Au Maroc, en ce printemps historique pour le football centrafricain, Cyr Dertin Boulengue a marqué à jamais l'histoire du ballon rond de son pays. Pour la première fois, une sélection centrafricaine a pris part à une Coupe d'Afrique des Nations U-17 CAF TotalEnergies. Vice-championne de la zone UNIFFAC, cette équipe centrafricaine a écrit une nouvelle page de son histoire.
Une première sous le sceau de l'apprentissage
Trois matchs, trois défaites. Sur le plan comptable, l'aventure marocaine s'est arrêtée net au premier tour. Mais l'essentiel était ailleurs pour Boulengue et ses jeunes joueurs : apprendre, se jauger, comprendre ce qu'implique la compétition de haut niveau. « Nous sommes venus dans une grande école », a résumé avec lucidité le sélectionneur à l'issue de la lourde défaite face à l'Angola (6-1). « C'est un apprentissage qui ne s'arrête pas ici. Cette compétition nous apporte des choses positives. »
Le technicien n'a pas cherché à masquer les failles : naïveté défensive, manque de rigueur tactique, déficit physique... Mais il a surtout souligné le courage de ses joueurs, qui « se sont livrés dès l'entame », quitte à laisser des espaces exploités sans pitié par l'adversaire. Cette sincérité dans le discours est à l'image d'un homme qui connaît ses réalités et veut construire patiemment.
Une philosophie tournée vers l'avenir
Car Boulengue n'est pas seulement un sélectionneur de jeunes. Il est aussi un bâtisseur. Chargé du développement du football des jeunes au sein de la Direction Technique Nationale, il porte une vision. « Depuis 2020, grâce à un appui de la FIFA, nous avons mis en place des projets structurants, aussi bien pour les garçons que pour les filles. » À Bangui comme dans les provinces, des centres de perfectionnement voient le jour, et une académie nationale ouvrira ses portes dès septembre.
L'enjeu est clair : capitaliser sur cette première participation pour solidifier les bases. Cela passe par un meilleur repérage des talents dans les quartiers, les centres de formation, mais aussi dans la diaspora. « On ne peut pas continuer avec uniquement des joueurs locaux. Il faut aussi intégrer ceux qui jouent à l'étranger », souligne-t-il.
Transmettre l'expérience, inspirer les autres
En ce printemps footballistiquement africain, les Fauves U-17 ont ouvert la voie. Les U-20 centrafricains doivent bientôt disputer leur propre CAN en Égypte (26 avril au 18 mai), et l'entraîneur en appelle à l'unité des techniciens nationaux. « Il n'y a pas d'improvisation dans un parcours prometteur », avertit-il. Il plaide pour une mutualisation des connaissances, une ligne directrice claire, des échanges permanents entre staffs techniques.
« Ce qui est bien quand on est le premier, c'est qu'il y en a d'autres qui suivent », lui a-t-on dit. Et il le prend à coeur. Pour lui, la réussite future passera par un travail à long terme, une stratégie nationale cohérente, et surtout une foi inébranlable dans le potentiel de la jeunesse centrafricaine. « La RCA peut faire quelque chose. Nous ne sommes pas là juste pour participer. Être quart de finaliste dans les années à venir, ce serait déjà un excellent résultat. »
Un symbole de résilience et d'espoir
Cyr Dertin Boulengue incarne ce renouveau silencieux mais déterminé du football centrafricain. Dans un pays souvent éprouvé, sa voix est celle d'un technicien convaincu que l'éducation sportive peut changer des vies. Son regard se tourne déjà vers l'avenir : mieux se préparer, notamment en s'exposant à l'étranger ; renforcer les fondations techniques, physiques et mentales ; et créer une culture de la gagne, sans brûler les étapes.
Ce qu'il a accompli au Maroc restera gravé dans l'histoire du football centrafricain. Il a osé, avec ses jeunes, défier l'élite africaine. Il a appris, il a transmis, et surtout, il a montré la voie. À jamais, il sera le premier.