Afrique Centrale: 31 ans après - La RDC, victime collatérale du génocide rwandais ?

Hier, cela faisait exactement 31 ans que la date du 7 avril est gravée en lettres de sang dans l'histoire contemporaine du Rwanda.

Ce jour de 1994, en effet, commençait le génocide des Tutsis et des Hutus modérés au lendemain de l'assassinat du président Juvénal Habyarimana et de son homologue burundais Cyprien Ntaryamira. Alors qu'ils revenaient d'Arusha (Tanzanie), leur avion a été abattu par un missile au-dessus de Kigali. Ce fut l'élément déclencheur de ce qui allait être, en termes d'intensité, le génocide le plus effroyable que l'humanité ait connu. Entre avril et juillet de cette année, ce sont 800 mille à un million de personnes qui ont, en effet, été froidement assassinées, parfois par des voisins, par des beaux-parents, etc.

Quelque temps après, soit le 19 juillet, le Front populaire rwandais (FPR) prenait le pouvoir à Kigali et installait le pasteur Bizimungu à la présidence (juillet 94 à mars 2000) avant que Paul Kagame lui-même ne prenne sa chose.

Trois décennies plus tard, les stigmates de l'innommable sont encore visibles. Les blessures morales et autres meurtrissures sont loin d'être totalement cicatrisées, malgré les efforts des autorités rwandaises et de la communauté internationale pour tourner la page, notamment à travers les Gacaca, ces tribunaux communautaires villageois qui faisaient dans la justice transitionnelle.

Cette tragédie aura considérablement changé la face du Rwanda, voire de toute la région. Paul Kagame règne, en effet, en maître absolu sur le Pays des mille collines. Et si le Rwanda est considéré aujourd'hui comme une autocratie, en raison de la mise sous cloche de la démocratie, des libertés individuelles et collectives et de la répression dont sont victimes les opposants, les journalistes ainsi que les membres de la société civile, sur le plan économique, le pays est cité en exemple parmi les plus réussis sur le continent. Il en est de même du point de vue environnemental, et la destination Rwanda est devenue un classique des tours operators.

Pour le 31e anniversaire, cette commémoration à Paris, à l'UNESCO, met l'accent sur des expositions photographiques, des projections, des conférences et des rencontres dans l'optique de sensibiliser les jeunes générations et de prévenir ainsi la répétition des génocides.

On ne saurait non plus oublier que ce 31e anniversaire intervient alors que se déroule en République démocratique du Congo (RDC) un nouveau conflit dans l'est du pays. Avec de nouveau le Rwanda comme parrain des rebelles. Déjà en 1997, le même Kagame avait parrainé l'Alliance des forces démocratiques de libération du Congo (AFDL) de Laurent Désiré Kabila pour chasser Mobutu Sese Seko et installer à Kinshasa un proconsul en la personne du général James Kabarebe. Cette fois-ci, c'est le mouvement du M23 qui est le cheval de Troie de Paul Kagame, considéré par tous les rapports comme celui qui instrumentalise cette nouvelle rébellion pour mener une guerre de rapine dans l'est du Congo. Cette partie qui, il est vrai, a toujours été, depuis tout ce temps, la base arrière naturelle des opposants au régime de Kagame qui, de ce fait, estime avoir un droit de poursuite sur le territoire de son voisin, quitte à utiliser des têtes de gondole comme l'est le M23 actuellement.

Au nom de l'impératif de sécurité, l'homme mince de Kigali n'a jamais hésité à intervenir sur le territoire de ce géant aux pieds d'argile qu'est la RDC. Sans que rien ni personne puisse le contraindre à renoncer à ses velléités impérialistes. Quelque part, l'instabilité chronique dans cette partie de la RDC aura été l'une des conséquences externes du génocide rwandais dont on n'a pas fini de révéler tous les secrets, notamment cette question fondamentale : Qui est à l'origine du tir de missile sur l'avion présidentiel d'Habyarimana qui a mis le feu aux poudres ?

Beaucoup ont souvent pointé un doigt accusateur sur le FPR, tandis que certains pensent que ce sont les extrémistes hutus qui ont perpétré le coup pour pouvoir justifier la mise en oeuvre de ce qui se préparait depuis un mois. Ce qui se préparait presque au vu et au su de la communauté internationale et de certains pays comme la France, le Canada et les Etats-Unis qui n'ont malheureusement pas pu conjurer le triste sort qui se profilait à l'horizon, qui n'ont pas davantage pu circonscrire l'incendie quand il s'est déclaré, quand ils ne sont pas rendus coupables de complicités plus ou moins active avec les génocidaires pendant ces quatre funestes mois qui ont changé à jamais le visage du Rwanda.

AllAfrica publie environ 500 articles par jour provenant de plus de 110 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.