Après une période de régénération observée, à la suite des confinements ayant limité les activités nautiques et touristiques en raison du Covid-19, la situation semble à nouveau se détériorer. Cette régénération demeure fragile et dépend étroitement des conditions environnementales. En février, les membres de l'Association des pêcheurs et enfants des pêcheurs ont commencé à observer des signes préoccupants dans le lagon de Bel-Ombre, ce qui a conduit à la réalisation d'un survey qui a confirmé que le blanchissement affectait de nouveau les coraux.
Selon Sakel Fokeer, secrétaire de l'association, «environ 90 % des coraux seraient touchés». Les espèces les plus affectées sont les coraux branchus du genre Acropora, appelés localement corail gingembre, ainsi que l'Acroporacytherea, des coraux en forme de plateaux, particulièrement vulnérables au stress environnemental, expliquet-il.Certains types de coraux semblent toutefois plus résistants. Ce blanchissement entraîne des conséquences directes sur la faune marine. «Les poissons vivent dans ces coraux. Quand ils blanchissent, les poissons sont souvent obligés de se déplacer», souligne-t-il.
Face à cette situation, l'association poursuit ses efforts de sensibilisation à la protection des récifs, particulièrement auprès des jeunes, à travers des compétitions et diverses activités éducatives. «Nous faisons avec les moyens dont nous disposons, mais nous continuons à collecter des données sur le terrain et à alerter sur l'état des coraux», ajoute Sakel Fokeer. Malgré des ressources limitées, l'association reste mobilisée pour encourager la préservation du milieu marin.
Stress thermique
Pour sa part, l'oraganisation non gouvernementale Reef Conservation a lancé un Coral Bleaching Alert sur sa page Facebook, affirmant que «l'océan autour de l'île Maurice se réchauffe, avec des températures dépassant 31°C dans certaines zones, bien au-dessus de la température moyenne de la surface de la mer. Cette chaleur extrême est à l'origine d'un blanchissement généralisé des coraux qui met gravement en péril nos écosystèmes marins». Elle rappelle que «les récifs coralliens sont essentiels à la vie marine, à la protection des côtes et aux moyens de subsistance locaux. Lorsque les coraux blanchissent, ils expulsent les algues (zooxanthelles) qui vivent dans leurs tissus et leur fournissent de l'énergie. Les coraux deviennent blancs et se retrouvent affaiblis, vulnérables et menacés de mort».
Selon un rapport de l'Agence française de développement publié ce mois-ci sur le blanchissement des coraux, une étude de 34 846 enregistrements sur 14 405 sites dans 93 pays entre 1980 et 2020 révèle que les événements de stress thermique, tels que les canicules marines, ont provoqué un blanchissement généralisé des coraux. Souvent réversible, ce phénomène permet aux coraux de retrouver de nouveaux symbiotes une fois le stress passé, illustrant leur résilience ou le «blanchissement adaptatif».
Cependant, des canicules prolongées peuvent être irréversibles, comme en 2016, lorsqu'un événement El Niño a causé la mort de 30 % des coraux de la Grande barrière de corail au large de la côte nord-est de l'Australie. Cela entraîne des pertes écologiques et économiques majeures, notamment pour le tourisme et la pêche.
En plus du stress thermique, d'autres facteurs tels que la pollution de l'eau, les pratiques de pêche des tructrice set l'augmentation de la sédimentation contribuent également à l'affaiblissement des coraux et à l'intensification du blanchissement. Toutefois, «sans une réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre, les vagues de chaleur continueront de s'intensifier, menaçant irrémédiablement la survie des récifs coralliens d'ici 2050», est-il soutenu dans le rapport.