Le gouvernement malgache se prêterait-il à un exercice de transparence au sujet de la vanille ? Certains veulent y croire. La semaine passée, le Conseil des ministres a présenté des chiffres sur sa filière et ils ne sont pas très bons. 2 000 tonnes de surstocks dont la moitié basée à l'étranger, pour une demande mondiale, l'an dernier, estimée à environ 3 000 tonnes.
L'offre en gousse noire malgache s'annonce colossale cette année, bien au-dessus de la demande mondiale. La vanille préparée pourrait, elle, s'échanger à 20 dollars le kilo, quand elle flirtait avec les 700 dollars en 2018.
Pour réduire les effets de ces fluctuations, les autorités ont annoncé des mesures. Depuis cinq ans, le gouvernement promet un assainissement de sa filière phare. La liste tant attendue des exportateurs agréés pour cette nouvelle campagne est encore « en cours de vérification ». Cette liste est censée évincer les opérateurs qui n'ont pas respecté les règles du jeu, lors des précédentes campagnes. La tension est à son comble... et les pressions aussi.
« La professionnalisation de la filière requerra une prise de responsabilité des parties prenantes pour garantir la durabilité de la filière vanille », souligne David Ralambofiringa, ministre de l'Industrie et du Commerce, en déplacement aux États-Unis pour discuter de l'Agoa. Si la gousse noire n'est pas officiellement à l'ordre du jour des rencontres, elle n'en reste pas moins un sujet majeur, confirme le ministre, entre les Malgaches et les Américains, les plus gros acheteurs mondiaux de l'épice.
Dans les tuyaux, également, pour améliorer le secteur : un prix plus juste payé aux planteurs. Le Sustainable Vanilla Initiative (SVI), lobby des acheteurs internationaux de la vanille, avait d'ailleurs, lui aussi, poussé pour que le prix export permette d'assurer un revenu décent aux paysans.
En 2019, le tarif de 50 000 ariary le kilo de vanille verte avait fait consensus. Aujourd'hui, dans les campagnes, les prix annoncés aux planteurs sont plutôt autour des 3 000 ariary, moins de 1 dollar. « Je ne peux pas parler au nom de tous mes collègues, mais en tout cas pour ceux qui font du développement durable, payer 3 000 ariary est indécent » lâche Georges Geeraerts, président du Groupement des exportateurs de vanille de Madagascar.
« C'est moins que les tomates alors que l'on a affaire à un produit qui nécessite de grandes surfaces, beaucoup de soins et des années d'attente avant de produire. Pour le bien de la filière et son futur développement, il faut absolument redresser ce prix minimum qui a déjà fait l'objet de nombreuses études et sur lequel beaucoup de gens s'accordent. », ajoute le président du Groupement des exportateurs de vanille de Madagascar.
Rassurer les marchés
Rassurer les marchés sur la qualité intrinsèque du produit et sa durabilité, montrer que des chantiers sont en cours, comme la recherche des sources de contaminants de la gousse, après les découvertes de traces de nicotine sur des gousses ou d'huiles minérales : voilà la stratégie adoptée en ce moment par Madagascar.
Mais il faut aller encore plus loin, soutient Georges Geeraerts : « Il y a un travail à faire sur des marchés émergents. L'Asie et le Moyen-Orient pourraient être intéressés par le produit vanille. Et je pense que ce sont sur ces axes, à moyen et long terme, qu'il faut absolument travailler. »
Fin avril, un symposium international sur la vanille - le premier, depuis quatre ans - sera organisé à New York. À la une des discussions, un grand état des lieux du secteur et de la production de vanille sous serre. Aucun Malgache n'a été invité. Malgré les soubresauts dans la filière, la Grande Île reste le premier producteur mondial de l'épice.