Ile Maurice: Le PM refuse de valider les dépenses de son prédécesseur

Les consultations pré-budgétaires 2025- 2026 ont été officiellement lancées, le 3 avril, au Sir Harilal Vaghjee Hall par le Premier ministre et ministre des Finances, le Dr Navin Ramgoolam.

Cet exercice stratégique vise à permettre aux parties prenantes de partager leurs idées en marge de la préparation du budget national. Le ministère des Finances consultera les chefs d'entreprise, les associations, les organisations non gouvernementales et les représentants de la société civile pour recueillir leurs propositions.

Le Dr Navin Ramgoolam a abordé le contexte dans lequel se déroule la préparation du prochain budget. «Il est important de prendre conscience de la situation et des enjeux. Ils sont nombreux à ne pas réaliser à quel point le pays est en difficulté. La situation est pire que catastrophique. (...) Non seulement la caisse est vide, mais il y a aussi une dette...massive : Rs 644 milliards, soit plus de 90 % du PIB. (...) Le déficit budgétaire est de 9,3 %. Ce n'est pas soutenable.»

Le Premier ministre a également souligné que lorsqu'il y a un léger décalage dans les prévisions budgétaires, un Supplementary Appropriation Bill doit être soumis et approuvé par le Parlement. Toutefois, pour l'année financière 2022-2023, des dépenses supplémentaires de Rs 2,5 milliards ont été engagées sans jamais être présentées au Parlement. «Mais moi, je ne vais pas l'approuver. Je ne vais pas valider des dépenses que je n'ai pas effectuées.»

Il a aussi parlé du dernier rapport de l'audit, qui est accablant. «Zot finn depans kas ki pa pou zot. Gaspiyaz extraordiner.» Il qualifie la gestion des finances publiques par l'ancien régime d'irresponsable. Pour l'année 2023-2024, le rapport de l'audit révèle un excédent de dépenses de Rs 2,8 milliards mais sa publication reste une formalité, sans suivi concret. Il insiste sur la nécessité de sanctions et d'une gestion plus rigoureuse. «Il faut corriger les erreurs et éviter de dépenser ce que nous n'avons pas.»

Une des réformes majeures récemment introduites est le Performance Based Budgeting, a-t-il fait ressortir, qui oblige les ministères à rendre des comptes en fonction des résultats obtenus et non en fonction des fonds alloués. «Par exemple, le ministère de la Santé dispose d'un budget de Rs 17 milliards mais la majorité des Mauriciens préfèrent les cliniques privées en raison du manque de performance dans le secteur public.» Il a insisté sur la nécessité d'un suivi efficace au bureau du Premier ministre, soulignant que l'absence de suivi est un problème majeur à Maurice.

Le modèle économique basé sur les allowances, défendu par l'ancien régime, ne pourra plus perdurer. «Il faut une rupture avec le passé», a affirmé le Premier ministre, soulignant la nécessité de redresser l'économie, faute de quoi les générations futures en subiront les conséquences. «Mo okip kat minister, mo gayn enn sel lapey.» Il a soutenu que sans changement, les conséquences auraient été très graves.

Le Dr Ramgoolam a également mis l'accent sur la nécessité d'un nouveau paradigme, fondé sur l'effort personnel, la méritocratie, l'efficacité économique et la justice sociale. «Il est important d'aider les plus démunis car ils n'ont souvent pas de chance. C'est bien de parler d'égalité des opportunités mais le départ est déjà faussé.»

Il a expliqué que, pour ce premier budget, il faut la coopération de tous les acteurs concernés. Il estime qu'il est essentiel de vivre selon nos moyens. «Nous ne pouvons pas dépenser l'argent que nous n'avons pas.»

Il a aussi mis en garde contre les risques d'une dégradation de la note de Maurice par Moody's, ce qui pourrait entraîner une perte de confiance des investisseurs. Outre la réduction des dépenses, le Premier ministre considère essentiel d'augmenter les revenus en redynamisant l'économie, notamment en soutenant les secteurs exportateurs comme les services financiers et le tourisme. «Les touristes viendront dans un pays où il y a la stabilité et la sécurité. Aujourd'hui, il n'y a pas de sécurité, la drogue est partout. Il faut aussi comprendre ce que veulent les touristes.»

De plus, le Dr Ramgoolam a souligné que 24 500 nouvelles voitures ont été achetées durant l'année écoulée, payées en devises étrangères, ce qui a épuisé plus de Rs 18 milliards en devises, dans un contexte déjà marqué par une pénurie de devises. Il a insisté sur la nécessité de réduire les gaspillages, tout en précisant qu'il ne s'agit pas d'interdire l'achat de voitures mais de savoir faire les bons choix.

Il a déploré la bureaucratie excessive et a annoncé le recrutement d'un haut fonctionnaire retraité de Singapour pour identifier et résoudre les blocages dans le système. «Il faut rendre les processus plus efficaces», souligne-t-il, ajoutant qu'il est impératif de rétablir l'ordre face à des pratiques comme les fuites d'informations lors des enquêtes.

Le Premier ministre a conclu en réaffirmant son intention de redresser l'économie, malgré la difficulté de la tâche. «Se pa popilarite ki nou pe roder, se redress pays.» Il s'est dit déterminé à mener à bien cette mission, affirmant que des décisions difficiles devront être prises pour redresser la situation économique.

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