Ile Maurice: Première réunion sous l'ère Sithanen avec stabilité de la roupie et pénurie de dollars en ligne de mire

C'est confirmé. La première réunion du Monetary Policy Committee (MPC) a été fixée au 4 février. Celle-ci se caractérise par la nouvelle équipe en poste à la Banque de Maurice (BoM), placée sous la direction de Rama Sithanen et de ses deux adjoints, Rajeev Hasnah et Gérard Sanspeur, ainsi que par les cinq nominés qui y siégeront (voir la composition plus loin).

Cette réunion revêt toute son importance, surtout avec la décision que le comité sera appelé à prendre sur le key rate (taux directeur), ainsi que les premiers signaux que le gouverneur compte envoyer à la communauté des affaires, au marché et à la population.

À une semaine de cette réunion, les analyses des spécialistes de la finance divergent. Ils s'interrogent sur la posture que le comité va adopter par rapport au taux directeur à l'issue des discussions : hausse ou statu quo. La dernière réunion du MPC, tenue le 20 septembre sous la présidence de l'ex-gouverneur, Harvesh Seegolam, arrêté depuis sous une charge de «conspiracy to defraud» dans le sillage de l'affaire de la Mauritius Investment Corporation et libéré sous caution, avait décidé d'une baisse de 50 points de base, passant de 4,5 % à 4 %.

La stabilité de la roupie, réclamée à cor et à cri par la population durant la campagne électorale après une dépréciation moyenne de 5,3 % annuellement de 2020 à 2024, impactant négativement le pouvoir d'achat des ménages, occupera une place de choix dans les discussions et, éventuellement, dans les délibérations des nouveaux membres de ce comité. Tout comme les difficultés pour certains commerçants, que d'aucuns qualifient de véritables combats pour trouver certaines devises, plus particulièrement le dollar, sur le marché de change pour financer leurs opérations.

L'installation de Rama Sithanen au 18e étage de la BoM Tower le 16 novembre 2024, soutenu ensuite par ses deux adjoints, a permis d'initier une nouvelle approche à la politique monétaire, comme The State of the Economy l'a d'ailleurs proposé. Ce document, préparé par le ministère des Finances, note à cet effet à la page 11 que, suivant la politique du taux d'intérêt prônée par le MPC durant les trois dernières années, «the interest rates on the US-denominated financial assets have been significantly higher than on rupee-denominated financial assets». Et que cette situation a accéléré la dépréciation de la roupie et alimenté l'inflation dans le pays.

Attentes

Dans l'entourage de la nouvelle équipe de direction de la BoM, on est satisfait qu'elle ait pu réussir à stabiliser la roupie et stopper son déclin face au dollar en raison de la confiance affichée par la communauté des affaires et la population à leur égard, et de certaines décisions prises.

Toutefois, certains spécialistes souhaitent apporter de la nuance dans toute cette problématique entourant l'évolution de la roupie face au billet vert. «La stabilité de la roupie est une chose, mais le manque de liquidités, notamment le dollar sur le marché, en est une autre, et là, les choses se compliquent. Car il y a le différentiel du taux d'intérêt sur la roupie par rapport à celui sur d'autres devises que les gros détenteurs de devises prennent en considération avant d'échanger leurs dollars sur le marché», analyse John Chung, Managing Partner chez KPMG.

Un cambiste, opérant dans le secteur bancaire, abonde dans le même sens. Il note que la monnaie locale s'est bien défendue vis-à-vis du dollar. Entre le 18 novembre 2024, après la victoire présidentielle de Donald Trump, quand la roupie s'échangeait à Rs 46,86 (le prix moyen du marché) et le 23 janvier 2025 (Rs 46,93), la roupie est restée plus ou moins stable face au dollar.

Toutefois, il faut rappeler que le dollar avait atteint un pic de Rs 48,09 le 3 janvier, selon la BoM, ce qui a valu l'intervention de la banque sur le marché du forex le 6 janvier pour injecter des dollars à Rs 46,75. Une démarche qui a permis de renforcer la roupie vis-à-vis du billet vert, dont le cours est passé à Rs 47,12 le lendemain.

Sans doute, il y a actuellement un sentiment du marché, selon des spécialistes, qu'une augmentation du key rate renforcera la valeur de la roupie en renchérissant les coûts de prêts. «Un exportateur, qui conserve ses dépôts en dollars, avec un taux rémunérateur de 4,5 % et a recours habituellement aux prêts en roupie pour financer ses opérations, vu que le taux d'intérêt est relativement faible, pensera deux fois. Il sera obligé tôt ou tard d'échanger une partie de ses dollars, ce qui permettra aussi de régler le problème de pénurie de devises», souligne le cambiste.

Certes, la décision du taux directeur est une composante importante de l'exercice de ce comité. Mais au-delà, il y a le message que la nouvelle équipe de la BoM compte faire passer le 4 février pour rassurer tous les stakeholders que they mean business.

Les membres du MPC

Rama Sithanen, gouverneur de la BoM (Chairman)

Rajeev Hasnan (First Deputy Governor)

Gérard Sanspeur (Second Deputy Governor)

Jameel Ahmed Khadaroo

Shamila Banymandhub-Chakowa

Myriam Blin

Martine Ip

Jeevita Matadeen

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