Le département d'État américain a annoncé mardi 2 avril que l'homme d'affaires Massad Boulos, proche de Donald Trump se rendra à partir de jeudi en RDC, au Rwanda, au Kenya et en Ouganda. Il sera accompagné d'une diplomate de haut rang, Corina Sanders, et y « rencontrera des chefs d'État et des chefs d'entreprise pour faire avancer les efforts en vue d'une paix durable » dans l'est de la RDC et pour « promouvoir les investissements du secteur privé américain dans la région ». L'homme d'affaires libano-américain, discret et au profil controversé, hérite du dossier africain à la Maison Blanche. Une nomination stratégique - mais contestée - qui semble s'appuyer davantage sur ses réseaux familiaux que sur une véritable expertise diplomatique.
Massad Boulos est né au Liban, dans une famille grecque orthodoxe influente originaire de Kafaraka, un village du nord du pays réputé pour sa production d'huile d'olive. Après des études en administration des affaires au Texas, il s'installe en Afrique de l'Ouest, où il prend la tête de SCOA Nigeria, une entreprise spécialisée dans la vente, la location et l'entretien de véhicules.
C'est un homme d'affaires discret... Tellement discret que son profil public ne colle pas toujours à la réalité. Souvent présenté comme un magnat milliardaire, Boulos dirige en réalité une société qui, selon le New York Times, n'a généré que 66 000 dollars de bénéfices l'an dernier. Sa fortune viendrait surtout de son épouse, héritière d'un empire familial actif en Afrique centrale. Quant à son influence à Washington, elle tient sans doute à un autre lien capital : il est le beau-père de Tiffany Trump, l'une des filles du président américain.
Conseiller pour le Moyen-Orient, il hérite désormais du dossier africain
Déjà conseiller de Donald Trump pour les pays arabes, il a récemment servi d'intermédiaire entre le président américain et Mahmoud Abbas, le chef de l'Autorité palestinienne. Il hérite désormais du dossier africain -- une fonction qui, comme d'autres postes de conseillers à la Maison Blanche, ne requiert pas de validation par le Sénat.
Alors pourquoi lui ? Officiellement, pour son carnet d'adresses. Massad Boulos aurait joué un rôle clé dans la stratégie de Donald Trump visant à séduire l'électorat arabo-américain lors des dernières élections. Un atout politique, selon ses proches. Mais une nomination qui, pour ses détracteurs, s'explique avant tout par ses liens familiaux.
« Massad Boulos est vraiment un personnage louche », tranche Scott Lucas, professeur de politique internationale au Clinton Institute de l'Université de Dublin, interrogé par RFI. « Il a laissé entendre - ou affirmé - qu'il dirigeait un empire de plusieurs milliards, alors qu'il gère en réalité une entreprise de camions au Nigeria, valorisée à moins d'un million de dollars. »
Autre source de scepticisme : son parcours. « Cette idée qu'il serait un brillant avocat ? Il n'a même jamais fait d'études de droit. Aucune formation juridique. Aucun passé diplomatique non plus. » Et pourtant, poursuit l'analyste, « on le présente comme l'homme capable de résoudre un conflit aussi complexe que celui entre Israël et le Liban. Ce n'est tout simplement pas crédible. »
Derrière cette nomination, se dessine la stratégie d'un président qui mise sur la loyauté et les réseaux familiaux pour mener sa politique étrangère, quitte à faire fi de l'expérience diplomatique.