Depuis hier, le Mali, le Burkina et le Niger ne font plus officiellement partie de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Il y a un an, en effet, après les coups d'Etat successifs d'Assimi Goïta, d'Ibrahim Traoré et d'Abdourahamane Tiani, les trois Etats qui avaient formé le 16 septembre 2023 l'Alliance des Etats du Sahel, ont en effet décidé de claquer la porte de l'organisation sous-régionale, coupable à leurs yeux de ne les avoir pas suffisamment soutenus dans la lutte qu'ils mènent contre le terrorisme.
Et pire, d'avoir pris des sanctions commerciales, financières et diplomatiques contre eux. Un procès en règle de la CEDEAO qui serait, aux yeux des frondeurs, un machin entre les mains de certaines puissances, la France pour ne pas la nommer, en vue de déstabiliser la sous-région.
Mais si la décision était censée avoir un effet immédiat, il fallait cependant attendre les douze mois de préavis qu'imposent les textes de la CEDEAO. Douze mois qui ont donc officiellement expiré hier et qui ont donné lieu à Bamako, à Ouagadougou et à Niamey à de grands rassemblements de soutien aux trois régimes qui ont symboliquement organisé les funérailles de la CEDEAO à grand renfort de slogans anti-impérialistes et souverainistes. Le sort donc en est définitivement jeté de la part de l'AES dont les chefs d'Etat ont toujours clamé que leur décision était irréversible. Ni les bons offices du président togolais Faure Gnassingbé, ni l'investissement personnel du nouveau président sénégalais Bassirou Diomaye Faye ne sont parvenus à infléchir la position des trois pays.
Il ne reste guère plus avec ces trois départs de la CEDEAO qui avait déjà vécu le départ de la Mauritanie, même si elle frappe de nouveau à la porte (1) que douze membres. A la différence du divorce à l'amiable avec la Mauritanie, cette fois-ci la séparation a été houleuse entre les désormais ex-partenaires.
Il s'agit maintenant de voir quelles seront les répercussions sociales, politiques et même dans la lutte contre le terrorisme entre ces deux entités qui sont cependant bien obligées de coopérer. Au dernier sommet de la CEDEAO tenu le 16 décembre 2024, l'organisation sous-régionale avait d'ailleurs proposé un moratoire de six mois. Un semestre qui devait être mis à profit pour arrêter les formalités du divorce et probablement le modus vivendi qui existera désormais entre les deux entités. C'est d'ailleurs pour cette raison que les ministres des Affaires étrangères des pays de l'AES se sont retrouvés à Ouagadougou ces derniers jours pour accorder leurs violons dans la perspective de ces négociations.
D'ores et déjà, le ministre des Affaires étrangères du Mali, Abdoulaye Diop, ne se fait guère d'illusion : « Ça ne va pas être facile du tout, car beaucoup n'ont pas aimé notre démarche et ils mettent des moyens en oeuvre pour saboter nos actions ».
Faut-il y voir, a priori, une justification des difficultés futures qui ne manqueront pas de survenir ? La question mérite d'être posée !
(1) En 2000 la Mauritanie se retire de la CEDEAO afin de se consacrer au développement de l'Union du Maghreb arabe. Le projet n'ayant pas abouti, le pays demande en mai 2017 à faire son retour au sein de l'organisation.