Accusé de trafic de drogue d'une valeur de Rs 22 millions, Vinesh Reetun a été libéré sous caution hier, après avoir passé plus de 15 mois en détention. La décision de la magistrate Zeenat Cassamally intervient après des incohérences dans l'enquête, notamment l'absence de preuves solides et un rapport négatif du Forensic Science Laboratory (FSL) concernant une accusation similaire de trafic de drogue dans une affaire antérieure. En effet, la magistrate avait lancé un ultimatum pour que la poursuite vienne préciser le stade de l'enquête et si une accusation formelle avait été déposée contre le requérant. En l'absence de toutes ces procédures, la magistrate a ordonné la libération de Vinesh Reetun contre deux cautions de Rs 300 000. Il a retenu les services de Me Sanjeev Teeluckdharry.
Dans le cas présent, il ressort du témoignage de l'enquêteur Collas que 1 480,11 grammes de cannabinoïdes synthétiques, d'une valeur de Rs 22 201 650, ont été récupérés d'un colis envoyé par une société allemande à un certain Ashley Hurkoo via les services de messagerie DHL. Un numéro de téléphone a été utilisé pour contacter DHL afin d'obtenir la livraison du colis à Flic-en-Flac et le 8 décembre 2023, lors d'un exercice de contrôle de livraison, Vinesh Reetun a tenté de s'enfuir avec deux autres suspects, laissant tomber un pistolet chargé avant d'être arrêté.
Plainte contre l'enquêteur
En cour, le représentant de l'Anti Drug and Smuggling Unit a confirmé que le suspect avait fait une plainte contre un sous-inspecteur (SI) à l'Independent Police Complaints Commission et que ce même SI fait partie de l'équipe d'enquête dans la présente affaire. Il a déclaré qu'il ne savait pas si le SI enquêtait sur la précédente affaire de trafic de drogue intentée contre Vinesh Reetun, qui avait été radiée parce que le rapport médicolégal était négatif.
Le demandeur a témoigné qu'il s'agissait d'une affaire de planting. Il réclame des dommages et intérêts de Rs 30 millions au policier en question et à l'État à la suite de sa détention pendant 426 jours et de celles de ses parents. «À la suite d'une radiation d'accusation de trafic de drogue portée contre moi en 2018, étant donné que le rapport du laboratoire médico-légal s'était révélé négatif, une deuxième accusation provisoire de trafic de drogue avait été déposée contre moi en 2022 où j'avais été libéré sous caution et en 2023, j'ai été de nouveau été arrêté», a précisé Vinesh Reetun.
Or, aux fins de la demande de libération sous caution, la cour a noté qu'outre les preuves de complicité à charge, le requérant et les deux autres suspects avaient été retrouvés sur le lieu où devait être effectué l'exercice de contrôle de livraison, à Flic-en-Flac, et un pack SIM avait été sécurisé avec le numéro de téléphone local utilisé pour demander la livraison du colis. De plus, le rapport médicolégal confirme que le colis contient des cannabinoïdes synthétiques.
Disparités dans les enquêtes : Évaluation des analyses du laboratoire médico-légal et décisions de libération sous caution
Les rapports contradictoires du FSL et les décisions de libération sous caution soulèvent des questions sur l'équité des enquêtes dans des affaires de trafic de drogue. Alors que Vinesh Reetun a été libéré après plus de 15 mois de détention, d'autres suspects, malgré des rapports négatifs du FSL dans leurs affaires, ont également dû payer une caution. Ces divergences dans les rapports médico-légaux et les décisions judiciaires appellent à des éclaircissements sur la manière dont ces dossiers sont traités.
L'accusation provisoire de conspiracy to conceal drug contre Shazia Oozeerally-Jaffar et sa soeur, Adiilah Oozeerally-Salaroo, a été abandonnée en cour le 3 novembre 2023, après que les analyses du FSL ont révélé que la substance saisie n'était ni de la cocaïne ni aucune autre drogue. Cette affaire faisait suite à l'arrestation des soeurs Shazia et Adiilah Oozeerally en septembre, accusées d'être impliquées dans un trafic de 7,8 kg de cocaïne. Cependant, après les résultats du FSL montrant que les échantillons étaient négatifs pour toutes les drogues classées, l'avocat de Shazia a demandé l'abandon de l'accusation, décision ratifiée par la magistrature.
Taslim Oozeer, un habitant de Pailles, a été arrêté le 20 avril 2023 pour possession de drogue synthétique après qu'un colis suspect a été intercepté par la Customs Anti Narcotics Section. Ce colis, pesant 1,028 kg et estimé à Rs 15 millions, a été pris pour du cannabis synthétique. Cependant, après des analyses du FSL, il a été prouvé que la substance n'était pas de la drogue, mais des «larmes de l'Himalaya», un remède ayurvédique. Après plus de 20 jours de détention, Taslim a été libéré.
Ces cas ne sont pas uniques. Plusieurs autres personnes ont vu leurs accusations provisoires annulées après des tests en laboratoire. Par exemple, Bruneau Laurette, arrêté pour possession de cannabis synthétique, a vu sa charge rayée après que le FSL a déterminé que la substance retrouvée chez lui n'était pas de la drogue, mais des graines de chia. De même, Feroz Karamuth, un TikTokeur, a été interpellé après la saisie d'une poudre blanche, mais les tests ont révélé qu'il ne s'agissait pas de drogue. D'autres affaires similaires incluent Salahuddeen Boodhoo et son épouse, arrêtés en 2018 après qu'une poudre suspecte a été trouvée dans une bouteille isotherme. Le FSL a déterminé que cette poudre n'était pas une drogue, mais une substance utilisée pour stabiliser la température des contenants.
Shah Baaz Choomka, arrêté en 2020 pour une substance suspectée d'être de la drogue, a été libéré après que l'analyse a confirmé qu'il s'agissait d'une erreur.
Enfin, Vinesh Reetun, arrêté en 2018 pour la saisie de 1,2 kg de drogue supposée, a vu les accusations abandonnées après que les tests ont prouvé qu'il ne s'agissait pas de drogue.
Un rapport du FSL peut-il être réévalué ou émis à deux reprises?
Nous avons sollicité Bernard Mootoosamy, du Police Press Office, qui confirme qu'il n'existe pas de rapport intérimaire dans le cadre d'une analyse auprès du laboratoire. «Le rapport doit être final. Si les résultats sont négatifs dans une affaire de drogue, la police ne pourra pas poursuivre l'affaire, car c'est sur ce rapport que les enquêteurs construisent leur dossier», précise-t-il. Un enquêteur expérimenté de l'Anti Drug and Smuggling Unit partage également cette opinion : «Je n'ai jamais rencontré une affaire où un même rapport a été émis à deux reprises. On ne peut pas contester les conclusions d'une analyse scientifique et lui dire qu'elle a mal interprété les résultats. Si l'analyse est négative, il n'y a pas de raison de contester», ajoute-t-il. Dans le cas de Reetun, l'arrêté a été fait à trois reprises. Une nouvelle analyse a été réalisée à la suite de la saisie d'une nouvelle quantité de drogue, ce qui a conduit à un nouveau dossier et a donné lieu à une libération sous caution après une longue détention.