Maroc: Dans le milieu du cinéma, la lente prise de parole des femmes sur les violences subies

Au Maroc, 80 % des professionnels évoluant dans le milieu du cinéma ont vécu ou ont été témoins, au moins une fois dans leur carrière, d'une forme de violence visant les femmes. Voilà ce qui ressort de cette étude inédite rendue publique mi-janvier par l'Association des Rencontres Méditerranéennes du Cinéma et des Droits de l'Homme (ARMCDH), une organisation marocaine. Dans un milieu du cinéma où la parole est longtemps restée étouffée, les femmes commencent seulement à dénoncer les violences qu'elles subissent.

Au Maroc, 80 % des professionnels évoluant dans le milieu du cinéma ont vécu ou ont été témoins, au moins une fois dans leur carrière, d'une forme de violence visant les femmes. Voilà ce qui ressort de cette étude inédite rendue publique mi-janvier par l'Association des Rencontres Méditerranéennes du Cinéma et des Droits de l'Homme (ARMCDH), une organisation marocaine.

« Il faut cadrer ce métier pour lutter contre les différents abus à l'égard des femmes »

Pour réaliser cette étude, la présidente de l'ARMCD, Fadoua Maroub, a interrogé 15 professionnels du cinéma, 13 femmes et deux hommes. Ce sont les violences psychologiques qui sont les plus répandues, viennent ensuite les violences économiques, puis sexuelles, citées en premier par les actrices.

« Sur 60 personnes contactées, 15 personnes ont répondu présentes. Les gens n'osent pas parler. Et puis, il y a la peur des représailles. L'un des résultats aussi, c'est qu'il y a un manque de cadres juridiques. Dans le cinéma, il faut encore repenser comment vraiment cadrer ce métier pour pouvoir lutter contre ces différents abus à l'égard des femmes, explique la présidente de l'ARMCDH, Fadoua Maroub. On a formulé un certain nombre de recommandations, notamment appeler les femmes à s'organiser dans le secteur professionnel pour en parler et pour défendre leur propre intérêt, appeler les associations féministes à venir en appui à ces femmes pour tout ce qui est orientation pour les moyens de recours et surtout dans les écoles sensibilisées et former les futures professionnelles, pour qu'elles puissent connaître ce que c'est la violence à l'égard des femmes et comment se protéger contre ces violences. »

Pas de réelle libération de la parole

Une actrice a accepté de partager son expérience des tournages au Maroc. Elle a préféré rester anonyme, sa voix a été modifiée pour la protéger de la stigmatisation et de l'ostracisme.

Elle a du mal à se confier, préfère laisser de côté son histoire personnelle pour expliquer ce qui, selon elle, rend les femmes particulièrement vulnérables dans le cinéma marocain : « C'est un milieu masculin. À l'origine, un réalisateur doit être un homme. L'état d'esprit général, c'est qu'une femme ne devrait pas travailler dans ces domaines-là, les domaines artistiques. »

Les jeunes femmes qui choisissent, malgré tout, de travailler dans le 7ème art ne sont pas préparées à ce qu'elles vont affronter. « Elles se retrouvent dans un milieu qu'elles ne comprennent pas, qui n'est pas assez organisé, où la déontologie du travail n'est pas claire et voilà. Donc, elles doivent se défendre comme elles peuvent. »

Ces dernières années, des actrices marocaines ont osé raconter les violences qu'elles ont subies, mais la parole ne s'est pas encore réellement libérée. « Les gens ne parlent pas beaucoup parce que bon, si tu veux parler, il faut que justice soit faite. Et pour que justice soit faite, et ben, il faut que ce soit organisé, qu'il y ait des instances, que les choses marchent. Et si elles ne marchent pas, ce sera peine perdu. »

Néanmoins, cette actrice veut être optimiste. Elle voit la société, les esprits changer, dit-elle, avec l'arrivée d'une nouvelle génération dans le cinéma marocain.

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