Madagascar: Le manioc s'impose quand le prix du riz s'envole

Dans la région Atsimo-Andrefana du Grand Sud malgache, cette année encore, l'absence de pluie empêche les ménages de lancer le repiquage du riz, censé débuter en novembre. Bon marché, le manioc sec devient alors une alternative subie. Mais des acteurs de la région tentent d'inverser ce paradigme et de donner à cette plante, qui pousse en abondance dans le sud de l'île, toute sa place dans les assiettes des Malgaches.

Accroupi, vêtu d'une chemise turquoise ample, Richard remplit son grand cabas de morceaux de manioc sec. Cinq kilos pour nourrir ses cinq enfants. « Le riz, je ne peux plus me permettre d'en acheter... Le kapoaka [soit 285 grammes] est passé à 1000 ariary ... alors que j'achète le manioc sec à 1400 ariary le kilo ! Les temps sont durs. Sur le marché, on voit de moins en moins de stands d'agriculteurs ».

Nourriture du pauvre ?

À deux heures de route, à Tuléar, un natif de la région se bat pour faire du manioc autre chose qu'un produit de dernier recours. Consommée brute, dépourvue de ses qualités nutritives vantées en Afrique de l'Ouest où elle est transformée, la tubercule est associée à la nourriture du pauvre ou à celle des prisonniers à Madagascar.

« À Madagascar, le manioc pousse énormément, mais la population ne sait pas le consommer. Il est bouilli tout simplement. L'enjeu aujourd'hui est de savoir le transformer en produit qu'on peut cuisiner, par exemple l'attiéké. Vous avez aussi le gari de manioc qui est excellent pour les enfants ! », explique Houssein Mebobaly, fondateur de la société Malakass qui s'est lancée dans la production de farine de manioc en 2021. Et si ce chef d'entreprise voit dans le manioc une potentielle arme contre la faim dans la région Atsimo-Andrefana, c'est aussi parce que les rendements y sont encore loin d'être maximisés : 7 tonnes par hectare alors qu'ils peuvent atteindre les 40 tonnes en Afrique de l'Ouest. L'absence de toute logique industrielle et des cas de mosaïque, une maladie répandue qui attaque les feuilles de manioc, en sont les causes.

« Bonne bouture, au bon terrain, au bon climat »

« Il faut d'abord multiplier les boutures saines. Il faut aussi qu'on recherche la bonne bouture, au bon terrain, au bon climat pour arriver au bon rendement et ensuite à une bonne transformation derrière », précise Houssein Mebobaly. Malakass ouvre la voie à une transformation de la filière en coopérant avec des centres de recherche agricoles nationaux et internationaux pour cibler les variétés de manioc les plus adaptées au climat de la région. Si Houssein Mebobaly voit déjà dans le manioc transformé le futur « or blanc » de Madagascar, le prix de ces produits devra pouvoir rivaliser, sur les étals des marchés, avec celui du riz si cher au peuple malgache.

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