Goma est-elle tombée à l'heure où vous nous lisez ? En tout cas hier lundi 27 janvier 2025, cette ville, la principale du Nord-Kivu, située à l'est de la République démocratique du Congo (RDC), avait les allures de cité assiégée, tant on y entendait des tirs d'armes lourdes. Des détonations au rythme de l'irrésistible percée des combattants du M23, soutenus par l'armée rwandaise.
S'achemine-t-on vers un bis repetita des événements de novembre 2012, au cours desquels les mutins de l'ex-général des Forces armées congolaises (FARC), Bosco Ntaganda, alias « Terminator », avaient pris la ville et ses alentours et fait près de 350 militaires prisonniers ?
Pour sûr, comme abandonnées à elles-mêmes par une armée nationale impuissante face à un mouvement rebelle, les populations, déjà éprouvées par plusieurs années de guerre civile, sont de nouveau contraintes de prendre le chemin de l'exil. Sans pour autant échapper au drame humanitaire à leurs trousses depuis de nombreuses années.
Qui donc pourra arrêter cette catastrophe qui se profile à l'horizon, mais dont personne ne peut prévoir l'ampleur ?
Difficile de répondre à cette question d'autant plus que depuis que le Rwanda de Paul Kagamé a mis pied sur cette partie orientale de la RDC, réputée pour ses richesses naturelles stratégiques, le Nord-Kivu semble être devenu une cause perdue pour le reste du monde : timides condamnations de la communauté internationale, quinze ans de présence d'une MONUSCO sans la moindre lueur de paix et, par-dessus tout, une hiérarchie militaire dont les hauts faits d'armes sont à rechercher sur le terrain de la corruption plutôt que dans sa mission de protection des populations.
Et comme pour se donner bonne conscience, c'est au moment où l'horreur frappe de nouveau aux portes de Goma que l'on assiste à un branle-bas diplomatique dans l'espoir de conjurer le mal.
En effet, c'est au moment où les rebelles du M23 entamaient leur marche sur la ville que dimanche dernier, se réunissait d'urgence le Conseil de sécurité de l'ONU dont le secrétaire général, Antonio Guterres, se perdait en de vaines condamnations de Kigali.
Aujourd'hui mardi, c'est au tour de l'Union africaine, dont le Conseil de paix et de sécurité (CPS) doit se retrouver pour se préoccuper du sort des pauvres Gomatraciens.
Demain mercredi, le concert de lamentations se poursuivra à Nairobi, à l'appel du chef de l'Etat kényan, William Ruto, président en exercice de la Communauté d'Afrique de l'Est (CAE). Les deux présidents protagonistes, le Congolais Félix Tshisekedi et le Rwandais Paul Kagamé, seront-ils effectivement présents, comme l'a annoncé la présidence kényane ? Si oui, sont-ils disposés, dans ce contexte de rupture de relations diplomatiques entre leurs Etats, à dialoguer et à faire les concessions nécessaires pour un cessez-le-feu ?
On a bien peur que ce chassé-croisé diplomatique n'accouche que de vaines gesticulations.
Comme le dit un proverbe bien connu de chez nous, « ils ont laissé le fantôme entrer dans la maison avant de refermer la porte ».
Il faut même craindre qu'exaspéré, Félix Tshisekedi ne finisse par déclarer la guerre ouverte à son voisin qui ne s'est que trop ingéré dans les affaires de la RDC. Au risque de bouleverser la stabilité de toute une région.
Croisons donc les doigts pour que toutes ces initiatives de résolution pacifique du conflit produisent les fruits escomptés.