Les rebelles du M23 ont pris le contrôle d'une grande partie de Goma, chef-lieu du Nord-Kivu. Ils se dirigeraient vers la province voisine du Sud-Kivu.
Dans un communiqué diffusé ce mercredi 29 janvier, le président angolais, Joao Lourenço, qui dirigeait les derniers efforts de médiation entre la RDC et le Rwanda, soutien du M23, a demandé le "retrait immédiat" du groupe armé et des troupes rwandaises du territoire congolais.
Pour le président angolais, le retrait des forces de défense rwandaises du territoire congolais est une des conditions nécessaires à la convocation d'un sommet tripartite à Luanda.
Jason Stearns, professeur d'études internationales à l'Université Simon Fraser, au Canada, se montre pour sa part sceptique quant au processus de Luanda, compte tenu, dit-il, de l'attitude du président Paul Kagame.
Le 15 décembre dernier, les négociations entre les deux pays ont échoué car le Rwanda demande à ce que la RDC dialogue d'abord avec le M23.
Une demande rejetée par Kinshasa qui considère que le M23 est un groupe terroriste. Il est donc désormais difficile de conduire une médiation, alors que les combats se poursuivent.
Jason Stearns estime qu'il faut d'abord un cessez-le-feu.
"On voit la progression des troupes du M23 actuellement. S'agissant de la médiation, on voit qu'il y a des demandes plus maximalistes du côté du M23, de Corneille Naanga de l'AFC (Alliance du Fleuve Congo) qui veut maintenant prendre Kinshasa, " assure-t-il au micro de la DW.
Et l'anayste ajoute, "Donc il ne s'agit plus seulement des FDLR et de la protection de la communauté tutsi, il s'agit de renverserle pouvoir à Kinshasa. Où est-ce que ça va s'arrêter ? Ça c'est aussi une question que la médiation doit poser. Quelles sont les demandes de part et d'autre quand ils arrivent à la table des négociations".
Pressions, actions, sanctions ?
Pour que la situation puisse progresser, il faudrait que plus de pressions diplomatiques soient exercées sur le Rwanda, précise Jason Stearns.
"Il y avait une complaisance des acteurs internationaux, des Etats-Unis qui hésitaient à faire trop de pression sur le Rwanda. Pour qu'il y ait un processus de paix, il faut qu'il y ait plus de pression sur le Rwanda. C'est la grande question qui est posée actuellement dans les capitales internationales",affirme-t-il.
Pour Jason Stearns, "l'Allemagne a commencé avec un geste, celui de suspendre les négociations par rapport à son aide au Rwanda. Est-ce qu'on est en train d'en discuter à l'Union européenne, est-ce que cela aboutira ? C'est une question clé pour les prochains jours".
"Le M23 va continuer d'avancer"
Au niveau international, plusieurs pays, comme la France ou encore les Etats-Unis, ont condamné la prise de Goma par le M23.
Erik Kennes est chercheur au Egmont Institute en Belgique. Pour lui, les négociations et les médiations ne vont pas changer les éléments structurels du conflit et notamment la faiblesse de l'armée congolaise.
Quant à la Chine, très présente en RDC et avec qui le Kinshasa a signé, en septembre 2024, un accord de coopération militaire, pour Erik Kennes, il ne faut pas en attendre grand-chose.
"La Chine ne va pas régler les données essentielles du problème. Il y a une possibilité, peut être, avec l'envoyé spécial des Nations unies pour les Grands lacs qui est Chinois et qui pourrait éventuellement bénéficier du soutien du gouvernement chinois, mais, encore une fois, cela ne va pas changer les éléments fondamentaux du problème. Cela peut tout au plus mener à un cessez-le-feu, qu'on arrête un peu la situation, mais je ne crois pas que cela puisse conduire à une solution définitive," soutient Erik Kennes.
Vincent Karega, ambassadeur itinérant du Rwanda pourla région des Grands lacs, a annoncé, aujourd'hui, que les rebelles du M23 allaient continuer d'avancer. "Ils vont continuer dans le Sud-Kivu, parce que Goma ne peut pas être une fin en soit," a-t-il déclaré.