Congo-Kinshasa: Ce gouvernement d'union nationale qui... divise

analyse

Le président Félix Tshisekedi l'avait promis le 22 février 2025. Les choses commencent à se mettre en place petit à petit.

En effet, devant les membres de l'Union sacrée de la Nation, parmi les solutions préconisées pour sortir la République démocratique du Congo du pétrin, le président congolais avait suggéré la formation d'un gouvernement d'union nationale. L'objectif est que les Congolais se serrent les coudes face à l'ennemi commun, le mouvement du 23 mars et son parrain rwandais.

Quatre semaines plus tard, les choses semblent prendre forme. Les consultations pour ce gouvernement ont débuté le lundi 24 mars dernier, sous la direction du conseiller spécial du chef de l'État en matière de sécurité, Espoir Masamanki.

Cette rencontre est ouverte à quatre catégories d'acteurs sociopolitiques : la majorité parlementaire issue de l'Union sacrée de la nation, les partis d'opposition (parlementaires et extraparlementaires), la société civile dans toute sa diversité, incluant les confessions religieuses, ainsi que des personnalités indépendantes ou figures marquantes de divers secteurs. Pour le moment, il s'agit d'une concertation entre les affidés de Félix Tshisekedi, puisque seuls les leaders de la majorité présidentielle ont été consultés. Et pour cause, la maison Tshisekedi est elle-même divisée. Pourtant, avant de rassembler les autres, il faut d'abord s'unir dans sa propre famille politique.

On peut se demander si les consultations ne vont pas s'arrêter à la majorité présidentielle, étant donné que l'opposition ne semble pas prête à engager ces discussions. En effet, selon les opposants, la charrue est mise avant les boeufs, ce qui serait une perte de temps. Cette opposition priorise les consultations initiées depuis février par les religieux.

Même si l'union fait la force, il y a sans doute plus urgent que de former un gouvernement d'union nationale. On se demande en quoi cette nouvelle coalition va changer la donne sur le terrain, après les chutes successives de Goma, de Bukavu et aujourd'hui de Walikale. Walikale, que les rebelles prétendaient avoir quitté, mais où ils sont vraisemblablement toujours présents.

Ce qui risque de se passer, comme c'est souvent le cas, c'est un nouveau partage du gâteau national entre les politiciens professionnels de Kinshasa, qui se distribuent des émoluments mirobolants et des prébendes, pendant que le citoyen lambda croupit dans une misère crasse et que les Forces de défense et de sécurité n'ont parfois pas le strict minimum pour faire face à l'ennemi. Qui plus est, avec ces gouvernements pléthoriques auxquels la République démocratique du Congo nous a maintenant habitués. Rappelons que la présente équipe est forte de 54 ministres, résultat de la coalition élargie qui a permis à Félix Tshisekedi de briguer un nouveau mandat à la tête du pays. On craint que le gouvernement en gestation soit de la même envergure, voire pire, avec ce que cela comporte comme charges de fonctionnement, au moment où le train de vie de l'État doit être réduit pour parer à l'essentiel.

Nous en sommes là. Félix Tshisekedi, qui semble dépassé par les événements, se lance dans des initiatives oiseuses pendant que les rebelles du M23 poursuivent leur avancée dans l'Est du Congo.

On se demande qui pourra les faire entendre raison et surtout observer un cessez-le-feu pour donner une véritable chance aux tractations en cours pour une solution négociée à ce nouveau conflit qui endeuille cet éternel géant au pied d'argile qu'est la République démocratique du Congo.

Ces tractations pour la formation du gouvernement se tiennent alors que le sommet en visioconférence des chefs d'État et de gouvernement de la Communauté de l'Afrique de l'Est (EAC) et de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), tenu le 24 mars dernier, a livré son verdict. Selon le communiqué final, la nouvelle équipe de facilitateurs se compose comme suit : Uhuru Kenyatta (Kenya), Sahle-Work Zemde (Éthiopie), Catherine Samba-Panza (République centrafricaine), Olusegun Obasanjo (Nigeria) et Kgalema Motlanthe (Afrique du Sud).

Un nouveau quintette pour les négociations. On ne peut que leur souhaiter bonne chance, tant les positions sont tranchées et les intérêts énormes. On se demande s'ils auront plus de chance que le président angolais, João Lourenço, qui vient de jeter l'éponge de la médiation après avoir oeuvré pendant deux ans pour faire asseoir autour de la même table Félix Tshisekedi et son homologue rwandais, Paul Kagame.

AllAfrica publie environ 500 articles par jour provenant de plus de 110 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.