Au Ghana, pendant deux semaines, une exposition met en valeur les artistes visuels émergents du pays. Organisé par le fonds de dotation français Ellipse Art Project dans le cadre d'un prix annuel, l'événement se tient à Accra du 11 au 27 avril. Il met en lumière cinq jeunes peintres, photographes ou sculpteurs, dont plusieurs travaillent à partir de matériaux de récupération. Tous partagent un point commun : un engagement fort pour la défense de l'environnement.
Avant d'atterrir à Accra, l'événement est passé par quatre autres pays de la sous-région : le Sénégal, le Togo, le Bénin et la Côte d'Ivoire. Cinq ans après sa création, le prix reçoit un nombre croissant de candidatures. Mais la scène émergente artistique ouest-africaine peine toujours à être reconnue à l'international, constate Victoria Jaunasse, directrice du fonds Ellipse Art Project et créatrice de l'événement.
On voit qu'il y a de plus en plus d'initiatives, on voit sur la scène internationale de plus en plus d'artistes d'Afrique de l'Ouest représentés, donc ça, c'est plutôt une très bonne chose. Dans les pays dans lequel on a pu organiser le prix, on s'est rendu compte qu'il y avait beaucoup d'initiatives privées, mais qui restent, je pense, assez timides. Bien qu'il y ait beaucoup de personnes qui essaient de leur propre chef de soutenir les scènes émergentes, je pense qu'il y a une problématique sur le plan international : on ne donne pas assez de visibilité à des artistes ultra-émergents. C'est ce qu'on essaie de faire à travers le prix : on sélectionne des artistes qui n'ont jamais exposé, ou alors avec très peu de visibilité, et le but, c'est de leur donner un maximum d'opportunité, de mettre en valeur leur travail, leur pratique, et de présenter leur travail, que ça soit localement, en Europe ou sur la scène internationale.
Les artistes engagés pour la cause environnementale
Au fond de la galerie d'art Mix Hub, une photographie attire immédiatement l'oeil. Deux enfants, regard fixe vers l'objectif, se baignent dans une rivière d'un rouge éclatant. L'image est signée Reginald Boateng, 25 ans. « J'ai choisi la couleur rouge pour représenter le danger, décrire les effets du Galamsey », explique l'artiste.
Le Galamsey, nom local de l'orpaillage illégal, a progressivement contaminé la majorité des réserves d'eau du Ghana. Un effet papillon, justement le thème retenu cette année par le prix Ellipse. Pour Reginald Boateng, l'art peut précisement servir à freiner cette propagation. « Ce sujet a été passé sous silence. Nous, en tant qu'artistes, avons une voix pour défendre l'environnement, les Ghanéens, les enfants », insiste-t-il.
Une parole locale à portée internationale
Parler à ses compatriotes, mais aussi interpeller au-delà des frontières : c'est le pari d'Emmanuel Aggrey Tieku. L'artiste expose des installations réalisées à partir de vêtements usagés, un matériau abondant dans le pays. « La fast fashion est un sujet mondial, tout le monde y est relié d'une certaine manière. Ce qu'un individu peut ressentir à Accra, au Ghana, peut être transmis à d'autres individus vivant à Paris, à New York », souligne-t-il.
Le gagnant du prix aura d'ailleurs l'occasion de porter son message à Paris, lors de la foire internationale AKAA - Also Known As Africa, en octobre prochain.
▶ Exposition collective des finalistes du Prix ellipse 2025, du 11 au 27 avril 2025 au Mix Design Hub, à Accra, Ghana.