Au Tchad, après deux semaines de grève de la Cour suprême, une délégation d'avocats a rencontré, lundi 7 avril, le ministre de la Justice et le président de la Cour suprême. Ces avocats accusent la plus haute juridiction du pays d'être devenue une zone de non droit, où les décisions sont rendues « en dehors de toute règle de procédure, et des sursis sont accordés ou non à la tête du client ».
La goutte qui a fait déborder le vase, selon le bâtonnier de N'Djamena, c'est l'affaire de la sextape qui avait défrayé la chronique dans la ville d'Abéché au Tchad, il y a une année. Quatre personnes parmi les prévenus avaient été condamnées de 1 à 3 ans de prison en première instance et en appel.
Aucune des parties n'ayant été satisfaite par l'issue de ce procès, toutes vont alors se pourvoir en cassation. Mais quelle ne fut pas la surprise des avocats des parties civiles de constater que la Cour suprême avait tranché l'affaire avant même d'avoir le dossier entre ses mains, assure Me Djerandi Laguerre.
« Comment une juridiction peut alors rendre une décision ? »
« Ce qui devrait se faire, c'est que la Cour suprême attende que la Cour d'appel lui transfère le dossier. Ben, dans le cas d'espèce, non seulement le dossier est encore à la Cour d'appel jusqu'à aujourd'hui, mais il y a déjà une décision de la Cour suprême qui est rendue en violation totale des dispositions qui régissent le fonctionnement de la Cour suprême. Comment une juridiction peut alors rendre une décision ? Sur la base de quoi ? », s'insurge Me Djerandi Laguerre.
Et ils n'étaient pas encore au bout de leurs surprises, toujours selon le bâtonnier. « Beaucoup de cas ont été révélés. On a demandé aux avocats de nous envoyer tous les cas qui sont subis ou leurs clients ont subi. On a recensé plus de 20 cas, du moins pour ce qu'on a reçu. Ce sont des situations incroyables ». Après deux semaines de grève, une délégation d'avocats a eu une séance de travail avec le ministre de la Justice et le président de la cour suprême du Tchad, qui leur a fait des propositions de réformes, notamment sur le fonctionnement de la plus haute juridiction du pays. La délégation a promis de les transmettre à l'assemblée générale des avocats.