Lancer une discussion sur le rôle de la presse dans un contexte de 60-0. Tel était l'objectif de l'Institut Cardinal Jean Margéot (ICJM) en début de semaine. Plusieurs thématiques ont été abordées : l'indépendance des médias face au pouvoir, l'exode des journalistes vers des métiers mieux rémunérés, notamment dans le secteur public, la pertinence des éditoriaux, le rôle des jeunes lors des dernières élections, ainsi que la distinction entre les médias classiques et les nouveaux médias.
En somme, un dialogue intéressant où les divergences d'opinion n'ont pas entamé les ego, même si la discussion a été marquée par un incident survenu lors de la séance de questions et par le fait que le thème choisi n'était pas... central.
Indépendance ou proximité avec le pouvoir ?
Certains journalistes, «très critiques envers le gouvernement sortant avant les élections», selon un commentaire publié lors du live du débat lundi, occupent aujourd'hui des postes d'attachés de presse dans le nouveau gouvernement. En effet, pas moins d'une dizaine de journalistes issus de différentes rédactions, dont au moins six de l'express, ont fait le saut vers les ministères du nouveau gouvernement.
«L'express a récemment souligné qu'on avait vidé sa rédaction», a fait remarquer Finlay Salesse, directeur de l'information à Radio One. Il précise ne pas juger cette situation, mais souligne que les salaires attractifs des attachés de presse ainsi que les privilèges liés à la proximité avec un ministre ont probablement pesé dans ces décisions. «C'est le pactole, mais je ne porte aucun jugement», a-t-il ajouté. «Ces journalistes ont dû se distinguer pour être choisis...», a-t-il asséné.
Une autre perspective a été donnée par Alain Gordon-Gentil, nouveau directeur général de la Mauritius Broadcasting Corporation (MBC) : « Il faut dire que le privé paye très mal ses journalistes ! »
L'indépendance du journaliste face au pouvoir est un principe déontologique fondamental. C'est peut-être pour cette raison que Finlay Salesse a laissé transparaître une pointe d'ironie en évoquant les raisons et les circonstances ayant conduit à cet exode.
Il a mentionné une première vague de départs vers le secteur public, ajoutant que «d'autres seraient encore en attente». Profitant de l'occasion, il a lancé un appel : «Ne faites pas de la propagande, mais de l'information. »
La MBC Act stipule que la Mauritius Broadcasting Corporation doit «maintenir un haut niveau général, tant en termes de contenu que de qualité ; couvrir un large éventail de sujets ; et répondre aux aspirations, besoins et goûts de son public». Elle impose également à la chaîne de «veiller, dans la mesure de ses capacités, à ce que les bulletins d'information diffusés soient exacts et présentés de manière impartiale». « J'ai accepté un contrat d'un an, à condition d'avoir les mains libres », a déclaré Alain Gordon-Gentil.
Selon le journaliste Abdoolah Earally, l'activisme dans le journalisme mauricien prend une ampleur considérable. «Le titre D-ICTA-ture en Une de l'express était magnifique», a-t-il déclaré, en référence à la suspension des réseaux sociaux par l'ancien régime en novembre dernier. «Le journaliste a fait plus qu'informer», a-t-il ajouté. S'il comprend les exigences du métier, notamment après le rappel à l'ordre de la vieille garde journalistique, Earally estime néanmoins que «par moments, il faut aller au-delà de l'information».
L'universitaire Christina Chan-Meetoo, pour sa part, s'est interrogée sur la nécessité d'une chaîne de télévision privée, étant donné l'abondance de contenus en ligne, qu'ils proviennent des médias traditionnels ou des nouveaux médias, à la tendance plus activiste.