La justice européenne a déclaré jeudi 3 avril irrecevable une série de questions de droit transmises par le tribunal correctionnel de Paris dans le cadre de la procédure pour homicides involontaires contre la compagnie espagnole Swiftair après le crash de l'avion d'Air Algérie en 2014 au Sahel.
Initialement, la compagnie espagnole, propriétaire de l'avion qui s'est écrasé, entraînant la mort de 116 personnes, devait être jugée en octobre 2023 à Paris. Mais le tribunal correctionnel avait transmis en juillet 2023 à la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) quatre questions préjudicielles, soulevées par la défense de la compagnie.
En cause, la question de l'applicabilité du principe du non bis in idem, selon lequel nul ne peut être poursuivi ou puni deux fois pour les mêmes faits. La compagnie, ayant bénéficié d'un non-lieu à l'issue d'une enquête en Espagne, se pose la question de savoir si elle peut être jugée en France.
Dans un arrêt rendu jeudi, la CJUE a jugé la demande, qui regroupait les quatre questions préjudicielles, irrecevable. Le tribunal correctionnel « conserve toutefois la faculté de soumettre une nouvelle demande de décision préjudicielle contenant l'ensemble des éléments permettant à la Cour de statuer », souligne la CJUE dans son arrêt.
Un « risque de retard dans la tenue d'un procès »
Jointe par l'AFP, l'avocate de la compagnie, Me Rachel Lindon, a dit regretter cette « non-réponse de la Cour de justice » de l'Union européenne. Quant à savoir si la compagnie entendait soulever de nouveau des questions préjudicielles, elle a jugé qu'il serait « prématuré » d'y répondre.
Me Sébastien Busy, avocat des associations AH5017-Ensemble et Fenvac, a lui jugé l'arrêt de la CJUE « décevant », et une situation qui « risque de retarder une fois de plus la tenue d'un procès » si Swiftair décide de nouveau de soulever des questions préjudicielles.
116 passagers morts dans le crash
Le vol AH5017 d'Air Algérie s'est écrasé le 24 juillet 2014 en plein Sahel, dans le nord du Mali. Dans l'accident de cet avion qui effectuait un vol Ouagadougou-Alger sont morts 116 passagers - dont 54 Français, 23 Burkinabè, des Libanais, des Algériens - et six membres d'équipage, tous Espagnols. Swiftair était la propriétaire de l'aéronef qu'elle avait loué, avec l'équipage, à Air Algérie.
À l'issue des investigations, les juges d'instruction français avaient estimé que « divers manquements de la part de la compagnie » avaient joué un rôle dans l'accident, en particulier une « formation lacunaire » de l'équipage qui ne lui avait « pas permis » de « réagir de manière adaptée et d'éviter l'accident ». Au contraire, la compagnie fait valoir que l'accident résulte d'une combinaison de facteurs extérieurs.