Au Togo, des dizaines d'élèves dans le centre du pays ont été exclus pour avoir eu des rapports sexuels et avoir mis enceintes plusieurs filles de leur école.
Au Togo, 43 élèves de la région des Plateaux, dans le centre du pays, ont été exclus pour avoir eu des rapports sexuels et avoir mis enceinte plusieurs filles de leur établissement scolaire. Un élève de 6e figure même parmi les garçons exclus, dont la liste a été publiée par leur école.
Cette décision sévère suit une législation répressive qui prévoit des peines de prison à l'encontre des auteurs de grossesses en milieu scolaire, mais la loi vise les auteurs majeurs et non les élèves.
En excluant ces jeunes garçons, ne contredit-on pas l'esprit de la loi qui est pensée pour protéger les élèves contre les violences sexuelles ? Celle-ci prévoit des sanctions pénales à l'encontre d'adultes qui auraient des relations sexuelles avec des élèves, entrainant ou non une grossesse.
Respecter les droits des mineurs
Mais dans le cas de l'affaire de la région des Plateaux, il s'agit d'élèves mis en cause, dont la plupart sont mineurs. Car, si juridiquement, une sanction disciplinaire, décidée par l'établissement scolaire, est possible, celle-ci ne doit toutefois pas violer les droits fondamentaux des élèves.
Faridatou Brym, chargée de l'assistance des personnes victimes de violences basées sur le genre au Cacit, le Collectif des associations contre l'impunité au Togo estime que "l'exclusion en elle-même est une mesure qui a enfreint le droit fondamental à l'éducation des enfants. Ce droit qui est consacré par la Constitution togolaise en son article 16 en annexe et la Convention relative aux droits des enfants, en ces articles 28 et 29".
Des élèves stigmatisés qui risquent de se retrouver isolés
Au-delà de l'aspect légal, un autre problème se pose : la pression sociale et la stigmatisation. Les noms des élèves concernés ont été publiés, une situation qui pourrait les exposer à des jugements publics et à un isolement social.
Selon Faridatou Brym, "nous pouvons parler de l'exposition publique des noms, qui a ainsi porté une grave atteinte à la vie privée des enfants et à leur dignité, qui est fortement protégée par l'article 16 de la Convention relative aux droits des enfants. Nous savons très bien que les enfants méritent d'être protégés, les enfants méritent d'être éduqués, voire accompagnés. Ainsi, les rejeter n'est pas la bonne décision à prendre".
Faridatou Brym espère que la décision sera annulée. Mimi Bossou Soédjédé, de l'association Précieux trésor de vie, voit déjà les conséquences de la sanction infligée à des adolescents en construction, influencés par leur environnement et souvent livrés à eux-mêmes. "Il faut qu'on prenne la peine de s'asseoir pour réfléchir à cela, pour revoir la situation et penser à plutôt accompagner nos adolescents", assure-t-il.
La sexualité des adolescents, un sujet peu abordé
Emmanuel Sogadji de la Ligue togolaise des consommateurs constate lui aussi que "la problématique peut ne pas être résolue par l'unique idée de sanction, mais cela doit être un effort conjugué, aussi bien des enseignants, des parents d'élèves que de toutes les organisations de la société civile, traduit en matière de sensibilisation pour amener les enfants à prendre conscience des actes qu'ils posent".
En clair, une exclusion n'est pas la meilleure réponse pour ces jeunes.
Ce cas met en lumière un malaise profond autour de la sexualité des adolescents, avec un cadre législatif strict, des décisions disciplinaires parfois discutables et une pression sociale pesante.