Togo: Les grossesses précoces hypothèquent la scolarité des filles

Malgré une loi qui protège les apprenants au Togo, de nombreuses jeunes filles interrompent chaque année leur scolarité après être tombées enceintes.

Chaque année, au Togo, des milliers de jeunes filles tombent enceintes et sont ensuite souvent obligées d'interrompre leur scolarité, parfois définitivement. La loi exige pourtant qu'elles poursuivent leurs études durant leur grossesse, mais beaucoup de jeunes filles ne le font pas, victimes de la pression sociale et familiale.

"J'ai eu mon enfant au milieu de l'année. Il me restait deux mois pour aller à l'examen", explique Claire, une jeune fille mère. Elle a dû interrompre sa scolarité après sa grossesse. Elle a longtemps caché son état, par peur de la réaction de sa famille.

"Je n'ai pas eu le courage de le dire. Ma mère a remarqué que je n'étais pas bien. En tant que mère, elle a reconnu les symptômes et c'est là que j'ai été obligée de lui dire que j'étais enceinte. Elle a commencé à pleurer. Elle a appelé mon père pour le lui dire. Mon père, bien sûr, il a pété un câble", se souvient Claire.

Des lois sur la protection des étudiantes au Togo

Elle n'est pas un cas isolé. Selon des données officielles, entre 2020 et 2023, 8.631 grossesses ont été enregistrées en milieu scolaire au Togo. 2.025 cas au lycée, 6.080 au collège et 526 en primaire. Derrière ces chiffres, des milliers de jeunes filles dont l'avenir est brisé.

La juriste Michelle Aguey note que "c'est un phénomène préoccupant. La plupart du temps, on préfère un règlement à l'amiable. L'auteur de la grossesse n'est souvent pas du même âge que la jeune fille. On privilégie des discussions pour qu'il prenne en charge la fille et l'enfant. La pression sociale empêche l'application de la loi".

Pourtant, la loi est claire. Selon l'article 19 de la loi portant protection des apprenants, un homme majeur, qui met enceinte une élève mineure, encourt une peine d'emprisonnement d'un à cinq ans et une amende pouvant atteindre cinq millions de francs CFA. Mais dans la majorité des cas, aucune sanction n'est appliquée.

Des relations sexuelles avec une mineure passibles de prison

Odette N'Zonou est magistrate et elle rappelle que le seul fait d'avoir des relations sexuelles avec une mineure est pénalisable. Selon elle, "appliquer la loi, c'est essentiel. Si vous avez des relations suivies avec une jeune fille, vous pouvez faire l'objet de poursuites, être déféré, aller en prison. Vous pouvez être condamné à payer des dommages et intérêts".

L'application de la loi demeure donc limitée, elle cède même devant la pression sociale. Pendant ce temps, des milliers de jeunes filles, chaque année, voient leur scolarité interrompue, tandis que les responsables restent, bien souvent, impunis.

Face à cela, renforcer les cours d'éducation sexuelle, encore trop peu nombreux, pourrait permettre de mieux encadrer la sexualité des adolescents.

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