A moins d'un revirement, le Cameroun tient une élection présidentielle en octobre 2025. Comme il est de coutume, à l'approche de pareils rendez-vous électoraux, les appels à la candidature du chef de l'Etat, Paul Biya, au pouvoir depuis 43 ans se multiplient à travers le pays. La dernière invitation à briguer à nouveau la magistrature suprême adressée au « Sphinx », comme on le surnomme, émane des bourgmestres.
Réunis à la faveur de la 5e assemblée générale de leur association, les maires des villes du Cameroun ont adopté une motion de soutien et d'appel à la candidature de Paul Biya à la présidentielle qui se profile. Bien avant les édiles, des universitaires et des membres de la société civile se sont livrés au même exercice, laissant libre cours aux spéculations relatives à la candidature de Paul Biya pour un 8e mandat. Il n'y a pourtant plus de suspense en la matière, à voir l'évolution des faits. En janvier dernier, le président de l'Assemblée nationale, Cavayé Yéguié Djibril, a publiquement affirmé que Paul Biya va être, pour la nième fois, candidat à sa propre succession.
Le chef de l'Etat camerounais lui-même n'a pas encore ouvertement évoqué sa possible candidature, mais le doute n'est plus permis. Il sera probablement en lice pour un autre mandat, sauf cas de force majeure. Il ne reste plus qu'à attendre une déclaration officielle. A priori, la loi ne fait pas obstacle aux ambitions du plus vieux dirigeant en exercice de la planète qui compte 92 printemps.
La Constitution camerounaise n'impose aucune limite d'âge ni de mandat présidentiel, ce qui permet à Paul Biya de disposer comme il veut de son avenir politique. Le chef de l'Etat camerounais est libre, en vertu des dispositions constitutionnelles, de vouloir garder la main sur le pays, mais a-t-il encore grand-chose à prouver aux Camerounais qu'il n'a pas pu faire en quatre décennies de pouvoir ?
Pas vraiment. Après avoir succédé à celui qui est considéré comme le père de la nation, Ahamadou Ahidjo, Paul Biya a oeuvré à sa manière au développement du Cameroun, même si tout n'est pas forcément rose. Le chef de l'Etat camerounais a eu le temps d'expérimenter toutes sortes de stratégies et de politiques de développement qu'il devrait à présent songer à passer la main à la jeune génération dont il a contribué à forger une stature.
Il est devenu comme une sorte de guide pour le Cameroun et devrait à ce titre s'effacer avec fierté, pour continuer à conseiller la jeunesse dans l'ombre. Si Paul Biya n'a plus rien à prouver sur le plan politique, son état de santé ne joue pas non plus en sa faveur. Ses check up médicaux à répétitions, surtout en Suisse, attestent des préoccupations relatives à sa santé.
Nonagénaire, il n'a plus le physique de l'emploi, comme à une certaine époque. La fonction présidentielle est tellement prenante que l'on ne voit plus Paul Biya entretenir un certain rythme de vie. Nonobstant ces réalités, il reste dans la bataille et devrait, selon toute vraisemblance, se représenter en octobre prochain, n'en déplaise à ses opposants.
Le septennat que Paul Biya veut manifestement solliciter encore ne serait-il pas celui de trop, vu l'usure du pouvoir dont il est victime ? Ce n'est pas l'avis de ses partisans. Toutefois, une certaine sagesse commande que le chef de l'Etat camerounais prenne une retraite méritée et passe le flambeau à la postérité. Ce scenario serait le plus souhaitable. En tous les cas, le dernier mot revient aux Camerounais qui seront bientôt appelés à trancher dans les urnes. Vont-ils continuer avec Paul Biya ou opérer une rupture ?