Au Tchad, l'un des correspondants de RFI Olivier Monodji et trois autres personnes ont été inculpées lundi pour « intelligence avec une puissance étrangère », « atteinte à la sûreté de l'État » ou encore « complot », attendent désormais leur première audition sur le fond par un juge d'instruction saisi de l'affaire. Cette situation inquiète notamment Reporters sans frontières.
Les avocats du directeur de publication de l'hebdomadaire Le Pays, qui est également un de nos correspondants à Ndjamena, ont estimé que le dossier du procureur était « vide ». Les organisations de la presse locale expliquent pour leur part que les faits présentés, la publication de possibles publireportages en lien avec la Russie et le partage d'informations déjà accessibles au public, relevaient tout au plus du délit de presse et certainement pas d'incriminations aussi graves et passibles de peines pouvant aller jusqu'à trente ans de prison.
Une situation qui inquiète notamment Reporters sans frontières. « On se rend compte que le parquet a véritablement corsé son accusation en retenant des charges très lourdes à l'encontre de ces trois journalistes : complot contre l'État, complicité... Cela fait très lourd, déplore Sadibou Marong, le directeur du bureau Afrique de RSF, joint par François Mazet de la rédaction Afrique. Peut-être que le parquet chercherait à faire sortir ces charges-là du champ de la loi, notamment la loi sur la presse qui met fin aux peines privatives de liberté pour certains délits de presse. »
« La place de ces journalistes n'est pas la prison »
« Dans tous les cas, on en saura davantage avec la nouvelle audition prévue. Mais il est clair que la place de ces journalistes n'est pas fondamentalement la prison. Nous connaissons très bien la pratique professionnelle d'Olivier Monodji, de son journal 'Le Pays'. Nous pensons qu'Olivier lui-même est un journaliste très équilibré. "Le Pays" aussi est un journal très équilibré. Nous souhaitons donc que l'audition aboutisse à leur libération et nous en profitons pour appeler les autorités tchadiennes à surtout permettre aux journalistes de faire leur travail sans crainte, ni surtout sans représailles », poursuit-il.
La société des journalistes de RFI a aussi réagi. Elle « rappelle aux autorités tchadiennes la nécessité du respect de la procédure pénale, des droits de la défense et des journalistes ». Côté syndical, la section SNJ-CGT de France Médias Monde (dont font partie RFI et France 24) note que les éléments du dossier communiqués à la Défense n'apportent « aucune preuve de crimes de cette gravité » et « condamne fermement » cette vague d'arrestation - Olivier Monodji ayant été arrêté en même temps que trois autres personnes dont deux journalistes. Le SNJ-CGT « espère » que dès ce jeudi 13 mars, « après l'audience » prévue « devant la justice tchadienne, nos confrères seront enfin libérés ».