Piste d'une station-service. Les automobilistes ont-ils vraiment besoin d'un préposé, dûment en uniforme de la compagnie pétrolière, pour les «placer» dans le parking ? Déjà fatigué par les interminables embouteillages, ne peut-on s'épargner le «bonus» d'un énième énervement avec des questions aussi stupides qu'intrusives («ho aiza Ramose ?») dont la réponse tombe sous le (bon) sens. Que ferais-je à me garer là si ce n'est pas pour rejoindre la boutique dont l'existence commençait à me réconcilier avec le genre humain avant l'irruption dudit individu dont la présence envahissante n'a pour seul but que de grappiller un «mametraha kely» ?
Ni le meilleur aménageur de territoire, ni l'urbaniste le plus expert ne pouvaient décemment envisager, dans ces années 1950-1960 de paisible «civilisation», que les rues seraient un jour envahies et encombrées par cette multitude de taxibe, improvisation de «service public» dans les pires conditions d'improfessionnalisme du privé.
Des utilitaires conçus par des ingénieurs patentés pour une douzaine de places mais transformées en boîtes à sardines par le bricolage «sitrany ahay» du tiers-monde sans que compagnies d'assurance ou maréchaussée mouftent. Des anciens «arrêts d'autobus», à l'équidistance précisément calculée afin d'assurer la fluidité de la circulation, ne reste que le souvenir. Dorénavant, tout le monde veut «monter» devant sa porte et «descendre» sur son seuil.
Même naturellement enclavée, chaque maison veut être «accessible». Pour une meilleure cotation dans les «petites annonces» comme pour le confort au quotidien du primo-accédant à l'automobile. D'anciens sentiers piétons gagnent en largeur quitte à tutoyer le vide.
Pire, on voudrait que deux voitures puissent s'y croiser de front au forceps. C'est valable pour un raccourci entre Manakambahiny et Mahazoarivo comme pour la desserte au chausse-pied d'à Antsofinondry. Le passage alterné étant à l'automobiliste malgache ce qu'un scooter à échappement libre est à l'homme de Néandertal et ses presque humaines éructations, d'improbables bouchons se créent là où on pensait gagner du temps ; et de pénibles marche-arrière doivent être enclenchées à deux pas du pignon sur rue artificiellement «accessible».