Namibie: Netumbo Nandi-Ndaitwah, première présidente de Namibie, symbole pour les femmes politiques africaines

Netumbo Nandi-Ndaitwah, première présidente de Namibie

Ce vendredi 21 mars, Netumbo Nandi-Ndaitwah devient officiellement la première femme présidente de la Namibie. Son élection, bien que contestée par l'opposition, fait d'elle la sixième femme à accéder à la magistrature suprême en Afrique, rejoignant ainsi des figures telles qu'Ellen Johnson Sirleaf au Liberia, Joyce Banda au Malawi et Samia Suluhu Hassan en Tanzanie. Cette ascension historique met en lumière les nombreux obstacles que les femmes africaines doivent surmonter pour accéder aux plus hautes fonctions politiques.

Netumbo Nandi-Ndaitwah, 72 ans, est la première femme présidente de la Namibie. « C'est à la fois une avancée significative et un symbole qui peut sembler creux », lance Thoko Matshe, féministe sud-africaine, à propos de l'arrivée au pouvoir de Netumbo Nandi-Ndaitwah.

« Son élection relève davantage des dynamiques politiques namibiennes que d'un véritable tournant vers une présence accrue des femmes à la tête des États africains », poursuit cette militante de longue date, ancienne fondatrice de l'association de femmes africaines Akina Mama wa Afrika au Royaume-Uni et de l'Unité de soutien aux femmes en politique (WiPSU) au Zimbabwe.

En filigrane, Thoko Matshe pointe les tensions qui ont entouré l'élection de Netumbo Nandi-Ndaitwah, marquée par des accusations d'irrégularités formulées par l'opposition après le scrutin du 27 novembre. Mais bien avant d'affronter les urnes, la candidate a dû s'imposer au sein même de son parti, le SWAPO, lors d'un congrès particulièrement disputé.

Des primaires tendues

D'ordinaire, ces congrès du SWAPO se déroulent dans un climat de continuité, où la transition du vice-président à la présidence s'est généralement effectuée de manière fluide et prévisible. Pas cette fois. Netumbo Nandi-Ndaitwah a dû faire face à une compétition acharnée, plusieurs figures du parti contestant sa légitimité.

« Certaines de ces difficultés étaient clairement liées au fait qu'elle soit une femme, analyse Thoko Matshe. La nature et la structure du pouvoir en Afrique restent profondément patriarcales. Lorsque des femmes parcourent les couloirs du Parlement et qu'on les appelle "ma chérie" ou des choses similaires, cela leur retire leur pouvoir. »

Les limites des quotas de représentation

Sur le continent, des quotas ont été mis en place par l'Africa UN Women pour assurer la présence féminine dans les cercles de pouvoir. Cependant, ces mesures peuvent avoir des effets pervers, comme l'explique Sakhile Sifelani-Ngoma, directrice exécutive du WiPSU au Zimbabwe : « Les partis politiques ne ressentent plus le besoin de pousser des femmes à "briguer" des sièges au scrutin direct car leur présence au Parlement est "assurée" par ces quotas. Les candidates sont cantonnées à ces sièges, réduisant leurs chances d'accéder à des postes plus influents. »

Des obstacles persistants

Cette situation s'est manifestée au Zimbabwe. Malgré une vice-présidente, Joyce Mujuru, le pays n'a jamais eu de femme présidente. Dans certains pays, les candidates sont activement empêchées de se présenter, comme l'explique Nic Cheeseman, politologue et auteur du livre Démocratie en Afrique (*).

« Certaines femmes politiques ont été séquestrées par leurs maris pour les empêcher de s'inscrire aux élections. D'autres ont été délibérément induites en erreur par leur propre parti, envoyées dans des lieux de vote erronés lors des primaires, tandis que les véritables élections se déroulaient ailleurs, indique ce professeur de Sciences politiques à l'université de Birmingham. Et une fois en campagne, elles sont souvent accusées de prostitution, simplement parce qu'elles sont vues tard lors de réunions avec des hommes, une étape pourtant essentielle dans la course électorale. »

La violence politique et le harcèlement ne s'arrêtent pas là. « Dans le travail que nous faisons, nous suivons de près les discours de haine dirigés contre les femmes qui se présentent aux élections, explique Sakhile Sifelani-Ngoma. L'un des constats récurrents de nos rapports est que les femmes candidates sont confrontées à cinq fois plus de discours haineux que leurs homologues masculins. »

Des réformes structurelles nécessaires

Selon un récent rapport des Nations unies, au rythme actuel, il faudra encore 130 ans pour atteindre la parité dans les décisions politiques au plus haut niveau. « Les conditions dans lesquelles les femmes concourent pour des postes de leadership sont d'une extrême adversité », poursuit Sakhile Sifelani-Ngoma.

Les experts s'accordent à dire que des réformes structurelles profondes sont nécessaires. Il ne suffit pas d'instaurer des quotas ; il faut également changer les mentalités et les pratiques au sein des partis politiques et de la société dans son ensemble.

« Lorsqu'une femme comme Son Excellence Netumbo Nandi-Ndaitwah parvient à atteindre le sommet, cela signifie qu'elle a dû surmonter d'innombrables obstacles, ajoute Sifelani-Ngoma. On ne peut pas sous-estimer les barrières sociales, culturelles et économiques qui freinent l'accès des femmes aux hautes fonctions. Donc, en arriver là, c'est un exploit en soi. »

(*) Nic Cheeseman, Democracy in Africa Successes, Failures, and the Struggle for Political Reform, Cambridge University Press.

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