Le photographe Aubin Mukoni figure parmi les lauréats du prestigieux prix World Press Photo 2025 pour son projet, « The Lake Has Fallen Silent », une série de photos sur la pollution du lac Kivu. Ce lac est aussi le témoin silencieux de l'instabilité qui secoue cette région. C'est ce témoignage que le Congolais a voulu porter à travers son objectif.
C'est en 2020 qu'Aubin Mukoni a commencé à documenter ce qu'il appelle « le silence du lac ». Originaire de Goma, dans l'est de la RDC, il sillonne les rives du lac Kivu, appareil en main, pour raconter les liens invisibles mais puissants qui unissent l'eau et ceux qui en vivent. Dans ses images, on aperçoit des scènes de pêche, des familles réunies au bord du lac, des étals de poissons au marché. Le commerce du poisson, en particulier les sambaza - petits poissons très prisés à Goma - est au coeur de l'économie locale. Mais, aujourd'hui, ces espèces se raréfient, dit-il.
Le photographe tire la sonnette d'alarme. Goma, ville de plus d'un million d'habitants, déverse chaque jour des tonnes de déchets dans le lac. Une situation liée à une pression démographique croissante avec l'arrivée de réfugiés et de déplacés. Derrière ses clichés, il y a un message, dit-il : celui de la responsabilité collective. Il appelle à une meilleure gestion des déchets, à une conscience partagée pour préserver ce qu'il considère comme un joyau.
À 25 ans, Aubin Mukoni revendique un héritage, celui de son grand-père, lui aussi photographe. Il se définit comme un agent de plaidoyer. Par l'image, il veut susciter des discussions, provoquer des prises de conscience, ouvrir des débats dans sa communauté. Le jury du World Press Photo a salué un travail qui offre un éclairage sur l'importance économique et culturelle du lac, dans un contexte de tensions croissantes entre le Rwanda et la RDC. Pour Aubin Mukoni, ce travail n'est que le premier chapitre d'un engagement à long terme.