Afrique: L'épidémie de tabagisme représente l'une des plus graves menaces au monde, mais un instrument international permet d'y faire face

Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, Directeur général de l'OMS, et Dr Adriana Blanco Marquizo, Cheffe du Secrétariat de la Convention-cadre de l'OMS pour la lutte antitabac
27 Février 2025
tribune

Au cours des 20 dernières années, la consommation de tabac a diminué d’un tiers dans le monde. On compte aujourd’hui environ 118 millions de fumeuses et fumeurs de moins qu’en 2005.

Comment est-on parvenu à ce résultat ? En grande partie grâce à la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac, qui est entrée en vigueur il y a tout juste 20 ans, après des années de négociations, et qui est l’un des instruments ayant recueilli la plus large adhésion dans l’histoire des Nations Unies.

La Convention-cadre a été – et reste – une référence en matière de droit international : premier instrument négocié en vertu de la Constitution de l’OMS, elle intègre diverses mesures pour maîtriser l’offre et la demande de tabac.

Aujourd’hui, la Convention-cadre de l’OMS compte 183 Parties, couvrant 90 % de la population mondiale. Plus de 5,6 milliards de personnes sont protégées par la mise en œuvre complète d’au moins une mesure de lutte antitabac.

Par exemple, 138 pays exigent désormais que des mises en garde sanitaires illustrées figurent sur les paquets de cigarettes, tandis que des dizaines de pays imposent des règles de conditionnement neutre qui interdisent de faire figurer une marque sur les paquets de cigarettes, ce qui les rend moins attrayants.

En outre, 66 pays interdisent la publicité en faveur du tabac, la promotion et le parrainage ;

Plus d’un quart de la population mondiale est protégée par l’interdiction de fumer à l’intérieur et par d’autres lois interdisant de fumer ;

Enfin, l’augmentation des taxes sur les produits du tabac visant à les rendre moins abordables reste l’outil le plus rentable pour réduire la consommation. Ces taxes peuvent également générer des recettes publiques pour la lutte antitabac et le financement de la santé.

En 2018, un instrument juridique complémentaire est entré en vigueur : un protocole visant à éliminer toutes les formes de commerce illicite des produits du tabac, activité qui sape les mesures de réglementation, diminue les recettes fiscales et alimente la criminalité.

Malgré ces progrès, le tabac demeure la principale cause de décès évitable dans le monde et l’un des principaux facteurs de maladies cardiaques, d’accidents vasculaires cérébraux, de cancer, de maladies respiratoires chroniques et de diabète.

On compte encore environ 1,3 milliard de consommatrices et consommateurs de tabac dans le monde. Cette situation est entretenue par l’industrie du tabac, qui engrange plusieurs milliards de dollars en vendant des produits addictifs et mortels et en exploitant la souffrance des personnes qui les consomment.

Face à la baisse des ventes de cigarettes, l’industrie se tourne désormais vers de nouveaux produits tels que les cigarettes électroniques, qui sont présentés à tort comme étant des substituts plus sains alors qu’ils contiennent des matières toxiques, dont on sait que certaines sont cancérogènes et que d’autres augmentent le risque de cardiopathie et de pneumopathie.

Les fabricants de tabac font tout pour rendre des millions de jeunes dépendants à leurs produits. Seuls 56 pays atteindront l’objectif mondial d’une réduction de 30 %  de la consommation de tabac d’ici à 2025.

Mais le tabac n’est pas seulement un problème de santé. Il menace aussi le développement durable dans son ensemble. On estime que le coût économique du tabagisme, découlant des dépenses de santé et des pertes de productivité, s’élève à 1,8 % du produit intérieur brut annuel mondial.

Notre planète compte également parmi les victimes du tabac. Environ 4,5 billions de mégots de cigarettes sont jetés chaque année dans l’environnement, soit la deuxième forme de pollution par les plastiques dans le monde. Des ressources précieuses, en terres agricoles et en eau, sont gaspillées pour cultiver du tabac plutôt que des denrées alimentaires. La production et la consommation de tabac contribuent par ailleurs au réchauffement climatique, émettant 80 millions de tonnes de dioxyde de carbone dans l’atmosphère chaque année.

Pour toutes ces raisons, la Convention-cadre de l’OMS reste aussi pertinente aujourd’hui que lors de son entrée en vigueur il y a 20 ans, bien que sa mise en œuvre varie d’un pays à l’autre et qu’il faille en renforcer de nombreux aspects.

Tous les pays peuvent faire plus, notamment en interdisant le parrainage et la publicité en faveur du tabac dans les médias classiques et sur les réseaux sociaux, et en protégeant les politiques de santé publique contre toute ingérence de l’industrie du tabac.

La pleine mise en œuvre des dispositions de la Convention-cadre de l’OMS est un moyen pour les pays de protéger la santé de leur population, leur économie et leur environnement pour les décennies à venir.

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