Le procès de l'ancien président sud-africain et la filiale sud-africaine de l'industriel français Thales devait s'ouvrir ce 14 avril 2025 en Afrique du Sud, mais il a été une nouvelle fois repoussé. L'audience du jour sera finalement consacrée à l'information sur un nouveau recours de Thales et de Jacob Zuma, qui comptent bien échapper aux poursuites, dans cette affaire vieille de vingt ans. Retour sur les charges qui pèsent contre l'ex-chef de l'État qui a été forcé de quitter le pouvoir en 2018.
C'est une affaire ancienne : elle remonte à 1999, alors que l'Afrique du Sud s'apprête à débourser des milliards de dollars pour moderniser son armée. À l'époque, Jacob Zuma est vice-président de l'Afrique du Sud et il est soupçonné d'avoir reçu des pots-de-vin pour aider la compagnie française Thales à remporter un de ces contrats d'armement, pour un total avoisinant les 3 milliards d'euros.
Fraude, trafic d'influence, extorsion, blanchiment : ce sont certains des 18 chefs d'accusation qui pèsent sur l'ancien chef de l'État et sur l'entreprise française d'armement. L'État sud-africain, qui est le plaignant, soutient notamment que Jacob Zuma a été soudoyé par Thales pour brouiller les pistes et protéger la compagnie d'un éventuel procès sur les conditions d'attribution de ce juteux contrat.
Seize reports depuis 2021
Sauf que depuis quatre ans, Jacob Zuma et son co-accusé Thales multiplient les recours pour tenter de faire annuler ce procès, qui a été reporté 16 fois depuis 2021.
Jacob Zuma et Thales ont été mis en cause dès 2005. Mais l'affaire est rapidement mise de côté à cause de délais. Les charges sont rétablies en 2007 avant d'être abandonnées de nouveau en 2009. Et il faudra ensuite attendre 2018 pour relancer ce procès du « Arms deal ».
Depuis, Jacob Zuma a adopté une stratégie juridique très agressive pour repousser l'ouverture du procès, en multipliant les recours préliminaires, qui sont déposés avant même que les débats ne commencent véritablement. En mai 2021, l'ex-chef de l'État a plaidé « non coupable » devant la haute cour de Pietermaritzburg. Mais il attaque aussi en parallèle la légitimité du procureur en charge de l'affaire ou affirme que l'accusation utilise des arguments « racistes » contre lui.
Tout cela retarde la présentation des preuves et des témoignages et coûte énormément de temps et d'argent à l'État sud-africain.
La justice doit trancher si les charges sont annulées
Même situation ce 14 avril 2025 avec un recours de Thales auquel Jacob Zuma s'est associé et qui doit être présenté ce lundi devant la haute cour de Pietermaritzburg : les co-accusés estiment que le procès ne peut plus se tenir puisque deux témoins-clés, d'anciens directeurs de la compagnie française, sont décédés entretemps. Leur mort empêcherait de fait Thales et Zuma de bénéficier d'un procès équitable, en l'absence de ces témoignages qui leur auraient probablement été favorables.
La haute cour de Pietermaritzburg doit désormais examiner cette demande et décider si les charges contre Thales (et potentiellement contre Zuma) doivent être annulées.
Le procureur Billy Downer a regretté qu'« au lieu de se défendre rapidement à son procès, Monsieur Zuma a décidé de tenter une fois de plus sa chance pour repousser le moment où des preuves contre lui seront présentées » devant la justice.