L'existence même de la loi ainsi qu'un jugement de la Court of Civil Appeal de 2015 attestent qu'il n'est pas nécessaire d'introduire une nouvelle législation pour permettre l'importation parallèle de produits pharmaceutiques. Ce jugement est venu renverser une décision précédente de 2012 qui concluait que cette pratique devait être interdite. Selon l'ex-magistrat, l'importation parallèle de ces produits pourrait reprendre immédiatement.
Le discours-programme du gouvernement prévoit l'introduction d'une nouvelle législation pour permettre l'importation parallèle de médicaments. Vous affirmez que cela n'est pas nécessaire. Sur quoi repose votre argumentation ?
Il ne s'agit pas seulement de mon avis personnel : le cadre légal permettant l'importation parallèle de médicaments existe déjà. Il suffit d'exploiter les dispositions juridiques en place et de s'appuyer sur des documents qui constituent des preuves légales solides pour relancer cette activité sans ambiguïté.
Vous parlez d'une certaine confusion autour de l'importation parallèle de médicaments. Quelle en est l'origine ?
En 2012, un jugement de la Cour suprême avait interdit l'importation parallèle de médicaments en estimant qu'un importateur local devait obligatoirement obtenir le consentement du propriétaire de la marque du produit pharmaceutique concerné. Toutefois, cette décision a été annulée par un jugement de la Court of Civil Appeal en 2015.
Cette instance a conclu que l'importation parallèle de produits pharmaceutiques ne constituait pas une infraction en l'absence du consentement du fabricant, et que cette absence ne justifiait ni une sanction douanière ni une condamnation judiciaire. Le Parlement mauricien n'a jamais adopté de loi interdisant cette pratique. Par conséquent, à mon sens, il est inutile d'introduire une nouvelle législation.
Si l'on suit votre raisonnement, que se passerait-il si le gouvernement s'appuyait sur le jugement de la Court of Civil Appeal de 2015 pour décréter que l'importation parallèle est de nouveau autorisée ?
Une telle initiative pourrait être prise immédiatement. Dans ce cas, la douane ne pourrait plus s'opposer à toute demande d'importation parallèle de médicaments. Avec la reprise des importations par les petits opérateurs, la crise pharmaceutique à Maurice prendrait fin. Cette crise est marquée par des abus de monopole, des prix excessifs et des pénuries artificielles destinées à justifier des hausses de prix. Par le passé, ces pratiques ont évincé les petits importateurs, laissant le marché sous le contrôle exclusif des multinationales, qui ont consolidé leur position dominante.
Comment l'importation parallèle fonctionnait-elle avant son interdiction ?
Les petits importateurs achetaient des produits pharmaceutiques sur le marché international ou directement auprès des multinationales détenant les marques commerciales enregistrées. Ces médicaments étaient revendus sur le marché local à des prix plus abordables, bénéficiant surtout aux personnes à faibles revenus. La marge accordée par le Pharmacy Board était fixée entre 15 et 17 %. Ce système favorisait une concurrence saine entre les acteurs du marché, garantissant un approvisionnement régulier et des prix raisonnables pour les consommateurs.
Quelles alternatives proposez-vous face au projet de nouvelle législation annoncé par le gouvernement ?
Si les autorités concluent, après analyse, qu'une nouvelle législation n'est pas nécessaire, elles devraient intervenir à deux niveaux :
- Au niveau douanier : Il est primordial d'instruire les services des douanes pour qu'ils respectent les conclusions du jugement de la Court of Civil Appeal de 2015, qui affirme que l'absence de consentement du propriétaire de la marque ne constitue pas une infraction. Ainsi, les douaniers devraient cesser immédiatement de saisir des médicaments importés parallèlement et de demander aux petits importateurs un consentement préalable. De plus, les services douaniers devraient justifier la validité légale de leurs sanctions appliquées depuis 2010, en dépit du jugement de 2015.
- Au niveau judiciaire : Il conviendrait d'attirer l'attention de la Chef juge sur les cas où les recommandations du jugement de 2015 n'ont pas été suivies dans les tribunaux. Elle pourrait ainsi prendre les mesures nécessaires pour rétablir la justice et déterminer d'éventuelles sanctions disciplinaires.
En appliquant ces recommandations, l'importation parallèle de médicaments pourrait reprendre sans entrave, garantissant un marché plus équilibré et accessible à tous.