuis le 1er novembre 2017. Les nouvelles allocations sont les suivantes : diplômés, Rs 15 000, titulaires de diplôme, Rs 10 000 et titulaires du Higher School Certificate, Rs 8 000.
Fraude de grande envergure
En 2016, la FCC a renforcé ses efforts dans la lutte contre la fraude et la corruption en ouvrant une enquête sur des abus de fonds publics dans le cadre des programmes de formation gérés par le HRDC. Depuis, deux arrestations ont été effectuées et un troisième dossier, beaucoup plus conséquent, était sous investigation.
Les premières conclusions des investigations menées par la FCC ont mis en lumière un réseau complexe d'abus de fonds publics, dans lequel le HRDC aurait procédé à des remboursements pour des formations presque fictives. Des entrepreneurs, comme Raffick Kulhan et Martie Gérard Delettre, ont été arrêtés pour blanchiment d'argent pour des sommes de Rs 131 259 et Rs 197 748 respectivement. Ces montants correspondent à des réclamations soumises et validées par le HRDC pour des formations qui en réalité n'ont jamais eu lieu. Pour justifier ces réclamations, les deux suspects ont présenté de faux documents aux autorités, incluant des listes de participants fictifs et des registres de présence manipulés. Lors de la première phase de l'enquête, la FCC a déjà démantelé le système frauduleux mis en place par ces entrepreneurs. Les deux suspects ont comparu devant le tribunal, où ils ont été inculpés provisoirement de blanchiment d'argent en vertu de la Financial Intelligence and Anti-Money Laundering Act.
Un troisième cas implique un montant beaucoup plus élevé de Rs 6,3 millions. Cette affaire concerne des employés d'une quinzaine d'entreprises qui auraient soi-disant suivi des formations de cuisine, à un coût de Rs 70 000 par personne. Ce montant, totalement injustifié, a révélé une fraude de grande envergure pour des formations fictives.
Le nom de Sham Mathura évoqué dans «Missie Moustass»
On peut entendre la voix de l'ex-Premier ministre dans un des enregistrements de Missie Moustass parlant à une voix attribuée l'ex-ministre de l'Énergie, Joe Lesjongard, pour que celui-ci intervienne à son tour auprès de la direction du Central Electricity Board pour accorder un délai supplémentaire pour les factures dues de BSP School appartenant à Sham Mathura. La voix attribuée à Joe Lesjongard acquiesce tout en assurant que BSP School ne sera pas déconnectée. Sham Mathura semble être bien estimé par Pravind Jugnauth, qui ajoute d'ailleurs que le monsieur en question a reçu le soutien du gouvernement pour obtenir du financement.
Il faut savoir que c'est ce même Sham Mathura qui avait déclaré sur une radio privée que les Rs 300 millions dépensées pour la construction d'une route à Chebel ne couvraient pas trois kilomètres mais six kilomètres,«parski li fer trwa km ale, trwa km vini».