Ile Maurice: Safe City - Sur 300 caméras de surveillance du trafic, 143 installées

Le projet Safe City, qui suscite de nombreuses critiques, demeure toujours inefficace. Sur les 300 caméras d'Intelligent Traffic Surveillance (ITS) qui devaient être installées, seules 143 l'ont été. Selon l'avocat et politicien Neelkanth Dulloo, ce gaspillage des fonds publics est inacceptable. Pour lui, ce projet a non seulement échoué à atteindre ses objectifs, mais il a aussi englouti des milliards de roupies, avec des résultats bien en deçà des attentes.

Sous la tutelle du bureau du Premier ministre, le projet Safe City a été lancé en 2017 par l'ancien gouvernement. Son objectif était d'améliorer la qualité de vie des citoyens en luttant contre la criminalité et la prolifération de la drogue, tout en contribuant à une gestion plus efficace du trafic et de la sécurité routière. Cependant, des lacunes importantes dans la gestion des contrats ont été observées.

«Les fonctionnalités telles que le bookmarking Enterprise/Enhanced Long Term Evolution (eLTE), l'authentification IVS (NdlR, Intelligent Video Surveillance), la déportation des alarmes sur la plateforme IVS et la couverture réseau, n'ont pas encore été mises en place», peut-on lire dans le rapport.

Un des principaux objectifs du projet était d'améliorer la sécurité routière avec les caméras ITS, capables de détecter les infractions routières grâce à un système intégré de reconnaissance automatique des plaques d'immatriculation et d'émettre des contraventions. «Cependant, cet objectif n'a pas été atteint, ce qui signifie que l'investissement n'a pas été rentable», dit le rapport.

Peu de cas ont été élucidés depuis l'année financière 2021- 2022. En 2021-2022, ce projet a coûté Rs 814,8 millions, mais seulement 355 cas ont été résolus, tandis que 11 287 restent encore en suspens. En 2022-2023, une légère amélioration a été notée, avec 529 cas élucidés, mais 13 311 restent en attente. Cette année-là, Rs 854,4 millions ont été nécessaires pour financer ce projet.

En 2023- 2024, bien que l'investissement ait augmenté à Rs 872,4 millions, seuls 487 cas ont été résolus, et 12 341 sont toujours en suspens. Entre les années financières 2021-2022 et 2023-2024, un total de Rs 2,5 milliards a été dépensé pour les services Safe City. Le nombre de cas résolus grâce aux caméras du projet reste faible par rapport au nombre total de cas criminels en attente. Le pourcentage de cas résolus n'a varié que de 3,1 % à 4 %.

La police est ainsi directement pointée du doigt dans le rapport pour son manque de supervision et de suivi du projet Safe City. Selon le rapport, au début du projet, toutes les caméras devaient être installées le long de l'autoroute, mais en raison de nouvelles exigences, cela a dû être réévalué.

Retard de cinq ans

Alors que le projet de Safe City devait être complètement opérationnel en juin 2019, on note qu'à novembre 2024, il n'avait toujours pas été totalement mis en service. Ce qui fait un retard de cinq ans dans l'implémentation complète du projet. Il a été partiellement mis en service à partir de janvier 2021.

En décembre 2017, la police a signé deux contrats de location avec une entreprise de télécommunications pour les services Safe City, pour un montant total de USD 456 millions. Un an plus tard, en octobre 2018, un autre accord a été conclu avec la même entreprise pour la fourniture de poteaux, ajoutant un coût supplémentaire de USD 9,2 millions. Ces contrats de location s'étendent sur 20 ans, pour un total de USD 465,2 millions en charges locatives. De 2017-2018 à 2023- 2024, les paiements pour le projet Safe City ont atteint Rs 3,9 milliards.

Pour l'avocat Me Dulloo, le projet Safe City n'a rien apporté au gouvernement et ne rapportera rien. «C'est uniquement un outil pour surveiller les gens», dit-il. Il avance que depuis la campagne électorale de 2019, l'attention s'était portée sur le projet Safe City, mais aussi sur les caméras utilisées pour ce projet. «Il est malheureux que ni la police ni Mauritius Telecom ne soient venus expliquer à quoi servent les caméras utilisées sur les big handle», dit-il.

Dans cette même logique, il indique avoir déposé un recours en cour concernant les données biométriques de la carte d'identité nationale, qui, selon lui, n'ont pas le droit d'être détenues sur une base de données. Après deux jugements de la cour stipulant que les données biométriques ne doivent pas être sauvegardées, il soutient que, jusqu'à présent, les données biométriques sont prises lorsqu'une personne souhaite obtenir sa carte d'identité.

Pour lui, les caméras Safe City peuvent, si les données biométriques ne sont pas effacées, utiliser ces données pour suivre une personne. Il demande au gouvernement de venir expliquer à la population l'usage des caméras Safe City. Il craint également qu'avec l'intelligence artificielle, les images enregistrées par les caméras puissent être modifiées, comportant ainsi des risques. Le rapport indique que les enregistrements ne demeurent que 30 jours. Mais pour Me Dulloo, cela n'est pas le cas. Il demande que des preuves soient apportées à ce sujet.

Cependant, pour l'avocat, la population ne pourra pas porter plainte pour la mauvaise gestion des fonds publics. Il explique que les rapports de l'audit avant l'Indépendance sont décriés jusqu'à aujourd'hui. «Les dénonciations sont une perte de temps car il n'y a pas de suivi», dit-il, ajoutant qu'il n'existe pas de cadre légal pour accompagner ces rapports, ni pour définir le pouvoir du Public Accounts Committee en matière de plaintes et de doléances.

«C'est pour cette raison que le gouvernement présentera une Public Inquiries Act. Ce nouveau projet de loi inclura un conseil permanent et indépendant, et je crois qu'avec ce conseil, les gens pourront déposer leurs plaintes, ce qui mènera à des enquêtes.» Dans la même veine, il souligne que le programme du gouvernement propose la Public Interest Litigation qui, dit-il, associée à la Public Inquiries Act et à la Freedom of Information Act, pourrait voir le jour. Il avance que dans une démocratie, chaque personne a le droit de poser des questions.

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