Théâtre de combats de plus en plus violents depuis la reprise de Khartoum par l'armée soudanaise le mois dernier, El-Fasher, la capitale du Darfour du Nord assiégée depuis près d'un an par les FSR, connaît une situation humanitaire catastrophique. Alors que le gouvernement soudanais a pour la première fois indirectement reconnu l'existence d'une famine dans le camp de réfugiés de Zamzam qui se trouve juste à côté, il appelle l'ONU à intervenir pour y ouvrir des couloirs humanitaires.
Après avoir repris Khartoum, la capitale du Soudan, à la fin du mois de mars, l'armée soudanaise se concentre désormais sur la bataille d'El-Fasher, la principale ville de la province du Darfour du Nord. Si les forces du général Abdel Fattah al-Buhran affirment continuer d'avancer sur les différents axes du front, elles précisent que c'est particulièrement le cas dans et autour de la cité où la situation demeure, selon elles, « sous contrôle ».
Lundi 7 avril encore, plusieurs positions des FSR situées autour d'El-Fasher ont ainsi été visées. L'attaque a débouché sur un lourd bilan : neuf morts et cinq véhicules pulvérisés chez les paramilitaires dont un convoi en provenance de Nyala a également été pris pour cible par l'aviation soudanaise. Le raid aurait fait des dizaines de morts selon un communiqué de l'armée qui affirme que ceux qui ont pu s'échapper ont fui vers le sud en « laissant derrière eux les morts et les blessés ».
En représailles, les FSR ont, de leur côté, violemment bombardé des habitations situées à l'ouest d'El-Facher ainsi que dans le camp de déplacés d'Abou Chouk. Selon le réseau Médecins du Soudan, l'assaut aurait fait une dizaine de morts parmi les civils, dont quatre enfants.
« Les gens affrontent le danger d'une mort à petit feu en l'absence de toute forme d'aide humanitaire »
C'est dans ce contexte que le porte-parole du gouvernement soudanais a appelé l'ONU à intervenir pour « sauver les vies des habitants d'El-Facher et des localités voisines », insistant sur la nécessité de briser le blocus dont la ville est victime depuis près d'un an : « Des avions et des véhicules doivent oeuvrer sous l'ordre de l'ONU pour sauver la vie des habitants », a-t-il encore déclaré. Dans son intervention, celui-ci a enfin demandé aux Nations unies de recenser l'ensemble des crimes commis par les FSR à El-Fasher où la situation humanitaire ne cesse, par ailleurs, de se dégrader.
Selon la Coordination des camps de réfugiés et de déplacés soudanais au Darfour, elle est même « pire que jamais » dans les trois camps de déplacés qui entourent la capitale du Darfour du Nord : ceux de Zamzam, d'Abou Chouk et d'Assalam, où l'ONG a lancé lundi un appel urgent au cessez-le-feu compte tenu d'« une situation sans précédent ». « Les aides n'arrivent plus aux déplacés », confie ainsi son porte-parole, Adam Reggal, selon qui « la vie sur place s'est complètement arrêtée. Les gens affrontent le danger d'une mort à petit feu en l'absence de toute forme d'aide humanitaire », poursuit celui-ci.
Dans un communiqué, la Coordination précise que, dans les trois camps, les marchés sont presque vides et que leurs habitants sont confrontés à la famine, aux maladies et au manque d'eau potable alors qu'ils vivent sous des bombardements permanents. Si, compte tenu de cette situation, l'immense majorité souhaiterait fuir, la plupart ne le peuvent pas faute de voiture et de carburant même si, selon l'OMS, 530 familles ont malgré tout réussi à quitter le camp d'Abou Chouk ce lundi.
Un plan des FSR pour déplacer les habitants d'El-Fasher ?
Déjà assiégés par les FSR, les habitants d'El-Fasher sont, quant à eux, confrontés à une autre pression, en l'occurence celle des formations militaires membres de l'Alliance fondatrice pour le Soudan créée par la famille Daglo et ses alliés au mois de février dernier à Nairobi. Ces dernières n'ont effectivement de cesse de les enjoindre à quitter la cité : « Ne soyez pas le bouclier humain de l'armée, votre sécurité n'est pas garantie en ville », peut-on lire par exemple sur un communiqué qui circule à El-Fasher et dont l'objectif est de pousser les gens à fuir « afin de préserver leur vie ».
Face à cela, le gouverneur du Darfour, Minni Minnawi, dénonce lui l'existence d'un plan mis au point par les FSR et leurs milices pour vider la ville ainsi que le camp de Zamzam de leurs habitants. Selon lui, des voitures de location seraient ainsi mises à disposition des personnes qui souhaiteraient s'en aller. Appelant les habitants à ne pas céder, il affirme que cette offre viserait en fait à capturer les personnes intéressées et à piller leurs biens comme cela s'est déjà vu ailleurs dans le pays.