À Madagascar, le Grand Sud de l'île, habituellement en proie à la sécheresse et la famine, vient de subir à quinze jours d'intervalle, deux phénomènes météorologiques intenses. Un cyclone suivi d'une tempête tropicale, qui ont fait neuf morts, et laissent plus de 115 000 sinistrés plus que jamais livrés à eux-mêmes. Le retrait récent de l'aide américaine, a stoppé net plusieurs dizaines de projets. Aujourd'hui, l'ONG Action contre la faim, qui intervenait massivement dans cette zone et qui a dû interrompre, elle aussi, plusieurs programmes, alerte sur le manque de financement pour répondre à l'urgence de la situation.
Harisoa a tout perdu. La maison de cette vendeuse ambulante de thé et de café d'Antanambao, commune d'Ampanihy, n'a pas résisté au deuxième assaut météorologique, vendredi dernier. Avec les 7 membres de sa famille, la quadragénaire a trouvé refuge dans une école, transformée en centre d'accueil pour sinistrés.
« Notre toit s'est envolé avec le vent pendant la nuit. L'intérieur de ma maison a été ravagé. Mon thermos s'est cassé. On n'a plus d'habits, plus rien. On a perdu toutes les affaires d'école des enfants. Ils souffrent. On n'a pas de nourriture. Je n'ai plus de travail pour gagner de l'argent. On implore de l'aide, urgemment, parce qu'on est épuisés », explique-t-elle.
Épuisés et dépassés par cette situation totalement inhabituelle. Ces deux événements cycloniques ont frappé une zone qui a connu une longue période de sécheresse de septembre à janvier. Difficile de prévoir encore aujourd'hui quels seront les effets de ces pluies qui se sont abattus brutalement et dans des volumes importants - 80 mm en 24h - sur ces terres desséchées. Les nappes phréatiques auront-elles eu le temps de se remplir ? Les récoltes des champs inondés sont-elles détruites ? Y a-t-il un risque d'insécurité alimentaire pour ces populations ?
Arrêt des financements américains
Sur place, les équipes de Grégoire Brou, directeur pays d'Action contre la faim (ACF) à Madagascar sillonnent les centres de sinistrés des régions Atsimo Andrefana, Anosy et Androy pour porter assistance aux populations. Distribution de kits de première nécessité avec ustensiles de cuisine, nourriture, soutien psychologique, soins de santé de base. Seulement, les humanitaires sont eux-aussi bien démunis.
« Tout ça intervient dans un contexte d'arrêt des financements américains, du jour au lendemain, où on a été obligés de diminuer notre présence opérationnelle dans le Grand Sud et dans le Sud-Est de Madagascar, avec notamment la fermeture de deux bases d'Action Contre la Faim. Et la conséquence, c'est l'arrêt d'activités essentielles pour les populations malgaches, à savoir quatre de nos cliniques mobiles qui prenaient en charge les patients sur tout un tas de pathologies. On a dû cesser aussi la prise en charge des enfants malnutris aigus sévères avec complications. Ça concerne 3 000 enfants qui ne vont plus être assistés. Et enfin, c'est un stop brutal à l'assistance alimentaire que l'on organisait via des transferts monétaires. Là, ce sont 35000 personnes qui sont impactées. »
En l'espace d'un mois, Action contre la faim qui intervient sur la Grande Ile depuis 2012 a perdu 42% de son budget. Quant à l'Alliance Urgence de Madagascar, 6 des 9 ONG internationales humanitaires qui la composent Action contre la faim sont, elles aussi, très fortement impactées par l'arrêt des financements du gouvernement américain de Donald Trump.