Dakar — L'actrice sénégalaise Marième Niang, plus connue sous le nom de Myriam Niang, décédée, mercredi à l'âge de 71 ans, fut l'un des visages les plus emblématiques du septième art africain, marquant profondément les esprits par sa prestance, son audace, sa silhouette longiligne et son regard perçant qui imposait silence et contemplation.
Née le 26 mars 1954, elle s'impose très tôt, dans les années 1970, décennie phare pour le cinéma africain et période faste pour sa carrière.
Sa beauté atypique, son charisme brut et sa liberté d'esprit séduisent plusieurs grands réalisateurs de l'époque, au premier rang desquels Djibril Diop Mambéty, Sembène Ousmane, Momar Thiam ou encore Ousmane William Mbaye.
Son rôle le plus célèbre reste sans conteste celui d'Anta dans "Touki Bouki" (1973), chef-d'oeuvre surréaliste et emblématique de Mambéty, où elle partage l'affiche avec Magaye Niang. Elle y incarne une jeunesse sénégalaise éprise de liberté et de rêves d'ailleurs. Son duo avec Magaye devient mythique, à tel point que des décennies plus tard, en 2018, Beyoncé et Jay-Z s'inspireront d'une séquence du film pour illustrer leur tournée On The Run II, rendant ainsi hommage à cette oeuvre pionnière et à ses interprètes.
Dans "Xala" de Sembène Ousmane (1974), elle incarne Rama, la fille rebelle d'El Hadji Abdou Kader Bèye. Elle y représente une jeunesse lucide, critique, qui refuse de parler français à son père, imposant ainsi une posture de résistance politique et identitaire. Cette attitude marque durablement les spectateurs et symbolise une rupture générationnelle encore d'actualité.
La même année, elle brille dans "Baks (Yamba)" de Momar Thiam, où elle est la compagne du chef de gang Brother Thié. Sa capacité à passer d'un registre à l'autre, de la poésie à la tension urbaine, témoigne de sa grande polyvalence.
Dans les années 1990, elle revient avec des rôles plus discrets, mais toujours justes et marquants : dans Guelwaar (1992) de Sembène, elle interprète Hélène Sène, prostituée amie de la fille du héros. Elle est aussi bouleversante dans le court-métrage "Dial-Diali" d'Ousmane William Mbaye, docu-fiction de 23 minutes où elle tient le rôle principal.
Elle signe son dernier grand retour à l'écran en 2013, lorsque la réalisatrice Mati Diop, nièce de Djibril Diop Mambéty, lui redonne vie dans "Mille Soleils", une oeuvre entre hommage et méditation poétique, où Myriam réendosse le rôle d'Anta, quarante ans après.
Cette étoile du septième art sénégalais qui s'est éteinte fut une actrice libre, fière, et profondément enracinée dans les combats culturels et identitaires de son époque. Par son jeu subtil, sa présence inoubliable et les symboles qu'elle incarnait, elle laisse derrière elle une empreinte indélébile dans l'histoire du cinéma africain.