Une affaire de détournement de cocaïne défraie la chronique ces derniers jours. L'histoire remonte à l'année dernière à Nosy Be. La gendarmerie a mis la main sur un gros paquet de cocaïne pesant 250 kg. La procédure veut que la marchandise soit brûlée. Mais entre la saisie et le moment fixé pour la mettre au feu, il ne restait plus que 110 kilos, comme par enchantement. Tout le monde s'est partagé le butin. À 66 euros (330 000 ariary) le gramme, la marchandise vaut à peu près 36 milliards ariary.
Avec une telle somme, on peut acheter beaucoup de silence. L'affaire a été presque classée, et rien ne laissait croire qu'elle allait rebondir. Entre-temps, les bénéficiaires ont mené grand train. Des smartphones haut de gamme pour tous les membres de la famille, des motos, de belles bagnoles. D'autres ont investi dans le transport fluvial en achetant un bac pour traverser. Le tout a fini par mettre la puce à l'oreille des observateurs et a ouvert les yeux des autorités judiciaires. Le dossier a été rouvert. Un officier de la gendarmerie, des gendarmes gradés et des policiers ont été mis en détention préventive à Tsiafahy.
Il s'agit d'une première répression d'une affaire de drogue. Jusqu'ici, la plupart des histoires de trafic de drogue finissent en queue de poisson. On annonce à grand renfort médiatique l'arrestation de trafiquants de drogue étrangers avec leur matériel, mais on a rarement entendu parler de l'issue d'un procès. L'année dernière, on avait annoncé l'arrestation à Nosy Be d'un baron de la drogue sri-lankais, recherché par toutes les polices du monde. Curieusement, il a été relâché sans explication claire et extradé au Sri Lanka. L'opinion a été interloquée. Aucune suite n'a été donnée à cette affaire.
Ailleurs, les histoires de trafic de drogue sont sévèrement punies, quelle que soit la quantité saisie. Certains pays appliquent la peine de mort aux trafiquants, d'autres la réclusion à perpétuité. Des peines lourdes, mais les bandits continuent leurs méfaits.
L'argent de la drogue alimente le marché du blanchiment de capitaux, l'immobilier et bien d'autres secteurs d'activité.
C'est un placement sûr, avec un risque amoindri de poursuites. C'est ainsi que de nouveaux hôtels, des appartements, des espaces, des villas... fleurissent comme des champignons dans une conjoncture difficile.
Mais les autorités semblent cette fois déterminées à sévir sans concession, à en juger l'issue de ce détournement de cocaïne. Une mission difficile quand on sait que la mafia ne recule devant rien. L'enjeu financier est énorme et la tentation est difficile à repousser pour les responsables civils et militaires chargés de traquer les trafics. Vu la conjoncture et les conditions précaires de travail des fonctionnaires, la corruption s'installe facilement face à la somme mirifique générée par la drogue.
Eh oui, le trafric bat son plein.